Plusieurs groupes environnementaux ont dénoncé mercredi les agissements de certaines municipalités, dont Laval, Québec, Lévis et la municipalité régionale de comté (MRC) de Bellechasse, qui s’activeraient à saper les acquis environnementaux de la province.
Mercredi, la Fondation David Suzuki, Nature Québec, Vivre en Ville et Équiterre se sont joints à l’Union des producteurs agricoles (UPA) du Québec pour tirer la sonnette d’alarme. «[On dénonce] le double discours de certaines municipalités qui se déclarent en faveur de la lutte aux changements climatiques et du développement durable, tout en demandant plus d’autoroutes et plus d’autonomie pour pouvoir construire plus facilement sur des terres agricoles ou des milieux humides», a déclaré Karel Mayrand, le directeur général de la Fondation David Suzuki.
Ce qui a déclenché cette sortie, c’est notamment le «lobbying d’arrière-garde» de quelque 300 municipalités qui ont adopté chacune une résolution demandant une mise à jour de la Loi sur le territoire agricole du Québec pour obtenir plus de pouvoirs. Cette législation limite le droit des municipalités à autoriser la construction sur des terres agricoles ou des milieux humides.
Parmi les villes ciblées, les environnementalistes ont pointé du doigt la Fédération québécoise des municipalités et la MRC de Bellechasse, à l’origine d’un mouvement de remise en question de la Loi sur la protection du territoire agricole, mais aussi par exemple Mirabel, qui veut construire en milieu agricole, Lévis, qui exige un troisième lien autoroutier, de Laval qui a remis en cause la pertinence de la Communauté métropolitaine de Montréal (CMM), qui a été très active pour limiter l’étalement urbain.
«À Laval, la moitié des terres agricoles n’appartient plus à des agriculteurs, mais à des sociétés à numéros qui font pression pour les faire dézoner et les développer. Et on peut trouver ça ailleurs au Québec», a mentionné M. Mayrand. À Québec, par exemple, la Ville a ciblé 200 hectares de terres appartenant aux Sœurs de la Charité pour faire du développement résidentiel.
«En 12 ans, on n’a jamais vu de revendications aussi structurées des maires pour amoindrir le territoire agricole ou pour obtenir plus d’autoroutes», a renchéri Christian Savard, le directeur général de Vivre en ville. «On est plus dans l’anecdote là, on est dans une offensive pratiquement tous azimuts qui est très inquiétante et il fallait le dire», a-t-il ajouté, en précisant qu’il était prêt à en payer le prix auprès de ses partenaires municipaux.
Christian Simard, de Nature Québec, craint de son côté que le mécanisme de compensation actuellement étudié par le gouvernement du Québec aille à l’encontre de l’esprit de la loi qui, elle, vise à ne plus perdre de milieu humide. «On modulerait les compensations à la baisse de façon tellement forte que ça deviendrait de facto un permis de construire», a-t-il ajouté.
Directement ciblée, la FQM a réagi rapidement par voie de communiqué. « L’autonomie des municipalités et des MRC n’entre pas en contradiction avec la protection de l’environnement et du territoire agricole», a rétorqué son président Jacques Demers. Il mentionne notamment les Plans de développement de la zone agricole (PDZA), qui visent à conjuguer agriculture et développement, et affirme que ces municipalités sont aussi mues par la volonté de protéger leur développement et leur eau potable face aux projets miniers et gaziers qui ont actuellement préséance.
Laval souligne avoir adopté son PDZA et mis sur pied une table de concertation qui vise notamment à augmenter les surfaces cultivées et à protéger les 7000 hectares de sa zone agricole permanente dont le périmètre n’a pas été modifié depuis 1988 et la signature d’une entente avec l’Union des producteurs agricoles de Laval. Seules les zones agricoles comprises à l’intérieur du périmètre urbain peuvent faire l’objet de projets autres qu’agricoles, mentionne la Ville de Laval. la Ville de Québec n’a pas voulu commenter.