Le parti Vert du Canada et des groupes environnementaux reviennent à la charge pour préserver les oiseaux sur les terrains à proximité de l’aéroport Pierre-Elliott-Trudeau. Une espèce de héron pourrait disparaître et le fédéral doit agir, ont-ils clamé dimanche.
Un terrain qui appartient au gouvernement fédéral et à l’aéroport de Montréal abrite une espèce de héron reconnu depuis 2009 par le Canada comme étant menacé: le petit blongios, d’une taille de près de 40 centimètres. La cheffe du parti Vert du Canada, Elizabeth May, a annoncé dimanche sa ferme intention de faire pression sur le ministère de l’Environnement du Canada, afin que la ministre Catherine McKenna reconnaisse ce terrain comme une espèce naturelle protégée. Situé à quelques encablures de l’aéroport, ce secteur est actuellement inutilisé et aucun projet ne serait sur la table.
«C’est vraiment possible de mettre ce terrain en région écologique, peut-être même en parc national. C’est une région vraiment importante pour la protection des oiseaux rares», a déclaré Elizabeth May.
Mme May a affirmé que les discussions allaient reprendre à la rentrée parlementaire avec la ministre de l’Environnement, en septembre prochain.
Technoparc Montréal, de juridiction municipale, est lui aussi dans la mire des organismes environnementaux. Collé aux terres fédérales, l’Éco-campus Hubert-Reeves, actuellement en construction, pourrait aussi menacer le petit héron, ainsi que les 180 autres espèces qui se partagent ce milieu humide.
C’est le souhait des groupes environnementaux, qui réclament que Montréal abandonne les travaux pour préserver les espèces d’oiseaux qui y habitent. Le Réseau express métropolitain (REM) doit aussi passer dans ce secteur, ce qui inquiète ces organismes.
Pour l’ornithologue Joël Coutu, très impliqué dans la protection des oiseaux de ce secteur, les dommages causés par le début des travaux du campus Hubert Reeves ont déjà fait chuter le nombre d’oiseaux à Technoparc Montréal. Pour lui, l’inaction du gouvernement fédéral sur l’autre terrain augure aussi de mauvaises nouvelles pour le petit blongios, qui pourrait à terme disparaitre si un projet devait se concrétiser sur son milieu de vie ou aux alentours. Tout comme Mme May, il comprend mal ce qui empêche le gouvernement fédéral de décréter cette zone comme un espace naturel protégé.
«On trouve ici la plus grosse concentration de petit blongios sur l’île de Montréal», a-t-il expliqué à Métro, ajoutant que la première cause de disparition des oiseaux était la perte de leur habitat naturel.
Il reste 1 500 petits blongios au Canada. Espèce timide et très petite, elle est largement méconnue du grand public, a analysé M.Coutu. Il a comparé la situation de ce héron avec celles des pandas, qui émeuvent régulièrement le monde entier face à la menace de leur disparition. Pourtant, a-t-il avancé, il y a autant de pandas en Chine que de petits blongios au Canada.
«Les oiseaux représentent la santé, la minute où on perd nos oiseaux, ça veut dire que l’espèce humaine va suivre, tout est connecté. Les oiseaux ont toujours été de bons indicateurs d’un écosystème en santé. C’est leur diminution qui a sonné l’alarme à Technoparc Montréal.» – Joël Coutu, ornithologue
M. Coutu a affirmé avoir déjà observé des espèces d’oiseaux migrateurs originaires des forêts boréales du nord du Québec venir se reposer dans ce milieu humide pendant leurs migrations. La perte de cette zone, a-t-il dit, serait dramatique pour les oiseaux qui y vivent, mais aussi pour ceux qui s’y arrêtent.
En juin dernier, un jugement de la Cour fédérale avait fait annuler un projet immobilier en Montérégie pour protéger la reinette faux-grillons, une espèce de grenouille en voie d’extinction qui aurait été menacée par ce projet. Mme May considère que le gouvernement fédéral devrait faire de même pour le marais, et ainsi protéger le petit blongios.
Une pétition a déjà récolté près de 70 000 signatures pour que soient protégés les milieux humides de Technoparc Montréal. Les signataires exigent que la Ville abandonne le projet de l’Éco-campus Hubert-Reeves. Actuellement, seules les fondations du campus ont été construites ainsi qu’une tranchée. Pour Joël Coutu, aller de l’avant dans ce projet sera une grave erreur pour la survie des oiseaux, mais il est encore temps pour faire machine arrière, a-t-il affirmé.
Plusieurs critères sont prit en compte par Environnement Canada pour qu’une zone soit protégée. Elle doit par exemple abriter au moins 1 % de l’espèce menacée et abriter «un assemblage appréciable d’espèces ou de sous-espèces d’oiseaux migrateurs ou d’espèces en péril».
Le ministère de l’Environnement a indiqué n’avoir observé «aucune violation des lois fédérales dans la zone de Technoparc».
Environnement Canada «continuera de surveiller la situation […] et, si nécessaire, prendra les mesures requises pour protéger les oiseaux migrateurs dans la région», a indiqué a Métro le porte parole du ministère, Mark Johnson.