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Montréal veut expulser des centaines de pitbulls

Photo: Chantal Levesque/Métro

La Ville de Montréal exige de plus d’un demi-millier de propriétaires, qui ont tenté d’enregistrer leur chien de type pitbull, qu’ils retirent leur animal du territoire de la métropole sous quatre semaines. Une décision qui pourrait mener à une vague massive d’abandons, craignent des refuges.

Environ 520 propriétaires ont reçu ou vont recevoir dans les prochaines heures cette lettre datée du 21 août, a appris Métro. Signée par «Ville de Montréal», celle-ci indique que le permis spécial de garde pour détenir un pitbull, exigé par le nouveau règlement animalier mis en place par l’administration Coderre, ne leur est finalement pas accordé.

Les propriétaires d’un tel chien devaient impérativement déposer leur demande avant le 31 mars. Depuis cette date, tous les pitbulls non enregistrés sont désormais interdits sur le territoire montréalais. Les personnes ayant entrepris une telle démarche, mais dont le dossier était incomplet, détenaient un permis temporaire et avaient jusqu’au 1er juin pour fournir les pièces manquantes.

Ce sont ces derniers qui sont visés par cette lettre. «Bien que vous ayez déposé une demande, vous avez omis de compléter votre dossier», précise le document qui donne également des directives aux destinataires du courrier. Ceux-ci doivent se «départir» de l’animal et le confier à un refuge ou «à un nouveau gardien» dans une municipalité qui autorise les pitbulls. Un délai de quatre semaines leur est accordé.

En cas de refus, la Ville évoque «des poursuites judiciaires» et «la saisie de [votre] animal». L’administration ne pourra cependant ordonner aucune euthanasie en raison d’un conflit juridique en cours, sauf si ce chien a fait preuve d’agressivité.

«La Ville compte sur la collaboration de ces personnes pour assurer le suivi approprié», écrit, par courriel, Gonzalo Nunez, porte-parole de l’administration, qui explique qu’«une évaluation des dossiers» sera faite «avant de prendre une décision sur les démarches additionnelles.»

«On est en train de cibler des gens qui voulaient se conformer. Ces citoyens sont désemparés.» –Me Sophie Gaillard, avocate de la SPCA

Refuges «sous le choc»
Les principaux refuges de Montréal n’ont pas été informés d’une telle nouvelle. «C’est incroyable et impensable», affirme Pierre Couture, patron du Berger Blanc. Du côté de la Société pour la prévention de la cruauté envers les animaux (SPCA), on se dit «sous le choc».

«C’est scandaleux de ne pas nous avoir mis au courant, clame Me Sophie Gaillard, avocate de la SPCA. Ça témoigne de l’improvisation totale de la Ville, du début à la fin, sur ce règlement».

Tous craignent une vague massive d’abandons. «Entre 15 et 20% de ces chiens seront laissés dehors», estime Pierre Couture. «Sinon, les gens vont tenter de cacher leur animal chez eux et ne vont plus aller chez le vétérinaire. Il va même y avoir une hausse des dénonciations entre voisins», reprend Me Gaillard, avant d’affirmer que «quatre semaines, c’est beaucoup trop court pour trouver une solution».

Pour pallier cette situation, la SPCA a organisé plusieurs réunions d’urgence. Alors que l’Ontario interdit les pitbulls dans sa province depuis 2005 et qu’un tel projet de loi a été déposé à l’Assemblée nationale en avril, l’organisme se dit désemparé. «C’est très difficile pour nous de faire adopter au Québec des chiens qui pourraient être interdits un jour, détaille Me Gaillard. On est obligé d’en envoyer en Alberta, dans un refuge partenaire, mais ça nous coûte 400$ par chien et on ne reçoit aucune compensation financière.»

Une «chasse aux sorcières» pour Projet Montréal
L’opposition officielle évoque «une chasse aux sorcières» menée «contre des gens de bonne foi qui ont donné leur adresse».

«L’administration a fait du profilage afin de faire ensuite du porte-à-porte pour saisir les animaux, dénonce le conseiller Sterling Downey, responsable de ce dossier pour Projet Montréal. Ces gens ont fait des démarches, sont responsables, mais ils vont se faire saisir leurs chiens, car il manque un bout de papier. Ces animaux ne représentaient pourtant aucun danger. C’est complétement ridicule. Dans un refuge, qui manquera d’argent pour s’en occuper, ils seront mal nourris, mis dans de petites cages et c’est comme ça qu’un chien devient dangereux. On ne peut pas soumettre à un tel stress les propriétaires et leur animal.»

Projet Montréal craint de nouvelles poursuites judiciaires. «La Ville va encore perdre beaucoup d’argent, imagine l’élu de Verdun. C’est un autre exemple de l’échec complet de l’administration Coderre en matière de gestion animalière.»

Les conditions nécessaires pour obtenir un permis

Pour obtenir un permis spécial, au prix de 150$, le propriétaire d’un pitbull, qui doit être majeur, devait fournir notamment des preuves de stérilisation du chien et de vaccination contre la rage. Le chien doit également être muni d’une micropuce et surtout, le demandeur doit fournir une attestation du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM), spécifiant ne pas avoir été coupable d’une infraction liant à des violences, vols, trafic de stupéfiants et au port d’une arme à feu au cours des cinq dernières années.

Si le propriétaire veut sortir son chien dans son propre jardin, il doit également mettre en place une clôture d’une hauteur minimale de 2m avec un maillage suffisamment serré pour empêcher l’introduction d’une main ou d’un pied.

Vous êtes dans cette situation? Communiquez avec le journaliste Romain Schué : romain.schue@journalmetro.com

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