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Le combat des locataires dans le Plateau

Les locataires du Plateau-Mont-Royal ont la vie de plus en plus dure depuis plusieurs années. Avec une hausse constante des loyers et la menace persistante des conversions de certains logements en condos, les travailleurs à plus faible revenu sont nombreux à être chassés de ce quartier devenu huppé. Par où commencer pour freiner ce phénomène de gentrification?

Depuis cinq ans, près de 600 logements locatifs sont convertis en condos annuellement, seulement dans cet arrondissement. Des résultats qui inquiètent le Comité du logement du Plateau-Mont-Royal, qui a déposé mardi un document d’analyse sur le phénomène de gentrification. «C’est le phénomène social qui veut que les habitants traditionnels d’un quartier soient chassés pour être remplacés par une population plus aisée financièrement», explique Paule Lespérance, du Comité du logement.

Selon l’organisme, en plus des nombreuses conversions de logements en condos, il se construit presque exclusivement des condos depuis 2002 dans le Plateau-Mont-Royal. Ce qui fait que le taux de locataires tend à baisser constamment. Lors du recensement de 2001, il était de 78 %. Aujourd’hui, il se chiffrerait autour de 74 %.

Cette prolifération de condos a pour effet d’augmenter encore plus les loyers des logements locatifs environnants. Ce qui fait que, quand un logement est converti en condo, le locataire n’a souvent pas les moyens de rester dans le quartier.

Pour tenter de freiner ce phénomène, le Comité du logement du Plateau demande à l’arrondissement de se doter d’une réserve foncière, afin que certains terrains soient destinés exclusivement aux logements sociaux. «Cela permettrait de reloger des personnes qui habitent dans des logements qui ont été convertis», précise Mme Lespérance.

Pas facile cependant d’acquérir des terrains, souligne le maire de l’arrondissement, Luc Ferrandez, puisque tout le monde se les arrache. Il ne reste plus beaucoup de terrains vacants.

La Ville a présentement trois projets de terrains vacants qui devraient générer environ 300 logements sociaux. «Et quand un propriétaire nous demande une dérogation à un projet majeur, on exige toujours du logement social», ajoute-t-il.

M. Ferrandez renvoie plutôt la balle au gouvernement du Québec, qui devrait resserrer les règles de la Régie du logement.

Le Comité du logement du Plateau demande d’ailleurs au gouvernement de revoir le moratoire sur la conversion des logements en condos, qui est actuellement contourné «à grande échelle». «On demande qu’il y ait un encadrement législatif efficace pour contrôler la conversion, parce qu’en ce moment, ça se fait de manière complètement sauvage, ajoute Mme Lespérance. Les promoteurs immobiliers contournent la loi et il n’y a aucun encadrement.»

L’organisme réclame également qu’un contrôle universel et obligatoire soit mis en place pour stopper l’augmentation fulgurante du prix des loyers à travers la province.

Au ministère des Affaires municipales, Régions et Occupation du territoire, on évalue les pistes de solution, mais aucune mesure concrète n’est encore envisagée. «Le ministre [Sylvain Gaudreau] est sensibilisé à la situation, mais nous en sommes à évaluer la situation et les diverses solutions, pour le moment, a affirmé l’attachée de presse du ministre, Marie-Ève Imonti, à Métro. Nous ne pouvons pas nous prononcer tout de suite.»


Contourner la loi

En théorie, il est interdit de convertir un immeuble à logements en condos, au Québec. Mais les promoteurs immobiliers et les propriétaires ont trouvé plusieurs moyens efficaces pour contourner la loi. Ils proposent des indemnités aux locataires pour les convaincre de partir, ce qui fonctionne très souvent. «On recommande toujours de ne pas accepter ces indemnités, affirme le maire de l’arrondissement, Luc Ferrandez. Parce que même si vous vous en tirez avec un dédommagement de 10 000 $, le logement va disparaître à tout jamais du marché.»

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