Un pipeline dans la tête

Photo: Jeff McIntosh/PC

«Nous sommes gouvernés par des hommes dont nous ignorons tout, qui modèlent nos esprits, forgent nos goûts, nous soufflent nos idées. (…) Ceux qui manipulent ce mécanisme social imperceptible forment un gouvernement invisible qui dirige véritablement le pays.» – Edward Bernays, fondateur des relations publiques.

Le combat que mène TransCanada n’est pas de rendre son projet de pipeline plus vert, mais plus acceptable socialement. Tous leurs efforts ne convergent pas vers l’amélioration du projet, mais bien vers la façon dont nous percevons le pipeline. Noam Chomsky appelait l’opinion publique «l’arme absolue». Si tu la possèdes, tu peux attaquer! En dictature, l’opinion publique se contrôle à coups de matraque; en démocratie, elle se contrôle avec de la propagande.

C’est précisément la raison pour laquelle TransCanada avait embauché la plus importante firme de relations publiques du monde: Edelman. Parce qu’avant de faire passer un pipeline à travers le Québec, ils doivent d’abord nous le faire passer dans’ tête. TransCanada a depuis engagé une nouvelle firme de relations publiques qui a encore pour mission de rendre leur tuyau sexy! Pour ce faire, les méthodes sont efficaces et bien huilées : corrompre l’élite dirigeante, acheter les chercheurs et les scientifiques, soudoyer des personnalités populaires, inonder les citoyens de publicités favorables, engager des lobbyistes pour faire pression et diaboliser les écologistes. Ils nous vendent un gros pipeline bandé de pétrole comme on nous vend de la gomme balloune rose : en misant sur les minces qualités du produit et en sous-estimant ses dangers.

TransCanada emploie actuellement pas moins de 22 lobbyistes inscrits au registre québécois, dont 8 lobbyistes-conseils auprès des élus du gouvernement Couillard. L’ex-premier ministre Jean Charest, qui a le don de nous friser l’indignation, a tenté d’organiser une rencontre entre des représentants de TransCanada et le cabinet Trudeau. Et ça, sans oublier le coprésident du comité de campagne nationale de Justin Trudeau, Daniel Gagnier, qui a été forcé de démissionner au mois d’octobre passé, après qu’il eut donné de précieux conseils à TransCanada, l’invitant à mener des efforts de lobbyisme dès l’élection du prochain gouvernement pour éviter tout retard dans le projet de pipeline. Ils diront que c’est légal, je répondrai que c’est totalement immoral.

Le pipeline doit traverser plus de 800 cours d’eau au Québec. Selon une étude réalisée par Polytechnique, ces traversées pourraient poser de grands risques environnementaux pour une trentaine de rivières importantes. De plus, le pipeline devrait servir presque exclusivement à l’exportation directe du pétrole des sables bitumineux vers l’Europe, les États-Unis et l’Inde. Les audiences du BAPE ont par ailleurs permis de constater que le pipeline ne constitue pas une solution de rechange au transport de pétrole par train.

Le but premier de leur tuyau de la mort n’est pas la création de jobs, la santé économique du Québec ou le bonheur des autochtones, mais bien de doubler la production des sables bitumineux. TransCanada a besoin du Québec pour en faire son complice mortifère en laissant passer le tiers de la production de l’or noir à travers notre territoire. Montrons-leur que l’arme absolue ne se tirera pas dans le pied.

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