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Incursion dans le Montréal numérique

 

Montréal s’enrichit cette année d’un festival de plus: Printemps numérique, dont la programmation est annoncée ce jeudi. Cette initiative, concrétisée par la Conférence régionale des élus, vise à fédérer plusieurs événements existants de l’industrie numérique montréalaise sous une même bannière. L’objectif? Faire connaître la diversité de ce secteur méconnu du Montréal créatif. En voici un échantillon en six rencontres.

Bouton-vert_01 Centre Turbine
Plusieurs des acteurs du Montréal numérique rencontrés ont souligné l’importance d’éduquer la population pour qu’elle apprécie à sa juste valeur l’apport de leur secteur à la vitalité montréalaise. L’un de ceux qui contribuent le plus à cette éducation est probablement Yves Amiot grâce à son centre de création pédagogique Turbine.

«L’objectif c’est de faire vivre aux jeunes le processus de création. Pour les artistes, ça leur permet de sortir de leur atelier et de leur zone de confort. Bref, c’est bidirectionnel», affirme M. Amiot.

Récemment, les artistes Natacha Clitandre et Magalie Magali Babin ont mis leurs talents, pendant cinq séances, au service de deux classes de Verdun. Grâce à différentes expériences sensorielles, les jeunes ont exploré leur vision auditive et photographique du quartier. Le résultat sera présenté au centre culturel de Verdun à partir du 9 avril.

Comme chaque projet doit être unique pour obtenir une nouvelle subvention, Yves Amiot reconnaît que la créativité de son équipe est mise à rude épreuve. Mais ça en vaut la peine, conclut-il, en suggérant d’aller écouter le travail d’Étienne Grenier et des élèves de l’école Laurier Macdonald: huit atmosphères sonores captées dans l’école au moyen de talkies-walkies et mixées ensemble dans un contexte où le processus d’essais-erreurs a permis aux ados de voir que l’art numérique, ce n’est pas une science exacte!

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L’un des meilleurs exemples de la convergence numérique qui s’opère actuellement à Montréal se retrouve dans un loft du Plateau. Dans une ancienne banque de la rue Roy cohabitent désormais les deux piliers rivaux de l’art numérique: Alain Mongeau (festival Elektra) et Alain Thibault (festival Mutek).

À l’occasion du Printemps numérique – mais aussi pour fêter leurs 15 ans respectifs et sceller leur réconciliation –, les deux festivals se croiserontdu 27 mai au 1er juin au Musée d’art contemporain. Elektra amènera le volet installations audiovisuelles dans le cadre de sa biennale internationale, tandis que Mutek apportera le côté festif.

«Le fait que le musée nous accueille pour la première fois, c’est une forme de reconnaissance de l’art numérique, un art jusqu’ici ignoré par les technophobes de l’establishment qui ne comprenaient pas ce qu’on faisait», raconte Alain Thibault.

Maintenant que ces deux pôles de l’art numérique ont décidé de ramer ensemble, ils comptent bien se faire entendre des décideurs qui signent les chèques de subvention. «Dans le domaine des arts, on est les derniers arrivés, et le frigo est déjà vidé par le théâtre, le jazz, l’humour et la danse. C’est ça, le problème des subventions gouvernementales; ils reviennent toujours aux mêmes», note M. Mongeau. En attendant, ils planifient ensemble un voyage à Londres, où ils comptent bien utiliser leur notoriété internationale pour mettre en valeur les artistes d’ici.

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Passez une heure avec Lynn Hugues et vous découvrirez que l’univers du jeu vidéo va bien au-delà des blockbusters d’Ubisoft ou d’EA. C’est dans son laboratoire de l’Université Concordia qu’elle a notamment conçu Propinquity, un jeu mêlant électronique, danse et combat amical dans un cercle lumineux. Il a été présenté aux IndieCade, les Oscars du jeu alternatifs.

Comme le laboratoire qu’elle a cofondé se spécialise aussi dans les tissus numériques, elle travaille actuellement sur un jeu d’action où l’écran serait incorporé au vêtement et où le joueur serait amené à déambuler à différents endroits où on interagit avec la ville pour remplir des missions.

«L’avenir est dans le jeu mixte, où la technologie ne compromet pas l’ouverture au monde extérieur», clame celle qui croit que les critiques de sexisme, de violence ou de paresse accolées aux jeux vidéo ne concernent qu’une infime partie de la réalité.

