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À la rescousse des bonobos

Les grands singes bonobos, plus proches de l’Homme qu’aucune autre espèce animale, se meurent, alors que quelques milliers d’entre eux s’accrochent encore à leur dernier refuge sur Terre, dans les confins de la forêt de la République démocratique du Congo. Des humains comme ceux investis dans l’organisation Bonobo Conservation Initiative (BCI) vouent leur vie à défendre celle de ces singes si proches de notre humanité. Le dernier livre du reporter Deni Béchard raconte ce combat d’une «ahurissante beauté» par lequel l’être humain devient plus grand que la nature qu’il défend. Métro a parlé de Bonobos et des hommes avec l’auteur.

Au service d’une cause
«Les gens ne peuvent pas protéger la nature s’ils crèvent de faim», affirme un conservationniste congolais dans le livre. Acculées à la misère, plusieurs communautés dépendent de la viande de brousse pour subvenir à leurs besoins, même si celle-ci est vectrice de maladies graves – dont l’Ebola.

BCI a compris que la pauvreté des hommes menaçait les grands singes autant, sinon plus, que les hommes eux-mêmes; c’est pourquoi l’organisation s’efforce de soutenir financièrement les communautés qui s’engagent dans la voie de la conservation, notamment en formant une main-d’œuvre locale.

«Je désirais mettre ma plume au service d’une cause, explique Deni Béchard à Métro, mais pas d’une cause perdue. L’approche de BCI avait quelque chose à offrir au monde; elle apportait des solutions durables au saccage actuel de la nature, tout en améliorant le sort des démunis.»

«Côté âme, côté essence de l’être, nous sommes peut-être moins honnêtes que les grands singes… Nous croyons être différents, mais nous ne le sommes pas…» – Deni Béchard

Des promesses
«Certaines ONG sont très impérialistes», dénoncent M. Béchard dans son ouvrage. Selon lui, trop d’organisations débarquent en déballant une ribambelle de promesses aux populations locales, sans se soucier de les tenir. «Soit elles repartent soudainement, soit elles remplacent brusquement leur personnel. Or, les Congolais croient en des relations qui durent toute une vie, tandis que certains employés d’ONG partent en mission un an ou deux pour gagner leur galon, à l’instar des militaires qui partent à la guerre en espérant obtenir un avancement. Dans ce cas-là, les Congolais savent que les étrangers viennent d’abord pour eux-mêmes», précise M. Béchard. Ces ONG, souvent porteuses d’une lourde administration, sont celles qui jouissent de la plus grande visibilité et qui accaparent la majorité des donations, indique également l’auteur.

Une frontière brouillée
Des bonobos et des hommes fait connaître l’histoire de Kanzi, un bonobo ayant appris, lorsqu’il était enfant, les leçons que la primatologue Sue Savage-Rimbaugh tentait d’inculquer à sa mère. Il est aujourd’hui capable de plus de 3000 expressions anglaises, de faire du feu, de cuisiner et de saisir des idées abstraites. Oprah Winfrey a reçu Kanzi à son émission, alors que Paul McCartney et Peter Gabriel ont joué de la musique avec lui. En se rapprochant ainsi de la culture humaine, Kanzi a brouillé la frontière autrefois étanche qui délimitait l’humanité et le monde animal. «L’être humain sublime ses pulsions animales grâce aux narrations qu’il construit, croit Deni Béchard. Mais les besoins sur lesquels se fondent la mythologie humaine sont les mêmes que ceux des grands singes: nous voulons le pouvoir, l’attention, nous voulons hisser au sommet de la hiérarchie, mais nous savons nous convaincre que nous agissons selon de nobles idéaux. Côté âme, côté essence de l’être, nous sommes peut-être moins honnêtes que les grands singes… Nous croyons être différents, mais nous ne le sommes pas…»

Des bonobos et des hommes
Deni Béchard
Écosociété

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