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La chute de l’empire américain: L’argent fait le bonheur

Photo: Films Séville

Denys Arcand revisite ses thèmes fétiches dans La chute de l’empire américain, certainement le film québécois le plus attendu de l’année.

La première scène du long métrage, qui rappelle Pulp Fiction ou The Social Network, donne rapidement le ton de l’ensemble. Un doctorant en philosophie (Alexandre Landry) se plaint à coups de citations littéraires que les intellectuels sont souvent isolés du reste de la population. Un discours révélateur à bien des égards.

«48% de la population [québécoise] est analphabète et on traîne ça avec nous depuis trois siècles, fait remarquer le légendaire metteur en scène, qui aura 77 ans dans quelques jours. C’est difficile d’être un intellectuel au Québec… Un livreur gagne plus d’argent qu’un chargé de cours en philo.»

Le ton est lancé. Après son impersonnel Le règne de la beauté, qui en a laissé plusieurs sur leur appétit, «notre plus grand cinéaste» – selon les mots du réalisateur André Forcier lors du dernier gala Québec Cinéma – plonge dans une véritable fontaine de Jouvence avec cette création qui pourrait bien être la suite spirituelle et moins verbeuse du Déclin de l’empire américain.

Ses dialogues caustiques qui passent à la moulinette les maux contemporains retrouvent leur aplomb d’antan, alors que son retour au genre policier évoque ses premiers faits d’armes (La maudite galette, Réjeanne Padovani, Gina).

À partir d’un fait divers authentique sur un vol qui a mal tourné, le récit à forte saveur satirique suit notre héros philosophe, qui récupère deux valises abandonnées contenant à la fois plusieurs millions de dollars appartenant au crime organisé… et son apprentissage des paradis fiscaux.

«La plupart du temps, l’argent est un problème, explique Alexandre Landry, inoubliable dans L’amour au temps de la guerre civile. Mais l’argent qu’on peut donner est une solution, il devient utile. C’est l’envie de donner qu’on montre beaucoup dans le film. C’est là la vraie richesse, l’intérêt de l’argent.»

La chute de l’empire américain n’est pas une œuvre sur le roi dollar. Il y est plutôt question de charité, d’amour et de compassion. Dans cette leçon d’humanité, des êtres marginalisés – une prostituée (Maripier Morin), un ancien malfrat (Rémy Girard) – forment une véritable famille de reconstitution afin d’aider les moins nantis, notamment les personnes itinérantes déjà évoquées dans le trop peu vu Joyeux calvaire, du même réalisateur.

«C’est l’époque du déclin et de la chute de l’empire américain. Nous vivons ça tous les jours.» -Denys Arcand

Denys Arcand a toujours été entouré de sa famille cinématographique, cumulant les apparitions éclair, réunissant alter ego (bonjour Pierre Curzi!) et petits nouveaux dans son univers singulier. Un des derniers en lice est Louis Morissette.

Pour celui qui incarne un policier, ce n’est pas tant son expérience à titre de comédien qu’il retient («45 acteurs de mon âge auraient pu jouer ce personnage») que le fait d’avoir pu côtoyer le cinéaste au quotidien et échanger sur le scénario. Un bagage qu’il va trimballer toute sa carrière.

«Une chose que je retiens de Denys, c’est un gars qui s’assume, confie-t-il. Un scénariste qui n’a pas son métier, il écrit quelque chose, puis la SODEC donne son opinion, puis Téléfilm, le producteur et le réalisateur. De fil en aiguille, il finit par faire une série de compromis qui, parfois, dénaturent son propos et son contenu. Mais Denys, son point de vue, il va l’assumer jusqu’au bout.»

T’as d’beaux yeux, tu sais
C’est à la suite d’une entrevue alors qu’il était porte-parole pour un tournoi de tennis que Denys Arcand a fait la connaissance de Maripier Morin. Il s’est souvenu d’elle en cherchant l’interprète du premier rôle féminin de La chute de l’empire américain. «Je me suis dit qu’elle serait belle au cinéma en raison de la structure de son visage, de la couleur de ses yeux, explique-t-il. Elle était comme une feuille tremblante. Il fallait la protéger, c’était son premier film.»

Bien qu’impressionnée, Maripier Morin ne s’est pas laissée déconcentrer par la pression d’une telle production. Au contraire, elle a redoublé d’efforts et trouvé le moyen d’être à l’aise. «Je ne connaissais pas du tout Alex [Landry, le protagoniste], se rappelle-t-elle. On est allés prendre un verre ensemble. Finalement, ç’a fini avec 10 shots de tequila! C’est là que le contact s’est fait… Il fallait que je sois rassurée, que je me fasse confiance.»

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