Au G7, le président américain reste un homme d’affaires qui parle commerce quand le Français, avec son action surprise sur l’Iran et son appel en faveur de l’Amazonie, se consacre surtout à la diplomatie. L’art du «coup» diplomatique d’Emmanuel Macron contre «l’art du deal» de Donald Trump?
Avec Donald Trump qu’il a invité à déjeuner au débotté juste avant l’ouverture du sommet à Biarritz, comme avec le Russe Vladimir Poutine, invité à Brégançon mi-août ou avec le Chinois Xi Jinping qu’il reverra en novembre, Emmanuel Macron croit d’abord aux relations individuelles.
Il se fie à «l’utilité de soigner le lien personnel avec chaque leader», explique l’un de ses conseillers.
Il veut aussi, dans tous les conflits, «parler à tous», si possible jouer les médiateurs, en replaçant la France au centre du jeu. Jusqu’à réduire la fracture avec la Russie et reprendre un peu de champ vis-à-vis des États-Unis.
«La France n’est pas un pays aligné», glisse-t-il. Conscient de l’effacement progressif de la domination de l’Occident, divisé et confronté aux nouvelles puissances, il a voulu refaire du G7 un club de discussion informel entre grands de ce monde.
Exit le communiqué final au vocabulaire souvent abscons, qu’il qualifie de «discussions entre bureaucrates que les leaders ne lisent même pas».
Surtout que ce dont on se souvient du précédent sommet des Sept, au Canada, c’est que Donald Trump a refusé de signer un tel texte.
En revanche, Emmanuel Macron tente d’y faire avancer des sujets précis, notamment le règlement des crises internationales.
Sur l’Amazonie par exemple, à la veille de la réunion de Biarritz, face à la catastrophe des incendies, il annonce que ce sujet doit devenir une priorité du sommet, mais aussi que la France bloquera l’accord de libre-échange UE-Mercosur, pour protester contre l’attitude du Brésil (sans en avoir prévenu ses alliés espagnol et allemand, qui protestent).
L’économie, l’économie, l’économie! Fidèle à son passé d’homme d’affaires et à son approche bilatérale des relations internationales, Donald Trump est en revanche principalement présent pour parler de dossiers commerciaux. Accord avec le Japon, négociations avec le Royaume-Uni, commentaires incendiaires dans la guerre commerciale États-Unis-Chine. S’il parle beaucoup de «grands accords commerciaux», en revanche, peu de commentaires sur l’Amazonie, le climat, l’Iran.
Selon le New York Times, plusieurs responsables américains ont d’ailleurs estimé que les Français mettaient l’accent sur «des problèmes de niche», à destination de la population française, comme le changement climatique et l’égalité hommes-femmes, reléguant le ralentissement économique mondial au second plan.
«La France veut que le G7 reste silencieux sur ces sujets économiques cruciaux», a commenté le principal conseiller économique de M. Trump. «Le commerce et l’économie mondiale ont reçu peu d’attention», a-t-il accusé.
Ces différences d’approche et de caractère des deux hommes ne sont d’ailleurs pas sans risque pour le président français. Après un dîner à sept samedi soir, le Français là encore annonce une avancée majeure: il obtient l’accord de ses alliés, dont Donald Trump, pour qu’il transmette un message commun à l’Iran, disent des sources diplomatiques concordantes.
ll parle même à la télévision d’une «communication commune vis-à-vis de l’Iran». Forcing ou excès de confiance? Une heure après ses déclarations, Donald Trump dément publiquement avoir discuté d’un message commun à l’Iran.
Soucieux de ne pas heurter «la première puissance mondiale», Emmanuel Macron baisse d’un ton en ne parlant plus que d’objectifs communs et souligne ne pas avoir de «mandat officiel» pour négocier avec Téhéran.
Ce qui ne l’empêche pas de réserver sur ce dossier un nouveau coup de théâtre, avec l’arrivée dimanche après-midi à Biarritz du chef de la diplomatie iranienne, Mohammad Javad Zarif, avalisée par Donald Trump.
«C’est le signe que le président Macron est en train de chercher de manière très énergique une sorte d’accord entre les États-Unis et l’Iran» analyse pour l’AFP, Robert Malley, de l’International Crisis Group (ICG). Pour le chef de l’État français, «il n’y a pas de grand risque. Qu’a-t-il à perdre? S’il réussit, c’est une victoire énorme. Dans le cas contraire, personne ne lui en voudra», note-t-il.
Iraniens comme Français ont à cet égard adopté un ton positif à l’issue du déplacement surprise de M. Zarif. Reste le risque pour Emmanuel Macron de passer pour un gesticulateur dont les initiatives séduisantes n’aboutissent pas. Sur l’Amazonie par exemple, dimanche soir, le G7 n’avait pas encore pris les mesures d’urgence promises par le président français, un dossier test à la fois pour l’efficacité du G7 et pour la méthode Macron.