Vélo Québec fête cette année ses 50 ans. À ses débuts, Montréal ne comptait pas la moindre piste cyclable et le Code de la route interdisait de se lever de la selle pour pédaler en danseuse, même dans une côte.
Pour mesurer le chemin parcouru depuis, la présidente-directrice générale de Vélo Québec, Suzanne Lareau, a jeté un coup d’oeil aux archives de l’organisme avec Métro. En voici un aperçu.
1. Nom controver sé
Avant de prendre le nom de Vélo Québec en 1979 et d’ajouter le vélo urbain dans ses champs d’intervention, l’organisme montréalais œuvrait sous le nom de Fédération cyclotouriste provinciale, puis de la Fédération québécoise de cyclotourisme. Il s’intéressait alors au vélo surtout en tant que loisir. «Le changement de nom a suscité un débat en assemblée générale, car le mot vélo avait à l’époque très peu de résonance dans le vocabulaire des Québécois qui utilisaient plutôt les termes bicycle ou bicyclette. Mais s’appeler Bicycle Québec, ce n’était pas envisageable, alors ceux qui ont plaidé que Vélo Québec était meilleur d’un point de vue marketing ont gagné», se remémore Suzanne Lareau, qui était alors militante au sein de l’organisation.
2. Politiciens à vélo
Parmi les maires de Montréal récents, seuls Jean Doré et Pierre Bourque étaient des cyclistes convaincus. Ironiquement, c’est sous leurs règnes respectifs que le vélo a pris le moins d’essor à Montréal. «C’est un peu comme s’ils voulaient s’éloigner de leur image d’adepte du vélo», lance la présidente de Vélo Québec. Elle ajoute qu’au contraire, Jean Drapeau, (surtout son bras droit, Yvon Lamarre), Gérald Tremblay et Denis Coderre ont fait bien plus pour le réseau cyclable et le vélo partage, sans être des utilisateurs fréquents, mis à part quelques participations au Tour de l’île, (sauf pour le maire Drapeau).
3. Quels gains?
Mis à part la piste cyclable construit le long du canal de Lachine par Parcs Canada en 1975, le principal axe cyclable a été aménagé en 1985 le long des boulevards Christophe-Colomb et des rues Boyer, Cherrier et Berri. L’expansion du réseau n’a pris son rythme de croisière qu’au début des années 2000.
Signe du chemin parcouru, en 1979, le Code de la route interdisait aux cyclistes de se lever de la selle, même dans une côte. Autre gain notable, l’accès à la Rive-Sud. «Jusqu’à la fin des années 1970, les vélos ne pouvaient même pas traverser les ponts et ils étaient interdits dans le métro», souligne Mme Lareau. Aujourd’hui, un groupe de cycliste milite plutôt pour que la piste du pont Jacques-Cartier soit déneigée l’hiver. Les adeptes du vélo réclament aussi la permission d’effectuer un arrêt Idaho aux intersections.
Selon l’enquête Origine-Destination de 2013, 4,5% des habitants des quartiers centraux utilisent le vélo pour aller travailler, mais le bassin potentiel d’utilisateurs pourrait être de 22%, selon la Chaire de mobilité de Polytechnique Montréal, notamment parce qu’ils habitent à moins de 5km de leur lieu de travail.
4. Succès et échecs
Parmi les grands succès montréalais, Suzanne Lareau cite spontanément le réaménagement de l’échangeur Parc-Pins et l’ajout de voies cyclables en contresens, tels que celui de la rue Laurier qui coûtent peu cher tout en favorisant les déplacement à vélo.
La construction de terre-pleins, avec de petites ouvertures permettant aux cyclistes de circuler, a aussi été évoquée, de même que les sas cyclistes, qui donnent quelques mètres d’avance aux cyclistes aux intersections.
«Même si j’étais sceptique au début, la voie réservée sur la rue St-Denis à l’heure de pointe du matin pourrait être un succès si la police interdisait vraiment aux autos de se stationner même temporairement», indique Mme Lareau. Parmi les échecs, elle mentionne spontanément la piste cyclable de la rue McGill qui est fréquemment obstruée par des camions de circulation et, plus globalement, le réseau cyclable du centre-ville, au sud de la piste cyclable du boulevard de Maisonneuve. Notons que cette entrevue a été effectuée bien avant le décès du cycliste Clément Ouimet sur la voie Camillien Houde.