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Quelle culture du viol?

Lundi, la présidente la Fédération étudiante de l’Université d’Ottawa, Anne-Marie Roy, dénonçait ce qu’il est maintenant convenu d’appeler la «culture du viol» après qu’ait été révélée au grand jour une conversation Facebook privée entre certains de ses collègues du mouvement étudiant, dans laquelle on menaçait de la sodomiser et de la «punir» avec un organe mâle. Rien que ça.

Ironiquement, les discussions entourant ce genre de nouvelles finissent toujours par confirmer l’existence de ladite culture du viol, en suivant la plupart du temps ces étapes, dans l’ordre ou le désordre : 1. Des propos haineux et/ou sexuellement explicites envers une femme sont dénoncés; 2. Lesdits propos sont banalisés et celle qui les dénonce, accusée d’exagérer; 3. On accuse la victime de manquer d’humour et de s’en faire avec des babioles, alors que les agresseurs sont décrits comme les victimes d’un féminisme castrant.

La plupart des gens qui contestent l’existence-même d’une culture du viol invoqueront que 1. Aucun viol n’a été commis; 2. Personne n’a incité personne au viol; et 3. Il n’y a pas eu d’absence de consentement. On pourrait s’obstiner sur le troisième argument, mais pour le reste, ils ont la plupart du temps raison. Parce que la culture du viol, ce n’est pas ça.

Dénoncer la culture du viol, ce n’est pas dénoncer l’évidence : que le viol ou l’incitation au viol, c’est mal. C’est dénoncer tout ce qui entoure la banalisation du viol, la culpabilisation des victimes et la déresponsabilisation des agresseurs. «En cas de viol, la culture du viol permet collectivement de justifier le viol, de le dédramatiser, de le banaliser, de le relativiser en questionnant la responsabilité de la victime, en remettant en question notamment son consentement, supposé par son attitude», explique Tanya St-Jean, fondatrice du site jesuisindestructible.tumblr.com, qui vise justement à sensibiliser les gens à cette culture et à la dénoncer.

Ce genre de discours cultive l’idée que le viol, ce n’est pas si grave et que c’est toujours un peu de la faute de la victime de toute façon. Ça décourage les victimes de dénoncer, parce qu’il leur semble plus facile de se réfugier dans la honte que de subir l’opprobre populaire, comme le subit présentement Anne-Marie Roy sur les réseaux sociaux. Par extension, ça décourage certaines filles d’investir l’espace public, parce qu’elles voient que ce genre de discours les attend si elles prennent leur place.

Pas besoin, donc, qu’un viol ait été commis pour dénoncer la culture du viol. Dans le cas qui nous occupe, la description d’actes sexuels clairement non sollicités, exprimée comme une affirmation de la puissance masculine via les organes génitaux participe de ce phénomène parce qu’elle cultive en amont la banalisation du viol. De toute façon, vous conviendrez que ce n’est pas très glorieux pour les jeunes hommes en question: il faut bien peu d’estime de soi pour n’avoir que sa queue pour se défendre contre le fait que des femmes prennent leur place dans l’espace politique.

Je comprends les gens d’être frus contre ce nouveau concept qu’ils ne comprennent pas vraiment et qui ne fait que condamner ce qui, pour une raison qui leur appartient, leur semble drôle. «En majorité, ce sont des hommes qui sont réfractaires au terme. C’est peut-être parce qu’ils ne sont pas les principales victimes de la culture du viol», pense Tanya St-Jean.

Mais à mon avis, le fait que de jeunes hommes considèrent que c’est drôle de dire qu’on va punir une fille avec sa queue ou en la sodomisant, c’est problématique. Autant pour les gars, que pour les filles.

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