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Cher Réjean Tremblay, la game a changé

Photo: Archives Métro

Le chroniqueur sportif Réjean Tremblay a posé une drôle de question lors de sa plus récente chronique dans le Journal de Montréal. Une question qui en a fait sursauter plus d’un :

«Si vous me permettez, j’ai une question qui me tarabusque l’esprit. Juste une question qui me faisait réfléchir devant mon ordi. Sans que j’aie la réponse. Puisqu’il est évident que ce ne sont pas tous les conjoints qui sont ingénieurs et qui gagnent un gros salaire. Mais quand même… Est-ce que les trois filles auraient été à la salle Tchékov de Sotchi hier après-midi si elles avaient été dumpées dans une garderie à 7 $ à deux ans?»

Il serait tentant de se contenter de répondre à l’auteur des Jeunes Loups que la game a changé. Qu’on n’est plus en 1950. Mais c’est plus complexe que ça. Parce que la question n’est pas simple et qu’elle réveille notre susceptibilité collective : remettre en question la pertinence des garderies à 7$, c’est un peu comme remettre en question le droit à l’avortement. On touche à un puissant symbole de l’émancipation de la femme. Et si on est en plus un homme d’âge mûr dont l’œuvre ne se démarque pas particulièrement par une sensibilité aux enjeux féministes, c’est sûr qu’on se magasine une claque dans la face… de la part de 249092 personnes.

Ça ne veut pas dire que la question ne mérite pas d’être posée. Mais elle doit être posée un peu comme celle de l’avortement. Hillary Clinton a déjà dit que l’avortement devrait être légal, sécuritaire, et rare. Autrement dit, dans un monde idéal, on serait toujours heureuses d’avoir un bébé et on n’avorterait jamais, mais compte tenu que la vie n’est pas si facile, les avortements doivent être accessibles et sécuritaires, sans qu’on en fasse une utilisation abusive.

Dans un monde idéal, on n’aurait pas besoin de travailler et les garderies à 7$ n’existeraient pas. Les deux parents s’occuperaient de la marmaille jusqu’à ce qu’elle ait l’âge d’entrer à l’école. Dans la réalité, l’argent ne pousse pas dans les arbres et les salaires n’étant plus ce qu’ils étaient, bien souvent, les deux parents doivent travailler et «dumper» leurs enfants à la garderie, que le gouvernement a rendue accessible 1. pour stimuler la natalité et 2. pour favoriser l’émancipation professionnelle des femmes. Dans un monde idéal, cette division des tâches entre parents se ferait sans égard au sexe du parent.

Dans l’univers fantasmatique de Réjean Tremblay, le papa serait un ingénieur suffisamment riche pour que la maman puisse s’occuper à élever des champions olympiques. Pour plusieurs, cette situation n’a rien de problématique. Et elle n’aurait pas grand chose de si problématique si le travail ne remplissait que des fonctions économiques. Après tout, qui ne rêve pas de rester à la maison et de s’occuper des enfants? Moi, en fait. Ainsi que plein d’autres filles, et probablement encore plus de gars, je dirais.

Le problème, c’est que le travail ne fait pas que mettre du beurre sur la table. Il est source d’indépendance, d’émancipation, de réalisation de soi, de plein d’affaires du genre.

Une mère qui travaille et qui se réalise, c’est aussi un modèle. Dans une entrevue, Danièle Henkel m’expliquait qu’elle ne regrettait pas les longues journées de travail où elle était moins près de ses enfants : «je leur ai offert autre chose : un exemple de persévérance». Je ne sais pas si les petites Henkel deviendront des olympiennes, mais elles se réaliseront très certainement.

Et bien sûr, il y a des mères qui aiment plus être mères que travailler, qui se réalisent dans le succès de leurs enfants, et c’est aussi très bien comme ça.

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