Dilili à Paris: révolte animée
Véritable maître de l’animation française, Michel Ocelot retourne au grand écran par la grande porte avec Dilili à Paris, un nouveau conte d’une importance capitale.
Bien qu’il se déroule dans le Paris de la Belle Époque, le septième long métrage du père de Kirikou aurait difficilement pu être plus contemporain dans sa façon de rappeler la violence universelle que les hommes font subir aux femmes, alors que des rapts de fillettes secouent la Ville Lumière.
«Pourtant, mon histoire a été écrite il y a de nombreuses années, a confié le cinéaste lors de son plus récent passage à Montréal. Cette réalité existe depuis très longtemps. Des hommes font beaucoup de mal aux femmes et aux filles. C’est plus grave que les guerres. Il y a plus de morts. Ce n’est pas normal de ne pas en parler, de laisser faire et de laisser grandir un nouveau rejet des femmes. Tout ça me révolte.»
Il a ainsi imaginé qu’une petite fille franco-kanake, Dilili, se chargerait de retrouver les disparues. Une héroïne forte, qui n’est pas sans rappeler un certain… Kirikou.
«C’est un modèle, animé du slogan “Jamais plus à quatre pattes”», explique celui qui a offert par le passé Les contes de la nuit et Princes et princesses.
«Je fais ce que je veux. C’est la base de mon art.» – Michel Ocelot, créateur notamment de la série Kirikou et de Dilili à Paris
Afin de contraster avec la noirceur de son sujet, Michel Ocelot multiplie les rencontres les plus incroyables (avec notamment Emma Calvé, Marie Curie et Marcel Proust), à la fois par souci de filiation et pour rappeler la beauté environnante.
«En choisissant 1900, je ne m’apercevais pas que je choisissais une époque exceptionnelle où il y avait à Paris tellement de gens qui faisaient bien leur travail, développe-t-il. C’est la civilisation. Quand on a un bon métier qu’on pratique bien, on n’a pas besoin de tuer et de violer, de battre sa femme.»
Une splendeur poétique qu’on retrouve également dans les dessins, dont la symbiose de photos d’époque retouchées et d’animation traditionnelle rappelle son travail sur Azur et Asmar.
«Quand j’utilise l’ordinateur, c’est moi qui commande, ce n’est pas l’ordinateur, rappelle le réalisateur de 75 ans. La plupart des animations en 3D me déplaisent, car c’est souvent une démo pour tester les capacités du logiciel.»
Génération Kirikou
Il y a 20 ans naissait à l’écran Kirikou, un garçon pas grand, mais vaillant. Un personnage qui a marqué au fer rouge toute une génération de cinéphiles.
«Tout le monde pensait que le film allait être un échec: tous sauf moi, qui n’ai pas été surpris de son succès, se souvient son créateur, Michel Ocelot. Ce que je n’avais pas prévu, c’est la qualité du succès. Les jeunes adultes qui font de la si belle animation aujourd’hui, ce sont tous des enfants de Kirikou… Ce qui m’a forcé à en faire d’autres, c’est l’amour des gens. C’est un phénomène qui m’a dépassé.»