À l’instar de la Ligue des noirs, l’académicien et écrivain et Dany Laferrière refuse d’étiqueter Justin Trudeau de raciste. Il condamne que la controverse entourant le «blackface» du premier ministre n’implique pas les communautés touchées, mais qu’elle soit plutôt «une affaire qui se passe entre politiciens blancs» sur un «terrain clos».
«Ce n’était pas du tout un blackface», a-t-il commenté sur les ondes de Radio-Canada à l’émission 24/60 jeudi soir, en parlant plus précisément de la première photo diffusée mercredi de Justin Trudeau lors d’une soirée costumée dans un établissement de Vancouver où il enseignait.
Traditionnellement, un «blackface» donne selon l’auteur «l’envie de ridiculiser […], d’humilier ou de montrer que les Noirs ne sont pas des êtres humains». Ce qui n’était pas «du tout» le cas du premier ministre sur ses photos, d’après lui.
«Il était accompagné de jeunes femmes magnifiques et avait un très beau turban. Les femmes ne semblaient pas effrayées de sa présence. Il n’y avait pas de monstre dans cette photo», tranche M. Laferrière.
Ce dernier qualifie d’«hypocrites» les adversaires politiques de Justin Trudeau qui l’ont qualifié de raciste dans les derniers jours, estimant que ceux-ci «se cachent derrière une chose pour dénoncer une autre quand ils sont peut-être eux-mêmes aussi affublés des mêmes défauts».
«C’est étrange, parce que quand un noir se met du blanc sur le visage, on dit que c’est un colonisé et qu’il voudrait bien devenir blanc. Mais quand un blanc met du noir sur le visage, on dit qu’il est raciste. Le Noir ne peut être quelque chose qu’on rejette.» – Dany Laferrière
Un manque d’écoute
Le plus étonnant dans cette affaire, selon Dany Laferrière, est que plusieurs membres de la communauté noire du Canada affirment haut et fort n’y voir aucun racisme. Or, ceux-ci ne sont pas vraiment écoutés, déplore-t-il.
«On dirait que ça n’a pas d’importance quand ils disent ça, qu’on ne les écoute pas, scande-t-il. On dirait que c’est une affaire qui se passe entre politiciens blancs et l’affaire se passe sur un autre terrain clos.»
«C’est une insulte au blackface et aux histoires de racisme.» -Dany Laferrière
D’ailleurs, les «Mille et une nuits», le thème de la soirée à laquelle participait le premier ministre sur la première photo, «est une histoire arabe» et non occidentale, a rappelé l’auteur. «Mais on a demandé à aucun Arabe ce qu’il pensait de ça», a-t-il illustré.
Les excuses formulées par M. Trudeau mercredi soir n’ont selon l’auteur «rien à voir» avec quelconque forme de racisme, mais sont surtout liées à la joute politique. «S’il ne s’excuse pas, il n’avancera pas. Il ne pourra pas dire un mot de sa campagne et de ses projets politiques. C’est tout simplement de la politique», a avancé l’auteur.
Depuis la Nouvelle-Écosse, mercredi, Justin Trudeau avait fait son mea-culpa complet. «Je dois reconnaître que j’étais aveugle moi-même à la douleur que j’ai pu causer à ce moment-là et que je cause maintenant à des gens qui comptent sur moi pour les défendre», avait-il entre autres indiqué à la presse, reconnaissant que ses gestes étaient bel et bien «racistes».