Montréal

Déversement dans le fleuve: «Une tempête dans un verre d’eau» selon les experts de Polytechnique

Sewer drains

Le déversement d’eaux usées dans le fleuve Saint-Laurent est inévitable et nécessaire pour réparer les infrastructures, selon cinq experts de Polytechnique Montréal. Les professeurs veulent rectifier le tir sur «une controverse qui ne devrait pas avoir lieu».

«Nous n’avons pas le choix de faire cet entretien. Si on refuse de déverser, c’est comme si vous me disiez que ça vous gêne de bloquer la circulation sur le pont Champlain, donc on ne fait pas l’entretien jusqu’à ce qu’il tombe», illustre Raymond Desjardins, professeur titulaire, fondateur et premier directeur du Centre de recherche, développement et validation des technologies et procédés de traitement des eaux. «C’est une tempête dans un verre d’eau et elle ne devrait pas avoir lieu», tranche Raymond Desjardins, contacté par TC Media.

Dans un document de sept pages transmis aux médias mardi, les chercheurs ont voulu faire une sortie apolitique afin de déconstruire de «faux arguments». Ils y abordent notamment les conséquences importantes de ne pas procéder à cette réparation et à ce déversement, la fréquence élevée de déversements au Québec, l’absence d’alternative réaliste et l’impact minime sur les prises d’eau potable et l’environnement.

Les professeurs de Polytechnique démentent la croyance selon laquelle le rejet des eaux augmenterait la concentration d’ammoniaque, de produits pharmaceutiques et d’hormones dans le fleuve, puisque la station d’épuration Jean-R.-Marcotte n’est pas dotée d’un procédé de désinfection. Les contaminants microbiens, comme les coliformes fécaux présents dans les selles, augmenteront, mais un traitement à l’ozone désinfectera significativement le point de rejet des eaux plus tard.

Trois déversements majeurs ont déjà été autorisés à Montréal en 2003 et 2005. La Ville de Montréal affirme qu’il n’existe pas d’autre solution, ce que soutiennent aussi les professeurs de Polytechnique. En raison du débit gigantesque d’eau, il serait impossible de stocker ces eaux usées durant les travaux. Une station temporaire coûterait des dizaines de millions de dollars pour un déversement d’une semaine seulement.

Une récupération politique

La Ville de Montréal a annoncé son intention de déplacer une chute à neige reliée à un gros égout, appelé intercepteur, qu’elle doit assécher et réparer. Huit milliards de litres d’eaux usées doivent donc être déversés dans le fleuve Saint-Laurent entre le 18 et le 25 octobre, soit quatre fois le volume du Stade olympique. Un différend entre Montréal et Ottawa bloque toutefois l’opération. Le maire de Montréal Denis Coderre accuse le fédéral de faire de la politique sur ce dossier.

Malgré l’intervention d’Ottawa, qui demande à la ville de suspendre le déversement, et les propos controversés de la militante pro-environnement Erin Brockovich, les chercheurs de Polytechnique affirment qu’en combinant ces deux travaux, la Ville de Montréal pourra minimiser la durée et le nombre de rejets d’eaux usées. «Des déversements, ça arrive régulièrement et c’est prévu dans la réglementation. Si ça bloque, c’est parce qu’on est en période électorale et que les gens se sont énervés. Le dossier de la Ville de Montréal a correctement suivi la procédure», affirme Raymond Desjardins.

La Ville de Montréal s’est déjà engagée à nettoyer les berges du Saint-Laurent, une mesure obligatoire pour obtenir l’autorisation de Québec. Les arrondissements de LaSalle, Verdun, Sud-Ouest, Ville-Marie, Mercier-Hochelaga-Maisonneuve et Rivières-des-Prairies-Pointe-aux-Trembles seront touchés par le déversement.

Les auteurs du document sur le déversement des eaux usées sont les professeurs Benoît Barbeau, Yves Comeau, Raymond Desjardins, Sarah Dorner et Michèle Prévost, de Polytechnique Montréal.

Articles récents du même sujet

Exit mobile version