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Québec montre les dents contre TransCanada

Quebec Environment Minister David Heurtel responds to reporters questions Wednesday, June 3, 2015 at the legislature in Quebec City. THE CANADIAN PRESS/Jacques Boissinot Photo: Jacques Boissinot/The Canadian Press

Au tour du gouvernement du Québec de tenter de forcer la main de TransCanada en cour.

Le ministre de l’Environnement, David Heurtel, a annoncé mardi le dépôt d’une injonction pour forcer l’entreprise derrière le projet de pipeline Énergie Est à se conformer à la Loi québécoise sur la qualité de l’environnement.

Le refus de TransCanada de se soumettre à une évaluation environnementale complète a forcé le Bureau d’audience publique en environnement (BAPE) à enclencher une audience publique générique, a résumé mardi M. Heurtel. Au bout de ce processus, le gouvernement québécois n’aurait pas de pouvoir de véto.

«Quiconque veut faire un projet au Québec doit respecter l’ensemble de ses lois et règlements», a-t-il ajouté, en précisant que cette action judiciaire n’était pas une prise de position pour ou contre le projet de pipeline.

Le ministre a toutefois refusé de repousser les audiences du BAPE tel que le demandent plusieurs groupes environnementaux. «Il est essentiel que les Québécoises et les Québécois, les municipalités et les autres groupes intéressés par la question puissent se prononcer afin que le Québec adopte une position en prévision des audiences de l’ONÉ», a conclu M. Heurtel.

Ce n’est pas l’avis de Me Michel Bélanger, cofondateur du Centre québécois du droit en environnement (CQDE) qui pilote une injonction similaire de quatre groupes environnementaux qui a été déposée il y a deux semaines. Sur les ondes de RDI, Me Bélanger a même déclaré que son organisation va déposer une autre injonction, mais cette fois pour faire stopper les audiences du BAPE qui doivent débuter le 7 mars.

Du côté de TransCanada, Louis Bergeron, VP Québec et Nouveau-Brunswick, s’est dit «perplexe», car son entreprise s’était entendue avec le gouvernement québécois pour un BAPE mandaté sous l’article 6.3 (NDLR: BAPE générique). L’entreprise indique que les 20 000 pages déposées à l’ONÉ pour la portion québécoise du projet seront amplement suffisantes pour mener une consultation complète au BAPE.

La décision face à l’injonction déposée mardi par le gouvernement devrait être entendue ce printemps. Le ministre de l’Environnement compte s’appuyer sur la décision rendue dernièrement par la Cour suprême de Colombie-Britannique dans le cadre d’un projet similaire. Cette dernière concluait que le gouvernement de Colombie Britannique ne pouvait abdiquer de son pouvoir décisionnel par le biais d’une entente avec l’ONÉ, l’organisme fédéral chargé d’évaluer les projets de pipelines.

En matinée, le maire de Montréal, Denis Coderre, a salué l’initiative du gouvernement du Québec. «Il y a beaucoup de failles dans le projet Énergie Est. Tel que présenté, il n’est pas acceptable», a-t-il ajouté. Un peu plus tôt cette année, la Communauté métropolitaine de Montréal présidée par M. Coderre s’était positionnée contre le projet qui prévoit amener chaque jour jusqu’à 1,1 million de barils de pétrole d’Alberta vers le Nouveau-Brunswick.

Du côté des groupes environnementaux, Jean-Patrick Toussaint de la Fondation David Suzuki a déclaré que la décision gouvernementale était «une bonne décision». Il relève toutefois, «un petit bémol: on aurait espéré avoir un BAPE complet, plutôt qu’un BAPE générique».

Les deux partis d’opposition ont de leur côté souligné l’incohérence gouvernementale. «La requête en injonction est un beau spectacle politique, mais ne change strictement rien dans les faits. Le ministre a déclenché un BAPE en violation de la loi», a déclaré le chef du Parti québécois Pierre-Karl Péladeau.

«La complaisance du Parti libéral dans le dossier d’Énergie Est a permis à TransCanada de gagner du temps et d’opérer avec l’arrogance habituelle. On ne peut que regretter que ce soit encore des groupes écologistes qui sonnent l’alarment et forcent le ministre de l’Environnement à sortir de son mutisme et à agir», déplore de son côté Manon Massé, députée de Québec solidaire.

Encadré: différences entre 6.3 et 31.1

La semaine dernière le Centre québécois du droit en environnement (CQDE) a organisé une conférence pour expliquer pourquoi TransCanada essayait, selon eux, de se soustraire à l’article 31.1 de la Loi sur l’environnement du Québec.

-Avec un BAPE générique sous 6.3, le Québec ne pourrait pas s’opposer au projet

-Avec 6.3, pas d’étude d’impact donc TransCanada n’a pas à répondre aux questions complètes que pourraient lui poser les ministère de la Sécurité publique, de la Santé ou de l’Environnement

-«En bref, avec un BAPE sous l’article 6.3, le Québec serait à l’ONÉ sur le même pied d’égalité que la Chambre de commerce de Sudbury», selon le CQDE.

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