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Le dg de Montréal se sentait parfois impuissant

Photo: www.ceic.gouv.qc.ca

MONTRÉAL – L’ancien directeur général de Montréal de 2006 à 2009, Claude Léger, a affirmé à la Commission Charbonneau, jeudi, que même s’il occupait le poste administratif le plus important à la Ville, il se sentait parfois impuissant face à ce qu’il voyait.

Dès son entrée en fonctions, il a reçu le rapport du vérificateur interne Denis Savard soulignant que 56 pour cent des contrats étaient octroyés à quatre groupes d’entreprises.

Il en a conclu qu’il pouvait apporter certains correctifs à l’interne, mais que d’autres faits évoquant le truquage d’offres ou la collusion «relevaient de la police» et dépassaient sa compétence comme directeur général. «Moi comme fonctionnaire, je ne me sentais pas très bien équipé pour faire face à ça», a-t-il témoigné.

La structure bicéphale de Montréal (le partage du pouvoir entre le maire et le président du comité exécutif) pose problème, selon lui. Il a d’ailleurs relaté que le maire Gérald Tremblay lui a un jour dit: «monsieur Léger, je m’occupe du quoi, et le comment c’est monsieur (Frank) Zampino».

Dans le dossier de la vente des terrains du Faubourg Contrecoeur, dans l’est de Montréal, par exemple, il se rappelle que M. Zampino poussait pour que la transaction se fasse plus vite. M. Léger, pourtant, comme un autre témoin devant la commission, Joseph Farinacci, exprimait des réserves quant au processus.

Mais le comité exécutif avait décidé que la transaction se ferait de cette façon. Et le directeur général de la Ville est tenu de mettre en oeuvre les décisions du comité exécutif, a-t-il relaté.

«J’ai tenté au mieux de protéger les intérêts de la Ville», a-t-il conclu.

Et même lors des séances du comité exécutif, a-t-il raconté, la plupart des dossiers arrivent bien ficelés, ont suivi la filière normale au sein des différents services de la Ville, alors que d’autres sont présentés en cinq ou dix minutes, sans être ficelés, sans que lui, le directeur général, en ait eu vent avant. Et si le comité exécutif adopte une résolution en ce sens, il est encore une fois lié par cette décision arrivée sans crier gare.

Et il peut même s’agir alors d’importants projets de développement immobilier, comme cela a été le cas dans le dossier du golf de l’île en 2008 _ un dossier qui n’a finalement pas abouti. «On avait été pris un peu par surprise», a commenté M. Léger.

L’ancien directeur général de Montréal a noté qu’il s’est déjà fait offrir un pot-de-vin, vers 1988-1989, à l’époque où il était ingénieur directeur des services techniques à Montréal-Est. Il a soutenu que l’entrepreneur Tony Catania, de CatCan, avait poussé une enveloppe en sa direction, à la fin d’un repas au restaurant, en lui disant: «tiens Claude, tu prendras du bon temps avec ta famille dans le temps des Fêtes».

«C’est comme s’il m’avait sorti un serpent à sonnettes sur la table», s’est exclamé le témoin, qui a repoussé l’enveloppe. «J’ai dit ‘monsieur Catania, là, vous remettez ça dans votre poche et je ne veux plus jamais qu’on entende parler de ça à la Ville de Montréal-Est’. Ça a duré 30 secondes. Dans le fond, je ne sais même pas ce qu’il y avait dedans» l’enveloppe, a-t-il ajouté.

«Ça va très vite. Vous avez comme 30 secondes pour prendre une décision qui change votre vie», a-t-il raconté, encore ébranlé.

«Ça a été mon premier contact avec une tentative de corruption et je vous dirais qu’il n’y en a jamais eu d’autre par la suite.»

M. Léger poursuivra son témoignage le lundi 11 mars, puisque la commission prendra une semaine de relâche la semaine prochaine.

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