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L’Union européenne survivrait-elle au Brexit?

KNUTSFORD, UNITED KINGDOM - MARCH 17: In this photo illustration, the European Union and the Union flag sit together on bunting on March 17, 2016 in Knutsford, United Kingdom. The United Kingdom will hold a referendum on June 23, 2016 to decide whether or not to remain a member of the European Union (EU), an economic and political partnership involving 28 European countries which allows members to trade together in a single market and free movement across its borders for citizens. (Photo by illustration by Christopher Furlong/Getty Images)

Dmitry Belyaev - Metro World News

Le référendum sur la séparation du Royaume-Uni d’avec l’Union européenne approche à grands pas: les électeurs décideront demain si leur pays demeure  dans la famille européenne. Les derniers sondages donnent une légère avance au camp du «Remain», favorable au maintien du royaume dans l’UE, face aux partisans du «Leave», qui luttent pour que le «Brexit» advienne. Mais en cas de divorce, l’Union européenne pourra-t-  elle garder sa famille intacte? Métro a tenté de répondre à la question.

Le «Brexit» est une nouvelle crise qui succède à tant d’autres pour l’Union européenne. Celle-ci a dû traverser, ces dernières années, les crises financières grecque, portugaise, italienne, espagnole et irlandaise – en plus de devoir accueillir une partie des réfugiés qui fuient la guerre en Syrie.

«Les États membres sont divisés quant à la position à adopter face au Royaume-Uni, alors que quelques-uns prônent la flexibilité ou veulent eux-mêmes quitter l’Union», explique à Métro Nicolas Levrat, directeur de l’Institut d’études mondiales de l’Université de Genève.

Il ajoute qu’«en même temps, des pays comme la France, l’Allemagne, la Belgique, l’Italie et l’Espagne tenteront de renforcer un “noyau européen” qui partage de plus grandes ambitions intégrationnistes. Ceux-ci voudront soit une Europe à deux voies (c’est-à-dire une zone de libre-échange autour du Royaume-Uni et une Europe forte pour ceux qui en veulent), soit une Europe à trois voies (une zone de libre-échange autour du Royaume-Uni, un noyau dur et une Union de seconde zone pour les europhiles plus modérés).

«Le Brexit pourrait amener d’autres pays à remettre en question l’union économique.» –Ivan Eland, directeur du Centre sur la paix et la liberté de l’Independent Institute

Mais les Britanniques ne sont pas les seuls qui songent à quitter l’Union. Plusieurs pays envisagent également de quitter la nef européenne.

Par exemple, les Pays-Bas et la République tchèque ont déjà promis de tenir un débat semblable à celui qui divise actuellement les Britanniques.

«Le Brexit pourrait amener d’autres pays à remettre en question l’union économique, croit Ivan Eland, directeur du Centre sur la paix et la liberté de l’Independent Institute. Cela pourrait également favoriser l’émergence du séparatisme en Belgique, en Espagne, en Italie et en Écosse.»

La dirigeante du Scotish National Party, Nicola Sturgeon, a déjà annoncé qu’un autre référendum sur l’indépendance écossaise aurait lieu si les Britanniques obligeaient l’Écosse à quitter l’Union contre sa volonté.

Un autre exemple provient de Venise, qui a voté, en mars 2014, en faveur de son indépendance vis-à-vis Rome. Quelque 45 % des participants se sont dits favorables à l’idée de quitter l’Union et à recréer l’antique république de Venise.

Mais le chemin qui mène à l’indépendance est souvent semé d’embûches. Un des plus grands problèmes que ces mouvements rencontrent est un appui insuffisant des électeurs. La Catalogne, par exemple, est peuplée de façon importante par des gens venus d’ailleurs, tout comme l’Écosse. L’immigration, souvent réfractaire aux mouvements séparatistes, a contribué à ce que les référendums qui se sont tenus dans ces deux régions en 2014 soient incapables d’obtenir un «Oui».

«Un autre problème vient de la peur que les petites économies ne soient pas viables si elles sont laissées à elles-mêmes, ajoute M. Eland. Cependant, les études montrent que c’est faux. Et puis, une donnée inconnue joue en défaveur des mouvements indépendantistes, à savoir si l’UE permettrait à un État nouvellement créé de demeurer dans son sein. La majorité des indépendantistes veulent demeurer dans ce grand marché pour écouler leurs produits.»

«[L’UE] est divisée quant à la position à adopter face au Royaume-Uni.» –Nicolas Levrat, directeur de l’Institut d’études mondiales de l’Université de Genève

Mais même si le Royaume-Uni décide de rester dans l’Union, le statu quo ne sera plus possible. Les experts estiment que des réformes majeures auront lieu prochainement, au bout d’un processus qui s’annonce tout sauf facile.

«Elles devraient inclure une redéfinition des critères d’appartenance à l’Union, affirme Nicolas Levrat. Ou la création d’un noyau européen composé de la France, de l’Allemagne et de quelques autres. Ce second scénario, cependant, dépend beaucoup de la capacité de la France de faire ces choix politiques, et je doute sérieusement qu’elle l’ait en ce moment pour des raisons de politique intérieure. C’est plus probable qu’il y ait une reconfiguration territoriale majeure dans les décennies à venir.

«Ils se trompent»

Entrevue avec Anthony Pagden, Professeur de sciences politiques et d’histoire à l’Université de Californie, Los Angeles, États-Unis.

Quelles sont les chances que le Royaume-Uni quitte l’Union européenne?
Certains individus croient qu’une sortie de l’UE servirait les intérêts à long terme du Royaume-Uni, en permettant aux compagnies britanniques de se concentrer sur des marchés en dehors de l’Europe. La grande majorité de ceux qui voteront en faveur du Brexit, toutefois, ont une notion de la souveraineté erronée, apprise dans les enseignements de la presse populaire, du UK Independance Party et de l’ancien maire de Londres, Boris Johnson. Ils croient que si les lois qui sont adoptées ne passent plus par Bruxelles, et si Westminster retrouve sa préséance sur la Cour européenne de justice, et si le Royaume-Uni se retire de la Convention européenne des droits de la personne, leur vie changera. Ils se trompent. Même en dehors de l’UE, les Britanniques demeureront liés par des restrictions commerciales très similaires à celles qu’ils vivent déjà.

Le Brexit n’est donc pas la meilleure option pour le Royaume-Uni?

Certainement pas, à mon avis. Les conséquences pourraient être très sérieuses, dépendamment de la façon dont les autres membres de l’Union réagissent au Brexit. Ils pourraient décider – mais ils ne le feront probablement pas – d’être très punitifs pour dissuader d’autres États de faire la même chose. Il est probable que la réputation de Londres comme une place financière de classe mondiale s’en trouverait entachée. L’influence britannique sur les affaires internationales diminuerait significativement. Seul, le Royaume-Uni n’est qu’une puissance de moindre importance et, à ce titre, la comparaison souvent faite avec la Norvège est juste. Finalement, des opportunités d’éducation et d’enrichissement culturel pour les jeunes, souvent inestimables, mais qui n’ont trouvé que peu d’importance dans les débats du Brexit, seront irrévocablement perdues.

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