Montréal

Le logiciel libre peine à s’installer à Montréal

La Ville de Montréal continue de négliger les logiciels libres, selon certains. Une option jugée pourtant flexible et économique. La Ville se défend de mal agir.

Qu’ont en commun les avions de Boeing, la Smart TV de Samsung, les téléphones Android, le ministère des Finances français et, bientôt, les futurs wagons de métro de la STM? Ils font désormais appel à des logiciels libres de type Linux plutôt qu’à des logiciels propriétaires comme Microsoft, Oracle ou Adobe.

Toutefois, le gouvernement du Québec et les principales municipalités québécoises continuent de faire la sourde oreille à cette option, selon certains. «Montréal et l’État québécois, ce sont des marchés verrouillés», déplore Cyrille Béraud, président de Savoir-faire Linux. Il cite en exemple la rallonge de 22 M$ octroyée le mois dernier par la Ville de Montréal pour l’achat de licences et de services de gestion de bases de données Oracle. «Pourtant, les logiciels libres seraient moins chers (NDLR : puisqu’ils n’incluent pas de droits de licence à payer) et beaucoup plus adaptables. Le code source du logiciel étant public, la communauté peut modifier le logiciel selon ses besoins et partager ses améliorations avec les autres», précise M. Béraud.

Lorsqu’il a questionné la Ville de Québec sur sa position à cet égard, il y a quelques semaines, la réponse qu’il a reçue par courriel disait:
«Les coûts de transition ont refroidi notre enthousiasme initial.» La Ville faisait notamment état de la formation de milliers d’utilisateurs, de la conversion de certains documents et de l’intégration aux dizaines d’applications provenant de différents fournisseurs n’utilisant pas de logiciels libres.

Ces conclusions ne correspondent pas à l’expérience française. Dans une note ministérielle signée par le premier ministre français, on détaille en effet sur 20 pages les modalités et les avantages des logiciels libres. Si le document souligne certaines embûches à éviter, l’expérience du ministère des Finances indique que le coût net a été divisé parfois jusqu’à 10. «Si l’État français s’y met, pourquoi ne le fait-on pas ici ?» se questionne M. Béraud, en pointant aussi du doigt la Ville de Montréal.

De son côté, l’administration montréalaise rétorque qu’elle utilise 33 logiciels libres, notamment pour son site web, et qu’elle prend toujours en compte les logiciels libres lors de ses analyses liées au choix informatique. «Il est important de rappeler que le libre est une industrie au même titre que les autres… Il serait injuste de favoriser le libre et de pénaliser les fournisseurs de produits commerciaux», précise le Service des technologies de l’information, qui ajoute que la position de la Ville est similaire à celle du gouvernement du Québec.

Une affirmation qui ne rassure pas M. Béraud. En 2010, son entreprise avait gagné en cour contre la Régie des rentes du Québec, accusée d’avoir choisi le logiciel Vista de Microsoft sans mise en concurrence. Mais quelques mois plus tard, le gouvernement Charest avait passé en catimini un décret autorisant cette pratique jusqu’en mars 2013. Quant au gouvernement péquiste, il est en voie d’octroyer un contrat de plusieurs dizaines de millions pour l’achat de logiciels Microsoft sans appel d’offres.

Ce qu’en dit l’opposition
Si la Ville de Montréal prétend ne pas être fermée aux logiciels libres, deux des partis d’opposition ne sont pas de cet avis. «Le logiciel libre n’est pas favorisé actuellement. Il semble y avoir une réticence au changement chez les hauts fonctionnaires», a dit Marc-André Gadoury, élu de Projet Montréal. «Avec les arrestations, ces dernières années, à la direction informatique, il y a urgence de revoir son mode de gestion des contrats», a dit Elsie Lefebvre, élue de Vision Montréal.

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