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Dans la peau d’un colon de la Nouvelle-France (ou presque)

Photo: Josie Desmarais

Aujourd’hui, la ville fête ses 375 ans. Pour l’occasion, notre journaliste a tenté de vivre comme en 1667, soit 25 ans après l’arrivée des premiers colons. Divulgâcheur: il faut aimer l’oignon cru pour vivre comme à l’époque!

Pour entamer la journée dans la peau d’un colon de la Nouvelle-France – pas question de prendre un bol de céréales au p’tit déjeuner – ça n’existait pas. Heureusement pour me guider, j’ai un coach, Éric Michaud, conteur professionnel et vulgarisateur qui collabore avec plusieurs musées montréalais.

«Au moment de la colonisation, les gens mangeaient jusqu’à 2 livres de pain par jour. Ça pouvait représenter 80% de l’alimentation», explique coach Michaud. Ce dernier suggère aussi de manger un oignon rouge cru. À l’époque, on pensait que ça permettait d’éloigner certaines maladies. «Et comme c’est long à digérer, ça tient au corps longtemps», ajoute-t-il. L’autre élément du trio matinal en Nouvelle-France, c’est un shooter d’eau-de-vie. Il paraît que ça fait passer le goût de l’oignon.

Pis? Hum, ça pourrait être pire, mais on ne conseille à aucun restaurateur d’ajouter ça au menu. Même l’écureuil n’a pas voulu du trognon. Et comme on s’est lavé les dents avec un chiffon imbibé de vinaigre pour tuer les bactéries, mettons que les collègues ne se vont pas s’éterniser en discussions!

Direction le travail
Pour se rendre au boulot, il faut oublier le vélo, et je n’ai pas de cheval sous la main. Car, même si l’édit royal restreignant le nombre de chevaux par famille (pour éviter la paresse) n’a pas encore été promulgué, des iroquois m’ont récemment piqué ma monture.

En 1667, ce qui est aujourd’hui le quartier Centre-Sud n’est habité que par une poignée de colons. Même si le calme est revenu, les 600 autres préfèrent généralement vivre à l’intérieur des fortifications du fort Ville-Marie en raison des attaques iroquoises. Il va donc falloir marcher 3km avec des godillots qui ne viennent pas de chez Sports Experts. On longe la rivière Saint-Martin (proche de l’actuel boulevard René-Lévesque) pour finalement aboutir au centre-ville, sans encombre.

Après 40 minutes de marche, l’esprit de la Nouvelle-France commence à se faire sentir. «Sentir», dans le sens olfactif du terme. «À l’époque, les gens croyaient que plus on laissait une couche épaisse de crasse sur son corps, moins on avait de chance que les microbes (appelés «miasmes» à l’époque) rentrent par la peau», raconte Madeleine Juneau, directrice du musée de la Maison Saint-Gabriel.

Comme il n’est pas question de prendre l’ascenseur et de taper notre article sur un ordinateur, on s’arrête à la taverne Deuxième chopine (insérer ici le logo de Cafés Second Cup) pour écrire notre texte à la plume et à l’encre.

Midi, c’est l’heure du repas. Aujourd’hui est un «jour maigre», ainsi que environ 150 jours par an, tel que stipulé par l’Église. Ça signifie qu’il n’est pas question de manger de la viande. Seuls les animaux vivant dans l’eau, comme les poissons, peuvent être consommés durant ces jours-là. «À l’époque, il y a eu une controverse: peut-on manger des castors durant les jours maigres, sachant qu’ils vivent dans l’eau. L’Église était contre, mais d’autres clamaient que c’était des poissons», souligne Mme Juneau. La Faculté de médecine de Paris a fini par trancher en faveur des seconds et les colons de la Nouvelle-France ont pu manger du castor durant les jours maigres.

Blé d’Inde et omelette
Mais ce n’est pas ça qui est au menu aujourd’hui. On est invité chez le coach Michaud, à Verdun, qui s’appelait dans le temps Côte-des-Argoulets, ce qui signifie «bon tireurs. En effet, l’endroit servait d’avant-poste militaire pour prévenir les attaques des Iroquois.

«Contrairement au mythe, on mangeait très bien à l’époque», confie Éric Michaud, qui nous a préparé du blé d’Inde fleuri (ancêtre du pop-corn), cuit dans de la cendre chaude. Le tout est accompagné d’une nulle – une omelette faite de jaunes d’œufs, de sucre, de crème et de pétales de rose – qui s’avère succulente.

On retourne terminer notre article à la taverne. Bilan de la journée : on peut se promener habillé en colon de la Nouvelle-France sans avoir à expliquer quoi que ce soit aux voisins ou des éducateurs de la garderie, ni même se faire arrêter par des touristes pour des photos.

Histoire de revenir plus rapidement chez soi, en 2017, on fait fi des règles du défi et on grimpe dans un véhicule deLorean au logo de la Société de transport de Montréal. Premier geste de l’homme moderne retrouvé: s’enfiler une double ration de rince-bouche pour tenter de se débarrasser de cet arrière-goût d’oignon!

Trois idées pour plonger dans l’histoire

1-L’application pour téléphones intelligents Montréal, toute une histoire permet de se balader dans le temps et le long du fleuve Saint-Laurent entre la Maison Saint-Gabriel et le Musée de Lachine. Le long du parcours, on trouve des photos anciennes, des ambiances sonores et même un quiz pour jouer en famille.

2-L’émission La Grande traversée, présenté à la télé de Radio-Canada, permet de suivre dix candidats ayant accepté de revivre la traversée des colons de la Nouvelle-France. Huit semaines de traversée, au cours desquelles il faut faire voguer un trois-mâts avec le ventre à demi-plein et dans des conditions difficiles, permet de réaliser l’ampleur du défi.

3-La fête de Sagabone, prévue le 3 juin au Jardin botanique, commémorera la Grande paix de 1701 avec 40 nations autochtones.

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