Même si le chaos a diminué au Complexe Guy-Favreau, les citoyens en attente sont furieux. Parmi les centaines de personnes qui ont passé la nuit dehors, près de 80 d’entre elles ont reçu un rendez-vous pour obtenir un passeport aujourd’hui.
Munie d’un porte-voix, une employée de Service Canada a tenté d’expliquer à la foule présente qu’il ne serait plus possible d’obtenir un rendez-vous aujourd’hui. «Nous avons atteint notre capacité maximale, a-t-elle annoncé mercredi en début d’après-midi aux citoyens désemparés. Nos employés sont fatigués, les gens travaillent beaucoup pour essayer de sortir des passeports.»
«Même si on n’obtient pas de coupon [pour un rendez-vous], est-ce qu’on va être réglé aujourd’hui? C’est ce qu’on veut savoir, on ne va pas attendre 10 ans ici pour rien», a demandé un homme, incitant ensuite les autres citoyens à quitter les lieux. «Je vais annuler mon billet d’avion s’il le faut, je m’en fous, je veux juste savoir s’il vaut la peine d’attendre ici ou non», a crié une autre citoyenne.
Sur place, l’employée a été incapable de répondre aux questions des citoyens, qui se demandaient si cela valait toujours la peine d’attendre, et si les bureaux de Service Canada seraient ouverts au cours de la longue fin de semaine.
Désespoir
Devant les bureaux de Service Canada, la file passe du boulevard René-Lévesque, descend la rue Saint-Urbain jusqu’à couvrir une portion de l’avenue Viger Ouest. Sans passeport devant l’imminence de leur départ, plusieurs citoyens réalisent qu’ils devront annuler leur voyage.
Certaines personnes disent avoir attendu devant l’édifice pendant trois jours, armées de chaises pliantes et de couvertures. Mais elles n’ont toujours aucune réponse. C’est notamment le cas de Nelly, qui doit assister aux funérailles de son père samedi, au Cameroun. Elle vient tout juste d’obtenir sa citoyenneté canadienne, ce qui veut dire qu’elle n’aurait pu obtenir son passeport plus tôt.
Ça fait trois jours que j’attends ici, jour et nuit. Mon vol est ce soir, et je n’ai toujours pas de réponse, je commence à me décourager. C’est beaucoup de temps pour une mère monoparentale.
Camerounaise d’origine, dépassée par les événements
Il n’y a plus de billets disponibles lorsque Métro rencontre une femme tout près de la porte, vers 9h30. Son vol pour aller visiter sa famille dans son Algérie natale est prévu pour jeudi, à 16h. Diabétique et ayant la santé fragile, elle a pu compter sur son fils pour patienter toute la nuit dehors.
«Je partirai avec passeport algérien, peu importe, se résout-elle. Si je ne reviens pas, je vais rester là-bas, et m’essayer avec le consulat canadien pour revenir ici. J’en suis rendue là. On change de pays pour une meilleure vie, et au final, on laisse les gens dehors.»
Après des mois de démarche au téléphone et une nuit passée dehors, un Albanais d’origine a réussi à avoir un rendez-vous en après-midi, après avoir pu entrer dans le Complexe Guy-Favreau en matinée. Son départ vers l’Europe est prévu demain matin, à 7h.
«J’ai dû manquer trois jours de travail pour y arriver, explique Julian, soulagé. Pour toute la famille, notre voyage a coûté 8000 $, et on ne pouvait pas l’annuler, on est vraiment soulagés.»