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La balado encore sous-estimée

Photo: Métro

Les cotes d’écoute sont le nerf de la guerre, dans l’univers de la radio. Pourtant, une portion importante de l’auditoire numérique est ignorée, ce qui n’offre pas un portrait complet de la situation, déplorent certains acteurs du milieu.

Un auditeur qui préfère écouter ses émissions en baladodiffusion ou en rediffusion sur le site web de la station de son choix n’est pas inclus quand vient le temps de comptabiliser les données d’auditoire pour les différentes stations de radio au Québec. En matière de numérique, seules les écoutes en direct sur le web (streaming) sont prises en compte. Il n’est question ici que des balados ou des émissions produites par des chaînes de radio. La baladodiffusion indépendante serait un autre sujet en soi.

«Les balados ne sont pas inclus, car généralement, elles ne contiennent pas l’intégralité de ce qui a été mis en onde, explique Robert Langlois, vice-président de la région de l’Est pour Numeris (anciennement Sondages BBM), la coopérative responsable de récolter les données d’auditoire au Québec. Ça viendrait biaiser nos résultats.»

«Nous travaillons présentement sur des systèmes parallèles autant en radio qu’en télé pour mesurer ces auditoires, ajoute M. Langlois. Ils ont une valeur quand même. En télé, on parle, entre autres, de vidéo sur demande et en radio, notamment, des balados. Ça va éventuellement faire partie de notre service.»

Radio-Canada, qui produit beaucoup de balados et qui offre des rediffusions et du contenu original audio sur son service Première Plus, aimerait avoir des chiffres officiels sur lesquels s’appuyer.

«L’univers change et je serais bien heureuse que Numeris trouve une façon d’accommoder ces changements dans la consommation de l’audio et de la radio», affirme Patricia Pleszczynska, directrice générale des services régionaux et radio chez Radio-Canada.

Même si la société d’État ne vend pas de temps d’antenne à la radio, des données incluant tous ses auditeurs lui seraient utiles. «Le numérique, pour nous, est un univers où il y a des revenus, contrairement à la radio, dit Mme Pleszczynska. L’intérêt premier est de savoir si nous visons juste, que le projet de contenu est pertinent, mais dans certains cas, il pourrait y avoir une monétisation possible.»

Mesure imparfaite
Il est difficile de connaître exactement le nombre d’auditeurs d’une balado avec les moyens utilisés en ce moment. «Nous pouvons comptabiliser le nombre de téléchargements, indique Mme Pleszczynska. Cependant, nous n’avons pas de méthode scientifique ou technique pour faire un lien officiel entre téléchargement et écoute.»

C’est un défi depuis les débuts du médium, explique Mélanie Millette, auteure d’une des premières recherches sur la baladodiffusion, toutes langues confondues, et professeure substitut au département de communication sociale et publique de l’UQAM. «Un téléchargement ne veut pas dire une écoute, et vraiment pas plusieurs écoutes, explique-t-elle. La tendance lourde pour ce type de contenu est qu’il s’agit d’une consommation individuelle. C’est rare qu’une balado va jouer dans les haut-parleurs pendant qu’on cuisine en couple, par exemple.»

Pour les radios privées, les chiffres de Numeris permettent de vendre du temps d’antenne aux annonceurs. Cogeco Media, par exemple, ne met pas de baladodiffusions à la disposition de ses auditeurs, mais offre certains de ses contenus en rediffusion dans un format sans publicité. «Les données de Numeris sont aussi une devise, dit Mélanie Bégnoche, directrice de la recherche chez Cogeco. Si les données d’écoute en rediffusion étaient ajoutées aux cotes d’écoute, les annonceurs diraient «vous comptabilisez quelque chose duquel vous avez retiré le contenu commercial.»

En dépit de cela, l’entreprise aimerait pouvoir comptabiliser toutes ces écoutes. «Nous aimerions avoir une mesure globale, ne serait-ce que pour suivre l’évolution de tous nos auditoires», indique Mme Bégnoche.
Et éventuellement faire des sous avec les contenus qui ne sont pas pris en compte pour l’instant. «Le défi est de monétiser cela, reconnaît Mme Bégnoche. Nous pourrions développer nos modèles en mettant une petite pub avant et après le segment en rediffusion. Le contenu commercial serait différent de celui en direct sur la bande FM.»

La méthode PPM

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Dans la région métropolitaine de Montréal, les données d’écoute pour la radio et la télé sont récoltées avec des appareils PPM (portable people meter).

Il s’agit d’un petit appareil que chaque personne dans un foyer sélectionné par Numeris doit porter du lever au coucher et qui détecte tous les codes inaudibles émis par les diffuseurs. Le PPM reçoit les codes. Sur la base de chaque minute, une attribution est faite à la station regardée ou écoutée.

Dans le cas de la radio à Montréal, 400 foyers chez les francophones (environ 900 personnes) et 400 foyers chez les anglophones participent à l’exercice.

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