Le scandale de VatiLeaks, une fuite de documents confidentiels causée par l’ancien majordome du pape Benoît XVI, «a laissé le pontife isolé et pourrait être un facteur de sa renonciation», croit Elena Curti, rédactrice en chef adjointe de l’hebdomadaire catholique The Tablet. L’observatrice du Vatican a répondu aux questions de Métro.
Est-ce que la renonciation du pape Benoît XVI a ébranlé les catholiques?
Le moment qui a été choisi a été une surprise. Même si Benoît XVI a indiqué par le passé qu’il était susceptible de se retirer s’il se sentait incapable de poursuivre son pontificat, le monde catholique a été consterné par cette nouvelle.
Avec les années, le pape est devenu plus faible, tant physiquement que mentalement. Mais le scandale de VatiLeaks, pourrait être en partie responsable de sa renonciation. Ce scandale est survenu quand Paolo Gabriele, l’ancien majordome du pape, a volé des milliers de documents du Vatican, certains évoquant de la corruption au sein de l’Église. Apprendre qu’un de ses plus proches assistants l’avait trahi a pu rendre le pape très isolé et impuissant. Benoît XVI a alors probablement senti que sa capacité à gouverner s’amenuisait.
Qui peut le remplacer?
Bien du monde! Mais dans des circonstances normales, c’est-à-dire quand un pape meurt, l’Église a plus de temps pour réfléchir, pour organiser le conclave papal et pour entamer les débats en vue de désigner un successeur. Dans la situation actuelle, il y a moins de temps pour faire tout cela. Il est très difficile de dire qui sera le prochain souverain pontife. Après la renonciation officielle du pape, le 28 février, Angelo Sodano, le doyen du collège des cardinaux, sera chargé d’organiser l’élection du prochain pontife.
Pensez-vous que Benoît XVI est conscient de l’effet qu’aura sa décision?
Je crois que son geste est très caractéristique de sa personnalité. Il a toujours été courageux dans ses prises de décision. Il a ramené la vieille messe latine et a mis en place l’Ordinariat, une structure de l’Église catholique destinée à accueillir les groupes d’anglicans anglais et gallois.
L’Église sera confrontée à de nombreux défis dans un avenir proche, à cause d’un certain nombre de scandales sexuels et du grand taux d’abandon des prêtres. Quelle direction prendra-t-elle?
L’Église peut œuvrer à l’instauration d’une plus petite, mais d’une plus pure église, ou elle peut continuer sa politique d’évangélisation et répandre l’Évangile. Je crois que le nouveau pape fera les deux. On parle beaucoup d’une diminution du nombre de pratiquants en Occident, mais dans le reste du monde, particulièrement en Afrique, on assiste à une progression très rapide du catholicisme. Cela pourrait donner lieu à l’avènement d’une Église moins euro-centrée.
Croyez-vous que Benoît XVI aura simplement été un «pape de transition», après les 26 années de pontificat de Jean-Paul II?
Il y a un peu de cela, c’est certain : il a été élu pape à l’âge de 78 ans. Il était le plus vieux pape à être élu depuis près de 300 ans, il n’avait donc pas beaucoup de temps pour agir. Il est vrai qu’il n’était pas un bon administrateur, et il a échoué à prendre les rênes de la curie, l’administration centrale de l’Église. Néanmoins, il n’a jamais eu peur de prendre une décision audacieuse.
