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Plus de décès qu’à la normale au Québec, sans cause claire

coronavirus Le directeur national de santé publique, Horacio Arruda, a tenté jeudi de démêler le vrai du faux quant aux rassemblements extérieurs.
Le directeur national de santé publique, Horacio Arruda. Photo: Josie Desmarais/Métro

Depuis quelques semaines, des données officielles montrent une augmentation du nombre total de décès au Québec qui est supérieure à la surmortalité attribuée directement au coronavirus. Une situation que peine à expliquer le gouvernement Legault.

L’Institut de la statistique du Québec (ISQ) a publié jeudi une mise à jour de sa liste des décès hebdomadaires au Québec au cours des dernières années. Celle-ci s’arrête au 10 octobre. À partir des données disponibles, Métro a comparé la moyenne hebdomadaire des décès, de 2015 à 2019, entre la semaine du 30 août et celle se terminant le 10 octobre.

Pendant cette période, qui correspond environ aux six premières semaines de la deuxième vague du coronavirus, on constate un écart de 666 décès en 2020 par rapport à la moyenne des cinq années précédentes. Sur une base hebdomadaire, c’est pendant la dernière semaine disponible que l’écart est le plus grand, alors que l’ISQ rapporte 170 morts de plus que la moyenne calculée.

Un écart difficile à expliquer

Or, de la fin août au 10 octobre, on rapporte environ 200 décès reliés au coronavirus au Québec. Ceux-ci représentent donc moins du tiers de l’ensemble des morts supplémentaires recensés pendant ces six semaines.

«Il semble y avoir une mortalité excédentaire anormale dans les dernières semaines, surtout chez les hommes de 70 ans et plus», souligne à Métro le professeur Pierre-Carl Michaud, de la Chaire de recherche sur les enjeux économiques intergénérationnels à HEC Montréal.

«C’est encore difficile de dire ce qui se passe, mais ce sera à surveiller», ajoute-t-il.

Questionné pendant un point de presse à Québec, jeudi, le directeur national de la santé publique du Québec, Horacio Arruda, n’a également pu justifier cet écart.

«On a demandé des tableaux et une analyse, comme tels, dont je n’ai pas encore eu les résultats», a-t-il dit. Actuellement, l’ISQ ne précise pas les différentes causes des morts qu’elle recense sur une base hebdomadaire.

Des effets «indirects» de la pandémie?

En entrevue à Métro, vendredi, l’épidémiologiste et professeure à l’École de santé publique de l’Université de Montréal, Hélène Carabin, a elle aussi souligné qu’il est difficile actuellement d’expliquer cet écart. Elle avance toutefois l’hypothèse d’un impact «indirect» de la COVID-19 sur des décès reliés à d’autres maladies, alors que la pandémie est venue bouleverser le réseau de la santé au Québec.

«C’est sûr que depuis le début de la pandémie, il y a certains services de suivi des maladies chroniques qui ont été retardés. Donc, ce n’est pas impossible que des décès excédentaires soient dus à des services qui n’ont pas pu être donnés à cause de la réponse à la COVID», soulève l’experte. Une possibilité que n’écarte d’ailleurs pas le Dr Arruda.

«Ça peut être une des hypothèses, mais il peut y avoir d’autres facteurs qui peuvent expliquer cet élément-là», a-t-il évoqué jeudi.

Pendant la première vague, l’ISQ avait associé l’entièreté des décès en excédent au Québec au coronavirus. De la mi-mars à la fin mai, la surmortalité a atteint 30% au Québec, grimpant même près de 50% pendant une semaine sombre, de la fin avril au début mai.

«Ce n’est pas impossible qu’on soit en train de mesurer, à un certain point, l’impact indirect de la COVID [sur le taux de mortalité au Québec].» -Hélène Carabin, épidémiologiste

Trop tôt pour assouplir les règles

Après avoir rapporté jeudi 28 nouveaux décès reliés au coronavirus dans la province, ce bilan s’est encore alourdi vendredi alors que la Santé publique rapporte 25 morts supplémentaires et 1133 nouveaux cas. Ce sont ainsi 6403 personnes qui ont perdu la vie au Québec en raison de la COVID-19 depuis le début de la pandémie.

«Jusqu’à maintenant, on arrive à maintenir les cas sur un plateau. Ce n’est pas en croissance exponentielle [comme c’est le cas en Europe]», analyse Hélène Carabin.

Elle ne croit toutefois pas qu’il serait judicieux, à l’heure actuelle, de lever certaines restrictions dans les régions en zone rouge. À Montréal, tant la directrice régionale de santé publique, Mylène Drouin, que la mairesse Valérie Plante, ont fait des demandes en ce sens au gouvernement Legault dans les derniers jours.

Mme Carabin estime toutefois qu’il est trop tôt actuellement pour «rouvrir» certains secteurs de la société, comme les gyms et les restaurants. À l’instar du premier ministre François Legault, l’experte souligne l’importance de limiter au maximum les occasions de tenir des rassemblements afin de mieux lutter contre la pandémie.

«C’est vraiment une responsabilité communautaire, ce virus-là. Il faut penser aux autres en restant chez soi», conclut-elle.

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