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#moiaussi ou les limites du droit criminel

La campagne spontanée du #moiaussi a de quoi faire réfléchir. Oui, on savait que de tels cas existaient, surtout depuis les campagnes précédentes. Sauf que celle-ci, et probablement du fait de son ampleur, amène un éclairage troublant.

Sais pas pour vous, mais mon fil Facebook, inondé, oblige à en arriver à la conclusion suivante: autant de femmes, autant de cas de figure. Je dis femmes, évidemment, mais certains hommes ont aussi dénoncé diverses situations. J’ai lu, avec attention, chaque témoignage public. Ayoye. Et ceux (et celles) qui avaient encore quelques doutes sur ce qu’on appelle la culture du viol (remarquez l’absence de guillemets) peuvent aller se rhabiller. Parce qu’une culture s’évalue, en bonne partie, par la répétition d’un comportement X ou Y. La preuve est dans le pudding, mettons.

Cela étant dit, que faire pour enrayer le phénomène? Casser, dans un premier temps, les réflexes comportementaux afférents au phénomène en question. Et comment faire? Je laisse ça aux spécialistes, se prononcer ces jours-ci à titre d’homme blanc hétéro n’étant ni crédible ni souhaitable, 
apparemment. Ça me va.

Deuxièmement, le droit. Parce que celui-ci, qu’on le souhaite ou non, se veut (au moins) un peu à l’origine de la mouvance actuelle. Les chiffres de Statistique Canada parlent, à cet égard, d’eux-mêmes. Quelques exemples probants: 
combien d’agressions, selon vous, se transposent en condamnations? Trois sur…1000. Combien d’agressions dénoncées à la police? Cinq sur… 100. Quel pourcentage des procédures abandonnées en cours de route? 40%. Et de celles qui se rendent en bout de piste, quel pourcentage d’acquittements? 52%. C’est ça.

Il est loisible, bien entendu, de conclure que divers degrés d’agressions puissent exister, certaines étant, par la force des choses, plus importantes que d’autres. Mais les faits, troublants, obligent à faire le constat suivant: le système pénal canadien souffre de sérieux troubles d’adaptation en matière d’agressions sexuelles.

Pas surprenant, quand on y pense. Peut-on vraiment traiter de la même façon un vol de voiture qu’un viol, par exemple? Bien sûr que non. C’est pourtant ce que propose, sauf rares nuances, le processus judiciaire. Ainsi, dans les deux cas, faudra faire la preuve hors de tout doute raisonnable de la culpabilité de l’accusé. Un des préceptes fondamentaux de nos régimes de droit criminel, rappelons-le. Le problème? Beaucoup plus aisé de faire cette preuve hors de tout doute raisonnable dans un cas de vol de voiture que de viol, lequel repose, par définition sur l’absence de consentement. Or, bien qu’il soit vrai que la défense de croyance de consentement sincère est à la charge de ce même accusé, reste néanmoins qu’on nage, ici, dans une certaine mare de subjectivité. Drôlement plus, du moins, que dans le cas du vol de char précité.

L’autre problème? Les témoins. Assez rare que des tiers assistent au viol en question. Peu fréquent, aussi, que la preuve se ramasse sur une vidéo, par exemple. Le contraire du vol de char, donc. Conséquence? On en revient au classique «la parole de l’un contre celle de l’autre». Conséquence de la conséquence? Un nombre infime de victimes souhaitent s’empêtrer dans un processus qui, selon les statistiques disponibles, a de quoi décourager les plus opiniâtres. Solutions sur le plan juridico-judiciaire? Des idées, mais pas simple. On s’en rejase. Bientôt. Parce qu’il le faut.

@F_Berard

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