Soutenez

La disparition des lucioles: L’aveuglement

Photo: Films Séville

Après Le vendeur et Le démantèlement, Sébastien Pilote change radicalement de registre avec La disparition des lucioles, qui a tout récemment remporté le prix du Meilleur long métrage canadien au TIFF.

«Dès le départ, je voulais faire un film plus généreux, plus accessible, raconte en entrevue le cinéaste, rencontré quelques heures avant la première montréalaise de sa nouvelle création. C’est une comédie dramatique et, dès qu’il y a une tragédie, je la désamorce immédiatement. Je voulais que ça soit léger comme une lager blonde, pas lourd comme une noire ou une IPA.»

Désaltérant à souhait, ce troisième long métrage regorge de mélodies et de couleurs, avec une introduction et une conclusion magiques qui semblent sortir d’un classique enchanteur de Jacques Demy. L’humour, pétillant, fait pop, rappelant en moins absurde celui de Stéphane Lafleur, qui s’occupe ici du montage.

«Je l’ai fait avec naïveté et honnêteté, pour me forcer à faire ça simplement, explique le réalisateur, qui n’a toutefois pas renoncé aux silences mélancoliques qui font la force de son art. Ça demande du courage. Par exemple, au cinéma, je n’aime pas les séquences avec de la musique et j’en ai fait pour combattre mon regard cynique.»

Le cynisme est d’ailleurs le thème par excellence du récit. Pour l’adolescente Léonie (Karelle Tremblay, incandescente), il n’y a pas réellement d’avenir dans sa communauté, une ancienne ville industrielle. Tiraillée entre un père syndicaliste en exil et un beau-père populiste, elle finit par s’extirper du vide et se raccrocher au monde réel par l’entremise d’un musicien (Pierre-Luc Brillant) qui voit l’univers d’une tout autre façon.

«C’est mon film le plus politique, affirme le metteur en scène. Et ce ne sont pas des leçons de guitare que mon héroïne prend, mais des leçons d’innocence. Ça lui permet à la fin d’avoir des petites étincelles dans les yeux et de porter un regard plus tendre sur les choses.»

«Je vois toujours mes films comme des petits films. La disparition des lucioles n’est pas une symphonie, une sonate ou un album concept, mais une chanson. Comme Bruce Springsteen ou Michel Rivard peuvent écrire des chansons très simples et très belles à la fois.» -Sébastien Pilote, cinéaste

Tirant son titre d’un article écrit par le mythique cinéaste Pier Paolo Pasolini peu de temps avant son assassinat et traitant d’une forme de nouveau fascisme, La disparition des lucioles traite ainsi de ce qui est là, mais qu’on ne voit plus.

«Un journaliste de Québec m’a dit: “Je ne suis pas sûr d’être à ton film, parce que, si Paul McCartney fait un truc, on va devoir aller le couvrir”, évoque Sébastien Pilote. Alors j’ai dit: “Tu vois, c’est ça La disparition des lucioles. Il y a une lumière très forte, très puissante et omniprésente autour d’un discours dominant qui nous empêche de voir les petites lueurs, la beauté des choses. Pour les voir, ça prend de l’obscurité et du silence. Il y a beaucoup de bruit en ce moment…»

Articles récents du même sujet

Mon
Métro

Découvrez nos infolettres !

Le meilleur moyen de rester brancher sur les nouvelles de Montréal et votre quartier.