Culture

Cai Glover, en harmonie avec le silence

Cai Glover foulera dès demain avec la troupe Cas Public les planches du Royal Opera House, à Londres. Si danser dans ce lieu mythique est un accomplissement pour la compagnie montréalaise, il l’est encore plus pour le danseur, qui est atteint de surdité.

Depuis deux mois, à raison de cinq à sept heures par jour, les huit danseurs de Cas Public répètent et peaufinent Symphonie dramatique, une version contemporaine de Roméo et Juliette qu’ils donneront six fois en représentation au Royal Opera House, à Londres. «Je ne me suis jamais autant entraîné», confie Cai Glover à Métro quelques jours avant son départ. «Je sais que, lorsqu’on sera sur scène, le stress sera présent. Mais pour le moment, c’est une bonne source de motivation», poursuit le danseur bilingue de 29 ans.

S’il est normal que la pression soit grande pour n’importe quel danseur qui s’apprête à virevolter dans ce panthéon de la danse, elle l’est d’autant plus pour Cai Glover que ce dernier est handicapé. Atteint de surdité à la suite d’une méningite contractée à l’âge de huit ans, Cai Glover découvre sa passion pour la danse à 10 ans lorsque sa sœur l’incite à participer à Casse-Noisette. «J’ai réalisé que, sur scène, je pouvais influencer les gens à travers le mouvement», raconte le Montréalais originaire de Prince-George, en Colombie-Britannique.

Si son handicap ne l’a pas empêché de poursuivre son rêve, son parcours n’a pas été des plus simples dans un domaine où la compétition est féroce et où l’acharnement physique et mental est le lot quotidien des danseurs. «C’était effrayant! J’étais jeune, je ne savais pas comment gérer ma surdité. Je n’en parlais pas et je restais en retrait, raconte celui qui est danseur professionnel depuis l’âge de 18 ans. Je suis ainsi passé à côté d’opportunités professionnelles.»

Assumer sa différence
C’est lorsqu’il arrive à Mont­réal, en 2012, qu’il aborde ouvertement sa surdité. Et c’est le début d’une nouvelle danse. Une danse plus libre. «Quand ses appareils lâchent à cause de la sueur, il n’entend plus rien. Et une sorte de liberté se dégage de sa danse, explique Hélène Blackburn, fondatrice, chorégraphe et directrice artistique de Cas Public. Parce qu’il n’est pas dépendant de la musique, il a une grande sensibilité et il a appris à se fier à ses autres sens.»

Même si sa directrice préfère lorsqu’il s’abandonne et danse dans le silence, Cai Glover a reçu il y a 10 mois de nouveaux implants cochléaires de la Fondation des sourds du Québec. «Mes anciens appareils lâchaient une fois par semaine. Je dansais très souvent sans rien entendre», raconte-t-il.

Malgré ces implants à la fine pointe de la technologie, il n’entend pas parfaitement. Mais il a su développer sa technique pour être en symbiose avec les autres danseurs. «Je prends des notes visuelles. Je regarde où est mis l’accent dans le mouvement et je crée le rythme dans ma tête», détaille Cai Glover.

Dès mercredi, la troupe de Cas Public partagera l’affiche avec le Royal Ballet, qui présentera pour sa part la version mythique de Roméo et Juliette.

La persévérance de Cai Glover et son amour pour la danse font un pied de nez à la fatalité!

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