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Faut-il craindre la vente de nos start-up?

Photo: Métro

Montréal risque-t-elle de perdre le Google de demain si ses start-up se vendent au plus offrant? Pas vraiment, répondent en substance les entrepreneurs de la nouvelle économie, qui clament que la game a changé par rapport au temps où Montréal perdait ses sièges sociaux au profit de Toronto.

C’est la vente de la start-up montréalaise PasswordBox au géant américain Intel qui a ravivé les craintes au début du mois. Fausse alerte toutefois, Intel a annoncé que les 48 employés montréalais de la petite entreprise spécialisée dans la gestion des mots de passe resteraient basés à Montréal.

Mais selon certains analystes, les entrepreneurs de la nouvelle économie devraient prendre plus de temps pour faire croître leur entreprise avant de la revendre. «Il y a un changement de culture qui doit s’opérer et qui ferait que les Canadiens voient plus grand», clame Eugène Bomba, associé chez PwC. Cet été, son entreprise a réalisé une étude intitulée Construire les géants de demain auprès de 150 entrepreneurs canadiens de start-up. Seulement 22% d’entre eux n’envisageaient pas à terme de vendre leur entreprise.

Pour que l’écosystème techno à Montréal prospère, il nous faut plus de «baleines» (des leaders). Sans de telles baleines, le Canada deviendra une pépinière de start-up dans lesquelles les géants américains feront leurs emplettes, déclarait récemment au magazine Les Affaires Yona Shtern, président de BeyondTheRack, un club de magasinage en ligne.

Un point de vue partagé par LP Maurice, fondateur de Busbud, l’Expedia de l’autobus. Mais jusqu’à un certain point seulement. «Idéalement, on ne veut pas perdre trop de nos start-up locales, car les talents et l’activité économique qu’elles génèrent quittent alors le territoire. Mais d’un autre côté, ça va arriver, et parfois c’est même bénéfique pour l’écosystème en créant de la liquidité pour les entrepreneurs, leurs équipes et leurs investisseurs», affirme-t-il.

«Pour encourager nos start-up à continuer de se développer ici, il faut avoir de bonnes universités afin que celles-ci sentent qu’elles disposent de la main-d’œuvre nécessaire sur place pour grandir. Ensuite, elles doivent pouvoir trouver localement suffisamment d’investissement», ajoute-t-il en précisant que l’État peut aussi avoir un rôle à jouer en injectant des fonds permettant la croissance de ces entreprises naissantes.

Le gouvernement finance par exemple Teralys Capital, qui gère plusieurs fonds. L’entreprise a investi directement ou indirectement dans plus de 100 nouvelles entreprises des secteurs de l’innovation depuis 2009.

Difficile de savoir si Mont­réal a perdu beaucoup de start-up depuis la fameuse vente de Softimage à Microsoft en 1994. «Comme ce sont des transactions privées, l’information n’est pas forcément divulguée. Il arrive parfois aussi que la transaction financière ne se réalise complètement que quelques années plus tard», indique Sylvain Carle, DG de FounderFuel, un incubateur de start-up.

Ce dernier ne s’inquiète pas de ce phénomène qui contribuerait pourtant à la perte de sièges sociaux d’entreprises qui pourraient devenir les Google de demain. «Plutôt que de parler de brain drain, on ferait mieux de parler de brain flow. Je n’ai pas l’impression qu’on se fait voler des sièges sociaux, j’ai l’impression qu’on bâtit des réseaux. Si les cerveaux sont temporairement à New York, Barcelone ou Tokyo, ils restent connectés avec Mont­réal», ajoute celui qui est déjà passé par Twitter (San Francisco) avant de revenir dans la métropole.

Le vrai défi des incubateurs montréalais et de leurs bailleurs de fonds, c’est plutôt de répondre à la demande, selon lui. «Pour chaque cohorte, on choisit 10 entreprises, mais on reçoit 350 demandes; il faut arriver à accélérer le rythme», explique-t-il. L’autre grand défi, selon lui, est de savoir comment la technologie sera capable de changer la santé, l’éducation la culture et même l’agriculture.

«On travaille actuellement à connecter les robots pour qu’ils travaillent ensemble. On pourra alors avoir un drone qui survole un champ et évalue la météo, pendant qu’un autre prépare les semences avant d’organiser leur plantation par un troisième robot», explique-t-il.

Incubateur 101
Les incubateurs les plus actifs de Montréal se comptent sur les doigts des deux mains.

  • Ils accueillent une dizaine d’entrepreneurs en devenir pendant au moins trois mois.
  • Des mentors les aident sur les plans technique, financier et juridique.
  • L’incubateur prend généralement en échange de 3% à 6% de l’entreprise.

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