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Arrestations de neuf personnes par l'UPAC

Pierre Saint-Arnaud - La Presse Canadienne

MONTRÉAL – L’Unité permanente anticorruption (UPAC) a frappé un grand coup qui, cette fois, visait les plus hautes sphères politiques municipales.

Neuf personnes, dont certains anciens hauts dirigeants de la métropole, ont été arrêtées par des agents de l’UPAC pour avoir participé à un système visant à favoriser une entreprise dans l’octroi d’un contrat municipal de plus de 300 millions $, à Montréal.

«Nous sommes très heureux du travail qui a été fait», a déclaré le directeur des opérations de l’UPAC, Gilles Martin, jeudi en point de presse.

«Le commissaire (de l’UPAC, Robert Lafrenière) en est enchanté. C’est encore un pas en avant pour la lutte contre la corruption», a-t-il ajouté.

Parmi les accusés se trouvent l’ancien président du comité exécutif de la ville de Montréal et ex-bras droit du maire Gérald Tremblay, Frank Zampino, âgé de 53 ans, l’ex-directeur de cabinet du maire et ancien directeur général de la Société d’habitation de la ville, Martial Fillion, 59 ans, ainsi que Bernard Trépanier, 74 ans, un ancien responsable du financement d’Union Montréal, le parti de M. Tremblay.

Les trois hommes sont accusés de fraude, de complot et d’abus de confiance. MM. Zampino et Trépanier sont également accusés de participation à une infraction, alors que M. Trépanier fait aussi face à une accusation de fraude envers le gouvernement.

L’entrepreneur Paolo Catania, 49 ans, et son entreprise, Construction Frank Catania et associés, basée à Brossard, en Montérégie, font également face à des accusations de fraude, complot et abus de confiance.

Ce quatuor regroupe tous les éléments reliés à une fraude d’au moins un million de dollars commise en marge de la cession, par la ville de Montréal, de terrains dans l’est de l’île à la la firme Catania pour la construction du Faubourg Contrecoeur, un projet de 300 millions $.

Le stratagème mis au jour par les policiers est typique de la forme que prennent corruption et collusion dans le milieu municipal, soit de fournir des renseignements privilégiés à un entrepreneur pour l’obtention d’un contrat en échange d’avantages monétaires ou autre à des individus ou à leur formation politique.

«Le stratagème a été mis en place, a été dirigé, selon ce que la preuve nous démontre, par M. Zampino, accompagné de M. Martial Fillion, a expliqué l’inspecteur Denis Morin. Les objectifs étaient de donner le plus d’information et de données, des avantages financiers même, pour que Construction Frank Catania puisse obtenir ce contrat de 300 millions $.

«De l’argent avait été donné à M. Trépanier, qui est un financier d’un parti politique (Union Montréal). La preuve nous démontre que (l’argent) était pour un parti politique», a-t-il ajouté.

Les enquêteurs ont pu établir que MM. Zampino et Catania se connaissaient bien, ayant même voyagé ensemble. Ils n’ont pu établir jusqu’ici, toutefois, si l’argent remis à Bernard Trépanier s’est bien retrouvé dans les coffres du parti.

L’affaire a ébranlé le maire de Montréal, Gérald Tremblay.

«J’ai mentionné d’entrée de jeu que je prenais acte des arrestations que je qualifie d’arrestations qui sont graves et j’espère que la lumière va être faite le plus rapidement possible, a-t-il dit. (…) Il n’y a aucun doute que ça affecte la crédibilité des élus et, dans ce cas-ci, plus particulièrement les élus municipaux.»

M. Tremblay a cependant insisté sur le rôle qu’il avait joué dans le but de faire le ménage à l’hôtel de ville.

«On a posé des gestes très courageux au niveau de l’octroi des contrats. Les processus ont été changés et, partant de là, le vérificateur général a reconnu dans son dernier rapport tous les efforts que nous avons faits», a dit le maire.

À Québec, le ministre de la Sécurité publique, Robert Dutil, s’est félicité de la frappe de l’UPAC.

«On a vu récemment des action de l’UPAC très fortes, qui ont été faites, et il y aura sans doute d’autres actions de l’UPAC qui se feront, a-t-il déclaré à l’Assemblée nationale. Ces 200 personnes-là, à tous les matins, travaillent en toute indépendance pour lutter contre la corruption et la collusion, et ils font un bon travail.»

En point de presse, il a toutefois reconnu que ce travail, mené en parallèle à celui de la Commission Charbonneau, pouvait présenter un risque de chevauchement.

«C’est un risque dont on a parlé à l’époque. Une commission d’enquête et, en même temps, l’UPAC. C’est leur devoir — et à l’UPAC et à la commission d’enquête — de s’assurer qu’ils font une bonne coordination pour qu’on ne se retrouve pas dans une situation où il y a des gens qui sont accusés et qui ne peuvent pas être condamnés pour diverses raisons.»

Frank Zampino a été arrêté à son domicile de l’arrondissement montréalais de Saint-Léonard, à l’aube, jeudi matin, par des membres de l’UPAC. Quelques heures plus tôt, en fin de soirée, mercredi, Paolo Catania avait été arrêté à l’Aéroport international Pierre-Elliott-Trudeau, à Montréal. Il allait monter à bord d’un avion qui s’est dirigé vers un pays étranger.

Les autres suspects sont Martin D’aoust, 37 ans; Pasquale Fedele, 48 ans; André Fortin, 47 ans; Daniel Gauthier, 54 ans; et Pascal Patrice, 43 ans. La plupart sont des employés de Catania et font tous face à des accusations de fraude et de complot.

Jeudi, par voie de communiqué, l’entreprise Catania a fait savoir qu’elle collaborera avec les autorités et ajouté qu’elle continuera d’assurer la gestion de tous ses travaux de construction ainsi que le développement de ses projets immobiliers en cours et futurs.

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