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Les voix de Montréal: Hochelaga, de la «Pittsburgh du Canada» à HoMa

Photo: Musée McCord
Jean-Philippe Warren,
 Sherry Simon et Steven High - Université Concordia

Dans le cadre du 375e anniversaire de la ville de Montréal, Métro s’est associé avec l’Université Concordia pour vous faire découvrir le passé et le présent de quartiers fascinants. Ce mois-ci: Hochelaga-Maisonneuve.

Hier

Le boom d’Hochelaga

  • Incorporé en 1870, le village d’Hochelaga est enfant de l’industrie. Situé sur les bords du fleuve, à proximité du port et exempt d’obstacles naturels, le village profite de l’expansion de Montréal, qui s’impose alors, peu de temps après la création du Canada, en 1867, comme la métropole du pays. Les habitants d’Hochelaga travaillent notamment à la fabrique de tabac W.C. McDonald, aux Abattoirs de l’Est, à la Compagnie des moulins à coton V. Hudon et à la Filature Sainte-Anne.
  • Les premiers appartements conçus pour loger les ouvriers sont modestes. Le développement se fait sans règles ni plan définis. Il s’agit de loger rapidement une population rurale qui s’installe de façon massive à Montréal. Les coûts de l’aménagement du territoire et de la construction des infrastructures urbaines (égouts, eau, réseau de gaz, ouverture des rues) s’avérant trop élevés pour la petite municipalité peuplée d’ouvriers percevant de bas salaires, celle-ci est annexée par Montréal en 1883. Montréal gagne ainsi une large population francophone, ce qui assure définitivement la domination démographique de ce groupe linguistique dans une ville qui, 15 ans plus tôt, était en majorité anglophone.

Le boom de Maisonneuve

  • De riches propriétaires dont les terres sont situées à l’est de l’avenue Bourbonnière refusent l’annexion à Montréal en 1883. Il s’agit d’une cinquante de familles appartenant pour la plupart à la bourgeoisie francophone. Elles entendent créer une ville modèle, appelée Maisonneuve, inspirée par le mouvement City Beautiful aux États-Unis et les villes-jardins en Europe. Elles bâtissent des infrastructures pour en assurer le développement rapide: les quais Sutherland (1891) et Tarte (1900), les voies ferrées de desserte (en 1896, le Canadien National [anciennement la Chateauguay & Northern Railway] installe ses voies ferrées dans l’est de l’île de Montréal), les grandes artères, le premier tramway électrique à Montréal (1892, surnommé le «Rocket»), tout cela attire des compagnies importantes, dont la St. Lawrence Sugar Refining Co. (1887, rebaptisée depuis Sucre Lantic), une raffinerie qui fournit à l’époque près du quart de la production canadienne de sucre. Au début du siècle, Maisonneuve est la cinquième ville industrielle au Canada et la deuxième 
au Québec. Elle devient aussi la «capitale mondiale de 
la chaussure», et on en parle comme de la Pittsburgh 
du Canada.

Le déclin d’Hochelaga-
Maisonneuve

  • La situation économique de Hochelaga et de Maisonneuve ne s’améliorera pas avec les années, et les deux anciennes villes resteront des quartiers ouvriers marqués par le manque de services et la pauvreté. Les entreprises qui ferment ou qui déménagent laissent dans leur sillage des dizaines et des dizaines d’hectares de terrains vacants, souvent contaminés. Durant la grande crise de 1929, puis après la Seconde Guerre mondiale, les industries 
du quartier périclitent.
  • Le quartier devient la proie des maux qui affectent les secteurs pauvres: toxicomanie, violence conjugale, prostitution, décrochage scolaire, chômage.

Géographie
Le nom Hochelaga rappelle 
le village amérindien 
d’Hochelaga, et Maisonneuve, celui du fondateur de Montréal, Paul de Chomedey, sieur de Maisonneuve.

  • Incorporé en 1870, le village d’Hochelaga est annexé à Montréal, en 1883. Maisonneuve s’en détache aussitôt et existe comme ville indépendante jusqu’en 1918.
  • Les quartiers Mercier-Est, Mercier-Ouest et Hochelaga-Maisonneuve sont regroupés au sein d’un même arrondissement depuis la fusion municipale de 2002.

