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Sainte-Lucie : l’île aux Nobel

Avec comme postulat que tout État est le premier, le dernier, le meilleur, le pire ou l’unique dans un domaine particulier, Secrets d’États part chaque semaine à la découverte d’un pays méconnu. Premier arrêt : Sainte-Lucie.

Les Nobel, ce sont les coupes Stanley de l’humanité, et une pléiade de facteurs doivent être réunis pour penser peut-être pouvoir palper le prestigieux prix. Par exemple, éviter les allitérations faciles dans un billet de blogue, fréquenter les grandes écoles, être génétiquement bien foutu, se bourrer le crâne d’oméga-3 ou encore se tenir loin des romans de Marc Lévy.

Mais un des a priori à l’obtention du noble Nobel, pourtant fort documenté, passe sous le radar : être né à Sainte-Lucie, état insulaire des Antilles peuplé de quelque 175 000 cerveaux.

Sainte-Lucie, avec deux suédoises distinctions, se mérite le Nobel de l’État du monde le plus nobélisé par habitant. Elle peut revendiquer pas moins de 0,00001143 titre par boîte crânienne. La Suisse, qui se targue souvent d’être le premier producteur mondial de matière grise, ne détient que 0,00000251 récompense par cervelle, soit 4,6 fois moins que son concurrent antillais.

En comparaison, pour rivaliser avec le ratio de Sainte-Lucie, le Canada devra obtenir rapidement 343 distinctions – il en détient une vingtaine –, l’Inde, 11 430, et les États-Unis, plus de 3 000. C’est très loin de l’actuel bilan américain, quoiqu’impressionnant, de 330 Nobel (petite parenthèse pour souligner que ce nombre inclut ceux de la paix décernés au commandant en chef des forces armées américaines, Barack Obama, en pleines deux guerres, au «plus belliqueux des citoyens américains» selon le New York Times, Théodore Roosevelt, et au grand commanditaire de dictatures, Henry Kissinger, mais ça, c’est une autre histoire).

Bref, il faudrait que l’Académie royale décore encore bien des va-t-en-guerre pour empêcher les Saint-Luciens de dormir en paix.

Le premier Nobel saint-lucien a été remis en 1979 à l’économiste Arthus Lewis, grand penseur du tiers-monde et de l’économie du développement. Le second s’est posé en 1992 dans la main de l’écrivain et poète Derek Walcott, connu pour son Iliade caribéen Omeros.

Le pourquoi de tant de génie? Les Caraïbes à gauche et l’Atlantique Nord à droite pour un peu d’inspiration fantasque? Un héritage culturel et linguistique hétéroclite mêlant le français, le créole et l’anglais? Pur hasard géographique? Nul ne le sait. Mais pour les pauvres non Saint-Luciens que nous sommes, comme 99,9975 % de la population mondiale, il faudra miser sur les grandes écoles et les oméga-3.

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