Elle conseille d’ailleurs de s’ouvrir aux jeux vidéo d’auteur tels que Papo & Yo, un jeu «à la fois émouvant, amusant et didactique», inspiré de l’enfance de son concepteur qui a grandi avec un père alcoolique. Sceptique? Mme Hugues donnera une conférence à la Mont-Royal Gaming Society le 11 mai.

Bouton-vert_04Eastern Bloc
Ce centre d’artistes autogéré fêtera sous peu ses sept ans. Pas mal quand on sait qu’il se consacre aux artistes émergents en art numérique, une pratique abstraite pour bien du monde.

Comme tout centre d’artistes, l’endroit accueille des artistes en résidence qui profitent des outils du lab (imprimante 3D, foreuses, etc.) pour créer et diffuser leurs œuvres. La prochaine, celle d’Erin Gee, consiste en 10 robots capables de jouer chacun 6 notes sur des carillons. Ils seront connectés par un réseau sans fil à un ordinateur et à des capteurs placés sur des comédiens. Le concert variera en fonction des émotions jouées par ces derniers.

«On pense que l’artiste en art numérique est uniquement équipé d’un laptop, c’est une erreur. En fait, créer une œuvre peut prendre des années, entre le processus d’expérimentation, la programmation informatique ou la création des circuits électroniques», indique Éliane Ellbogen, directrice artistique d’Eastern Bloc.

Même son de cloche du côté de Robin Dupuis, un des fondateurs de Perte de signal, un centre représentant 22 artistes. «C’est peu connu, mais l’artiste en art numérique qui tourne le plus à l’international est très probablement Québécois», lance M. Dupuis. Il s’agit de Nicolas Bernier, dont la dernière œuvre, Frequencies, a été admirée dans une dizaine de villes étrangères depuis huit mois.

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Pour voir et entendre parler de vêtements intelligents, un petit passage par le studio de Valérie Lamontagne s’impose.

Dans le cadre de son doctorat et pour fabriquer ses robes lumineuses, elle est amenée à tester différents produits. L’imprimante à tissus, la coupe et la couture assistées par ordinateur, les fibres conductrices d’électricité et les métiers à tisser capables d’incorporer des ampoules DEL dans le tissu n’ont ainsi quasiment plus de secret pour elle.

Si les secteurs de la recherche et de la mode travaillent encore peu ensemble, Valérie Lamontagne a quand même remarqué quelques col­laborations efficaces. Par exemple, les hôtels utilisent de plus en plus des rideaux qui se nettoient automatiquement grâce à la lumière. Certains hôpitaux ont des jaquettes capables d’indiquer si un patient fait de la fièvre, et les vêtements solaires permettant de recharger un cellulaire sont pour demain.

«Chez nous, on aurait intérêt à développer un système de recherche plus souple où l’industrie serait ouverte aux idées audacieuses et où les universités ne fermeraient pas la porte à la commercialisation des découvertes.» Elle pense notamment au Danemark, où 50 % du montant de la bourse vient du privé. On pourrait appeler cela un PPPP: partenariat public privé profitable.

Bouton-vert_06Maison Notman
Quand les travaux seront finis, l’ancien hospice jouxtant la maison Notman sera devenu un incubateur d’entreprises en démarrage. «En tout, 23 bureaux seront loués à de jeunes entrepreneurs voulant sortir de leur garage. Les baux ne seront que de six mois pour favoriser le roulement», explique Noah Redler, directeur du campus. Sur place, les locataires auront accès à des formations gratuites en comptabilité, marketing, conseil juridique, en plus de profiter d’une saine émulation. Ils bénéficieront aussi des conseils de mentors tels que John Stokes, qui pourrait aussi décider, en tant qu’ange investisseur, de mettre quelques milliers de dollars dans les projets les plus prometteurs.

Parmi les jeunes entreprises à fort potentiel qui sont passées par la maison Notman, citons reelyActive qui a créé un capteur sans fil enregistrant tous vos déplacements. «Si chaque chariot de supermarché en était équipé, la direction en apprendrait beaucoup sur les mouvements des consommateurs dans un magasin», affirme M. Redler.

L’endroit accueillera aussi un restaurant où le Québec inc. pourra rencontrer le Québec 2.0. La Maison Notman a d’ailleurs prévu une journée portes ouvertes en mai pour souligner la fin des travaux.

À lire aussi: Les créateurs d’art numérique s’éclatent

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