Aujourd’hui

Paupérisation d’Hochelaga…

  • Hochelaga-Maisonneuve est le deuxième quartier le plus pauvre de Montréal, après Parc-Extension. Plus de 23% des ménages ont un revenu inférieur à 20  000$. Par ailleurs, près de 35% des ménages de l’arrondissement vivent sous le seuil de faible revenu (34,6%). Cette proportion atteint 50,7% dans Hochelaga.
  • Exception faite du Nunavik, Hochelaga-Maisonneuve est l’endroit au Québec où l’espérance de vie est la plus basse. En 2006-2008, l’espérance de vie à la naissance des résidants du quartier s’élevait à 74,2 ans, un chiffre qu’il faut comparer à l’espérance de vie de 80,8 ans de l’ensemble des Québécois.
  • On y trouve le plus grand nombre d’utilisateurs de Magasins-Partage. Au coin des rues Pie-IX et Ontario, les immenses bâtiments industriels sont désormais occupés par le Village des Valeurs et la Fripe-Prix Renaissance. On y fabriquait du linge neuf qu’on exportait partout en Amérique: on y achète dorénavant du linge usagé fabriqué en Chine.
  • 

Les HLM sont nombreux à Mercier–Hochelaga-Maisonneuve, représentant 39,3% du parc social de l’arrondissement. Ils sont suivis par les coopératives (31,3%) 
et les OBNL (20,8%).
  • Le déménagement de la sculpture-fontaine de l’artiste Jean-Paul Riopelle du Parc olympique au quartier des affaires en 2003 suscita un vaste débat. «Autant de perdu pour les pauvres, autant de gagné pour les riches», écrira Jacques Keable, qui s’est battu pour que La joute demeure dans son quartier.

…et embourgeoisement d’HoMa

  • Des usines de l’âge d’or industriel connaissent une nouvelle vie: la première filiale à l’extérieur des États-Unis de la compagnie Johnson & Johnson (1912) abrite désormais les bureaux 
de la société Vidéotron.
  • Depuis quelques années, on assiste à la reconversion des secteurs industriels désaffectés. Mercier–Hochelaga-Maisonneuve est notamment arrivé deuxième parmi les arrondissements pour les mises en chantier résidentielles à Montréal de 2007 à 2012, avec un pourcentage de 9,4%, juste derrière 
Ville-Marie (13,4%).
  • Après avoir perdu ses habitants au profit des banlieues, l’arrondissement de Mercier–Hochelaga-
Maisonneuve suscite un intérêt nouveau, en raison notamment du bas prix 
de ses loyers. En 2011, l’arrondissement comptait 65 660 ménages, 4,7% de plus qu’en 2006.
  • Le terme HoMa devient le symbole de la transformation du quartier – sur le modèle du quartier new-yorkais de SoHo, dont le nom est aussi une abréviation (South of Houston Street). Le nom de la boulangerie Arhoma, située place Valois, fait référence à l’arôme du pain et du fromage ainsi qu’à l’origine géographique du commerce.
  • La transformation de HoMa en «condoville» ne va pas sans heurts. Des graffitis expriment des messages anticapitalistes, et des magasins sont vandalisés. La construction de condominiums et l’aménagement de lofts dans les anciennes usines nourrissent le ressentiment de ceux et celles qui voient leur quartier pris d’assaut par 
les promoteurs immobiliers.

Géographie
Le secteur Hochelaga-
Maisonneuve correspond plus ou moins aux limites définies par la rue Sherbrooke au nord, le fleuve Saint-Laurent au sud, la rue Viau à l’est 
et la rue Moreau à l’ouest.

  • Il compte plusieurs axes de circulation majeurs, ainsi que 10 lignes d’autobus et 4 stations de métro (Préfontaine, Joliette, Pie-IX et Viau).
  • Hochelaga-Maisonneuve est un quartier densément peuplé, avec 
plus de 8000 habitants au kilomètre carré.

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