Une étude menée par l’Institut de recherche et d’informations socio-économiques (IRIS) révèle une forte hausse des loyers de 2013 à 2016 malgré la fin de la crise du logement.
Au cours des quatre dernières années, une augmentation de 5% du prix des logement a été constatée dans l’ensemble du Québec, en valeur réelle, selon le rapport dévoilé vendredi par l’IRIS, qui prend en compte les données de l’inflation dans son calcul.
«C’est une situation très inquiétante et très préoccupante», affirme le chercheur Philippe Hurteau, auteur de cette étude intitulée Marché locatif: les déséquilibres se poursuivent.
À Montréal, les loyers ont augmenté de 32$ de 2013 à 2016, passant, de 734$ pour un logement de deux chambres, en dollars constants de 2017, à 766$, alors que le taux d’inoccupation est quant à lui passé de 3 à 3,9%. «Si l’inflation [0,7% au Québec en 2016] n’était pas prise en compte, ce serait à peu près équivalent à ce chiffre et les loyers feraient du surplace, explique Philippe Hurteau. Mais là, on voit une forte augmentation. Il se passe vraiment quelque chose et cette tendance touche les familles.»
De 2000 à 2012, au cours d’une crise qui favorisait les propriétaires en raison d’une pénurie de logements, le prix moyen des loyers augmentait annuellement de 0,6%. Depuis 2013, ce chiffre grimpe à 1,7%, alors que le marché s’est stabilisé. Étonné par «ce phénomène inflationniste», le chercheur de l’IRIS a néanmoins identifié trois raisons.
- «Les gouvernements fédéraux, provinciaux et municipaux investissent moins dans la création des logements sociaux que dans les années 1990. Ces logements sociaux, proposés à des prix abordables, permettent aussi au marché de se stabiliser», indique Philippe Hurteau.
- La «présence massive» de condos, notamment à Montréal, serait également en cause. «Les promoteurs n’arrivent pas à les vendre, donc ces logements se retrouvent sur le marché locatif, reprend le chercheur. Mais ce sont des logements plus luxueux, neufs, et ils sont donc loués relativement chers.»
- Enfin, la présence accrue d’une plateforme comme AirBnB n’aiderait pas le marché locatif. «Ça entraîne une hausse générale, notamment car des locataires demandent à leur propriétaire l’autorisation d’utiliser AirBnB. Mais en donnant son accord, le propriétaire en profite souvent pour augmenter le loyer, afin d’avoir lui-aussi une marge», souligne l’auteur du rapport.
Des pistes de solution
Même s’il reconnaît qu’il est «difficile de parier sur l’avenir», le chercheur de l’IRIS se montre inquiet pour les années à venir. Pour remédier à ces hausses, il réclame une meilleure législation.
- «Il faut rendre obligatoire l’inscription des baux dans un registre public, soutient-il. Les locataires pourront alors consulter le loyer précédent et pourront contester une hausse abusive. Ça permettra d’avoir un outil pour mieux négocier les prix et avoir une meilleure régulation du marché.»
- Philippe Hurteau demande également de remplacer les recommandations faites par la Régie du logement par des obligations. «Tous les ans, la Régie suggère un pourcentage d’augmentation, détaille-t-il. Mais les pouvoirs publics devraient imposer ce chiffre comme seuil maximal. Si un propriétaire, en raison de travaux ou d’entretiens qui améliorent l’immeuble, veut logiquement aller au-delà de cette recommandation, il doit alors en faire la demande à la Régie.»
Au Québec, 39% des locataires consacrent actuellement un tiers de leur revenu au paiement de leur loyer.