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Une restructuration qui inquiète le milieu des affaires

Archives Métro Photo: Isabelle Bergeron - TC Média

Les milieux politique et économique de l’Est s’inquiètent des coupes budgétaires ainsi que de la restructuration des Centres locaux de développement (CLD) annoncées par l’administration Couillard lors du dévoilement de son nouveau pacte fiscal, la semaine dernière.

Au moins 70 entrepreneurs de Rivière-des-Prairies–Pointe-aux-Trembles et Montréal-Est ont écrit à leur député pour soutenir la Société de développement économique (SODEC) du secteur.

Les gens d’affaires craignent la disparition d’une structure essentielle dans la vitalité économique de l’est de Montréal (voir autre texte).

«Si la SODEC ne m’avait pas aidé, je ne serais plus là», soutient Mario Alfaro, un entrepreneur de Rivière-des-Prairies qui a participé à la mobilisation. Avec son associée, ils gèrent leur entreprise qui emploie deux personnes.

Une expertise locale
M. Alfaro estime que la SODEC l’a empêché de faire des erreurs de débutant qui auraient pu être fatales pour son entreprise.

«Je n’ai pas l’expertise là-dedans, explique-t-il. J’avais le rêve de me lancer en affaires et ils m’ont permis de le concrétiser. Je leur ai présenté mon plan d’affaires et mes prévisions et ils ont fait les études qui m’ont permis de m’ajuster et d’élaborer des stratégies de développement et de marketing.»

M. Alfaro affirme avoir tissé des liens de confiance avec la SODEC et craint de ne plus avoir accès au même service après la restructuration. En tant qu’entrepreneur de l’Est, il s’inquiète particulièrement la centralisation des services.

C’est d’ailleurs en mettant de l’avant cette expertise que la directrice générale de la SODEC, Annie Bourgoin, défend son organisme.

«Il y a de nombreuses PME peu connues qui sont des sous-traitants et des fournisseurs pour de plus grosses entreprises montréalaises. Ces entreprises n’ont pas de grosse hiérarchie. Pour qu’elles puissent continuer, elles ont besoin de soutien. Il faudra faire attention de ne pas perdre cette expertise que nous avons bâtie au cours des 22 dernières années lors de la restructuration», souligne Mme Bourgoin.

Pour démontrer l’importance de l’organisme, la directrice de la SODEC souligne que 85 % des PME soutenues par les CLD survivent plus de cinq ans, alors que ce taux est de 35 % pour les autres.

Malgré l’inquiétude, la SODEC se dit tout de même prête à relever de nouveaux défis et même à élargir son territoire. Jusqu’à maintenant, l’organisme était actif sur tout le territoire à l’est du boulevard Saint-Laurent, mais jouait uniquement le rôle de CLD à Rivière-des-Prairies–Pointe-aux-Trembles et Montréal-Est.

«Nous sommes impatients de commencer le dialogue pour voir comment nous pourrons continuer de travailler avec la Ville, mais nous sommes déçus de la diminution du financement», précise Mme Bourgoin.

Manque de financement
Alors que la SODEC réclame plus d’argent depuis plusieurs années, l’administration Couillard a plutôt choisi de couper son financement. Au Québec, l’enveloppe passera ainsi de 72M$ versés aux CLD à 32M$ versés aux municipalités.

«Ce n’est pas un choix judicieux, dénonce Mme Bourgoin. Les fonds dédiés au développement économique ne sont pas des dépenses, mais des investissements. Nous comprenons que nous sommes en période d’austérité et qu’il faut réduire les dépenses, mais il ne faut pas réduire les revenus», soutient-elle.

«Alors que les PME innovatrices de l’Est présentent un dynamisme renouvelé et inspirant, une coupe en développement économique local pourrait freiner brusquement une économie en croissance», ajoute, pour sa part, le président de la SODEC, Michel Taylor.

Appuis politiques
Le maire Robert Coutu de Montréal-Est s’est opposé vivement à ces coupes.

«Cela démontre un manque de leadership et de cohérence au niveau des décisions prises par notre gouvernement. Aucun modèle d’affaires ne justifie cette option de façon rationnelle et logique. Cela va même dans le sens contraire des meilleures pratiques et de ce qui se fait ailleurs dans le monde!», a tempêté le magistrat qui a rappelé l’importance de la SODEC lors de la fermeture de la raffinerie Shell. Selon lui, le gouvernement de Québec sous-estime le rôle de l’organisme dans l’économie locale.

De son côté, le député Marc Tanguay a ajouté sa voie à celle de sa collègue Nicole Léger de Pointe-aux-Trembles, qui s’était prononcée la semaine dernière.

«Il s’agit de changements majeurs qui soulèvent des préoccupations, admet le député de Lafontaine. Ce qui est essentiel c’est la mission de développement économique. Je demeurerai vigilant afin que le soutien, notamment aux entreprises, demeure adéquat.»

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Montréal restructurera son développement économique

Montréal conservera son réseau de Corporations de développement économique communautaire (CDEC) et de Centres locaux de développement (CLD) selon ce qu’a affirmé le maire Denis Coderre, lors du dévoilement du nouveau pacte fiscal du Québec, la semaine dernière.

Le 5 novembre, le premier ministre Philippe Couillard a dévoilé son pacte fiscal transitoire pour l’année 2015. Celui-ci prévoit une plus grande autonomie des villes, leur donnant l’option d’abolir les CDEC et les CLD ou de leur déléguer le développement économique.

En conférence de presse, M. Coderre a assuré avoir opté pour ce deuxième choix, précisant toutefois que le réseau des 10 CDEC et des 18 CLD de la métropole serait restructuré.

Forte opposition
Il faut dire que les rumeurs d’abolition avaient incité les organismes de développement économique à mobiliser les milieux politique et économique à leur cause. À Montréal, au moins 600 entrepreneurs ont fait parvenir une lettre au maire Coderre pour défendre la raison d’être des CDEC.

«La grogne qui s’est fait entendre dans l’ensemble du Québec au cours de la dernière semaine semble avoir porté ses fruits. On ne connaît pas encore les conséquences exactes de ce nouveau modèle de gouvernance, mais au moins, la précieuse expertise qui prévaut au sein des CLD et surtout, l’implication de milliers de bénévoles et partenaires dédiés au développement économique de leurs régions ne sera pas complètement perdue», a souligné Yves Maurais, président de l’Association des CLD du Québec (ACLDQ).

Malgré la prise de position du maire de Montréal, l’avenir des CDEC et des CLD reste indéterminé. Les présidents des CDEC montréalaises ont d’ailleurs demandé une rencontre avec M. Coderre à ce sujet.

Coupes importantes
Le nouveau pacte fiscal de 3 milliards de dollars ne prévoit pas seulement des modifications structurelles, mais également des coupes importantes dans le financement des municipalités.

«Le retour à l’équilibre budgétaire dès 2015-2016 n’est pas une obsession, a affirmé le ministre des Affaires municipales, Pierre Moreau. C’est une obligation. Les représentants municipaux en sont aussi conscients et c’est pourquoi, par leur ouverture, ils s’associent à l’effort collectif de redressement des finances publiques.»

La nouvelle mesure privera d’ailleurs la Ville de Montréal de 75M$.

«Il n’y aura ni augmentation de taxes, ni coupe de services, a assuré le maire Coderre. Nous anticipions d’une certaine façon qu’il y aurait des choses qui pourraient arriver.»

Les enveloppes budgétaires dédiées à la réfection des infrastructures et aux réseaux de transport en commun seront toutefois maintenues alors que celle de la voirie sera bonifiée de 50M$ pour l’ensemble du Québec.

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