Tous des oiseaux
Derrière chaque grande tragédie mondiale se cachent d’infinis drames personnels. Le dramaturge Wajdi Mouawad en fait de nouveau la démonstration dans cette grandiose fresque théâtrale ayant comme point de départ la relation entre deux jeunes amoureux : Eitan, Allemand d’origine juive, et Wahida, Américaine de descendance arabe. Avec l’interminable conflit israélo-palestinien en trame de fond, leurs destins seront ébranlés, tout comme l’ont tour à tour été ceux du père et du grand-père d’Eitan, le premier ayant été chaviré par l’Holocauste, le deuxième marqué par la guerre des Six-Jours. Le récit riche et complexe, habilement mis en scène et superbement joué, aborde au passage les concepts d’identité, de vérité, d’amour et de hasard. En près de quatre heures et en autant de langues – anglais, hébreu, arabe et allemand –, jamais la pièce ne s’essouffle, bien que la lecture de sous-titres finisse par être un peu étourdissante. Une touche d’humour plus que bienvenue équilibre admirablement ce bouleversant drame contemporain. Marie-Lise Rousseau
L’étrange pays
Les retranchées
Six ans après le court essai Les tranchées, Fanny Britt reprend où elle avait laissé sa réflexion sur la maternité et la vie familiale. Parce que la société a évolué depuis 2013, elle y traite notamment des modèles de famille néo-libérales qui pullulent sur les réseaux sociaux, de la figure paternelle, des proud cis boys et de privilèges. La table des matières «en forme de pain» donne le ton à cet ouvrage atypique : comme dans son précédent essai, le raisonnement de l’auteure emprunte plusieurs directions et diverses formes, comme le dialogue et l’écriture théâtrale. Et comme la maternité reste un choix, un touchant chapitre (tristement d’actualité) est consacré à l’avortement. Aux éditions Atelier 10. Marie-Lise Rousseau
Jailbirds
Father of the bride
Le dernier album du groupe new-yorkais Vampire Weekend est parfait pour le retour des beaux jours. Une musique pop légère et douce, mais très recherchée. On est aussi bien content de retrouver la voix si particulière d’Ezra Koening après six ans d’absence. Mention spéciale à This Life, dont la magnifique vidéo en noir et blanc est sortie cette semaine, et Big Blue, des titres au rythme rafraîchis-sant, même s’il faut dire que l’ensemble de l’album est très bon. Amélie Revert
I Am Easy to Find
Pour durer, les groupes de musique doivent savoir se réinventer sans perdre leurs racines. À chaque nouvel album, The National réussit cet exploit, et c’est tout particulièrement le cas avec cette huitième offrande. Dès les premières notes, on reconnaît la batterie nerveuse et effrénée de Bryan Devendorf, son emblématique du quintette post-punk qui bat la mesure tout au long des généreuses 60 minutes de I Am Easy to Find. Le vent de fraîcheur vient de nouveaux collaborateurs, ou plutôt de collaboratrices; plusieurs chanteuses de talent (dont Gail Ann Dorsey, Pauline de Lassus et Mélissa Daveaux) combinent magnifiquement leurs voix à celle de Matt Berninger. Les arrangements de cordes signés Aaron Dessner, sous la supervision du réalisateur Mike Mills, sont toujours aussi sublimes. Le tout, mature et abouti, est d’une grande beauté. Marie-Lise Rousseau
La saison 3 de Easy
Les séries d’anthologie ont moins la cote à l’ère du visionnement boulimique sur le web, mais Easy est la lueur qui refuse de s’éteindre. La création de Joe Swanberg a entamé sa troisième saison, et celle-ci est encore plus intime et touchante que les précédentes, avec sa vision moderne et affûtée des relations amoureuses, amicales et familiales. On la visionne pour retrouver quelques personnages, mais surtout pour revoir notre rapport à l’autre et nous aider à trouver notre place parmi les autres. Le dernier épisode, tout particulièrement, vous arrachera quelques soupirs doux-amers. Sur Netflix. Stéphane Morneau
Et on se désole pour… le décès de Jean Beaudin