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Gilles Duceppe: «C’est le Canada qui élit Harper»

L’ex-chef du Bloc québécois, Gilles Duceppe Photo: Yves Provencher/Métro

Métro publie jusqu’à vendredi une série d’entrevues avec les chefs des principaux partis prenant part aux élections fédérales.
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Gilles Duceppe est déterminé à faire mentir ceux qui prédisent la mort du Bloc ou qui remettent en question sa pertinence. Il s’est jeté de nouveau dans l’arène politique avec la conviction que son parti peut être rebâti et qu’il est le seul à pouvoir défendre adéquatement les intérêts du Québec à Ottawa.

Au cours des quatre dernières années, est-ce qu’il y a des dossiers ou des enjeux qui vous ont donné envie de retourner au parlement?
Pas tellement. J’étais chroniqueur au Journal de Montréal, à RDI et à divers postes de radio. Je pouvais dire ce que je pensais des enjeux politiques, mais d’une autre façon. J’étais aussi présent à divers conseils d’administration, je donnais des coups de main dans différents domaines et ça m’occupait passablement.

Aux dernières élections, votre parti avait de nombreux députés et a été pratiquement décimé. Je présume que vous l’avez vécu comme un échec. Cette fois, vous partez avec une toute petite équipe de députés. Qu’est-ce qui vous ferait dire mission accomplie?
Mission accomplie, c’est d’avoir le plus grand nombre de députés possible. On ne fixe pas de chiffres. De la stratégie ouverte, ce n’est jamais bon. Mais je ne suis pas le premier politicien à partir avec une petite équipe. Le NPD n’a pas eu de députés au Québec pendant 50 ans et ses membres ont persévéré. M. Lévesque, M. Trudeau, M. Clark et M. Charest ont tous été battus et ils n’ont pas lâché.

Quels sont les principaux défis de cette campagne?
C’est de démontrer aux gens qui veulent se débarrasser de Harper que le Bloc ne divise pas le vote. Ce n’est pas le Québec, mais le Canada qui élit Harper. Il n’y a que cinq députés conservateurs au Québec. D’ailleurs, les conservateurs étaient minoritaires quand on était forts au Parlement, et ils sont majoritaires depuis 2011. Ce sont les libéraux et les néodémocrates qui divisent le vote dans le reste du Canada. C’est aussi de démontrer les différences qu’il y a entre les députés du Bloc et ceux des partis fédéralistes. Nous sommes indépendants de toute pression venant de l’extérieur du Québec. Contrairement aux autres partis, on ne dit pas à nos députés: «Ne dis pas ça, ça va nuire à tes collègues de l’Ouest ou des Maritimes.»

Qu’est-ce que vous avez surtout retenu des demandes de Denis Coderre pour les Montréalais?
Les besoins majeurs en infrastructures, les festivités du 375e anniversaire, le logement social, les sites d’injection supervisée. Toutes les demandes de Montréal sont raisonnables.

Comment faire pour convaincre un futur gouvernement d’investir dans les infrastructures à Montréal et de renoncer au péage sur le pont Champlain?
Avec un gouvernement minoritaire où le Bloc a la balance du pouvoir, on est en mesure d’exercer des pressions très fortes. On l’a fait dans le passé. Même avec un gouvernement majoritaire, on a forcé l’adoption de certaines lois, comme la loi antigang en 2000. La Prestation universelle pour la garde d’enfants était imposable, et on a fait changer ça en 2006 pour la rendre non imposable.

Vous rappelez beaucoup vos accomplissements passés. Qu’est-ce que vous avez de nouveau à proposer?
L’environnement est un enjeu majeur. Il ne faut pas que le Québec devienne une autoroute pétrolière avec le projet Énergie Est. Je ne m’attendais pas non plus à ce que Mulcair mette de l’avant le déficit zéro en priorité, donc des politiques d’austérité. L’austérité est une erreur en période de récession et de crise économique.

La question des transferts fédéraux dans la santé vous tient à cœur. Quelle est l’importance de cet enjeu?
Dans les années 1960, le fédéral contribuait à hauteur de 50% dans le domaine de la santé. Là, c’est rendu à 22% et ça va baisser autour de 18%. C’est une demande unanime de l’Assemblée nationale, d’augmenter les paiements de transfert. Or, M. Harper a dit non et M. Mulcair vient de dire que, lui non plus, ne pourra pas les augmenter. Le Québec doit faire face à des déficits importants, il voit sa dette augmenter et il a moins d’argent pour les services. Quand les services diminuent, ce sont souvent les femmes qui
remplacent l’État et cessent de travailler pour s’occuper des personnes malades.

En avez-vous assez que les médias laissent entendre que le Bloc va mourir?
Les journalistes sont libres de poser les questions qu’ils veulent. Cependant, je note qu’on ne demande pas souvent aux Verts: «Est-ce que vous allez avoir enfin un député élu?» On ne demandait pas ça souvent au NPD non plus avant qu’il fasse élire des députés. Mais je suis habitué qu’on remette en question la pertinence du Bloc. C’est comme ça depuis les débuts.

Que dites-vous aux souverainistes qui pourraient être tentés de voter pour un parti fédéraliste à cette élection? En quoi le Bloc peut-il encore aider la cause?
On n’a qu’à regarder les deux référendums. En 1980, les 75 députés québécois étaient fédéralistes et le oui a obtenu 40 %. En 1995, on était 53 souverainistes sur le terrain et on a failli gagner. Les trois autres chefs se disent de féroces adversaires des souverainistes. Si les souverainistes accordent leur confiance à un fédéraliste, il ne viendra sûrement pas les aider s’il y a un référendum.

***
En rafale

Un mot pour décrire:

  • Stephen Harper? Dogmatique.
  • Thomas Mulcair? Deux personnes dans une. Tom au Canada anglais et Thomas au Québec.
  • Justin Trudeau? Sympathique.
  • Elizabeth May? Déterminée.
  • Ce dont le Canada a le plus besoin en ce moment? D’avoir une politique étrangère conforme à ce qu’elle était dans le passé, d’une politique étrangère que le Québec souverain pourrait avoir également.
  • Un député d’un autre parti que vous admirez? J’ai eu de bons rapports avec Stéphane Dion, même si on ne s’entend pas du tout sur la loi sur la clarté.
  • Votre mentor? René Lévesque, Nelson Mandela et Paul Gérin-Lajoie m’ont toujours inspiré.
  • Qu’est-ce que vous aimez des campagnes électorales? Rencontrer les citoyens et entendre leurs besoins, leurs idées, leurs objectifs.
  • Qu’est-ce que vous faites pour vous détendre pendant une campagne électorale? Du vélo ou de la natation.
  • Quel est votre lieu préféré de Montréal? J’aime beaucoup le mont Royal. On y prend des marches régulièrement, Yolande et moi, depuis des années, surtout le dimanche.

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