Montréal

«J’ai besoin des dénonciateurs», dit Me Denis Gallant

En poste depuis à peine deux mois, l’inspecteur général Denis Gallant s’occupera d’ici quelques semaines de la ligne éthique, soit la ligne téléphonique par laquelle les employés de la Ville de Montréal peuvent dénoncer des irrégularités. Métro s’est entretenu avec l’ex-procureur vedette de la commission Charbonneau.

En 2010, plusieurs ont critiqué le fait que la ligne éthique ait été mise entre les mains du contrôleur général, qui relève de la direction de la Ville. Considérez-vous être mieux placé pour la gérer?
Il est certain que je suis indépendant, je ne relève de personne. J’ai déjà ma propre ligne téléphonique où les «sonneurs d’alarme» [de l’anglais whistleblowers] peuvent m’appeler. Mais je crois qu’il faut éviter de multiplier les lignes de dénonciation, ça risque de diluer l’efficacité et des informations importantes pourraient tomber dans une craque.

À quel point la ligne éthique est importante pour vous?
J’ai besoin des dénonciateurs, c’est le nerf de la guerre. C’est pourquoi j’attends avec impatience que les élus à Québec votent pour l’adoption du projet de loi de l’inspecteur général, qui va me donner tous les pouvoirs juridiques pour les protéger.

À quel point êtes-vous en mesure de les protéger?
Si des individus intentent des mesures de représailles envers un dénonciateur, par exemple le renvoie ou le menace, ils sont poursuivis et peuvent écoper d’amendes allant jusqu’à 200 000$. J’ai la volonté morale et juridique de protéger les gens qui vont me permettre de combattre la corruption.

Au sujet de la corruption, un article de La Presse, paru cette semaine, faisait état de contrats publics accordés à des entreprises de construction qui n’ont pas le feu vert de l’Autorité des marchés financiers (AMF)…
Cette nouvelle m’a aussi fait sursauter. J’ai demandé l’accès aux documents et j’ai compris que les firmes, qui ont semblé «échapper à la loi», ont seulement agi comme fournisseurs. Par exemple, la loi n’oblige pas que le fournisseur de béton soit approuvé par l’AMF, mais oblige que celui qui le coule ait le feu vert.

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Mais… il ne s’agit pas là d’un dangereux trou dans la loi qu’il faudrait rectifier?
Ce n’est pas dans mon pouvoir de modifier les lois. Je pourrais toutefois faire des recommandations à cet effet. La loi sur l’intégrité est jeune, elle a été créée par le Parti québécois il y a un an tout juste, il est normal qu’elle doive être peaufinée.

Les ingénieurs de la Ville ont déposé un mémoire cette semaine à la commission Charbonneau, disant que la perte d’expertise interne a facilité le système de corruption. Qu’en pensez-vous?
J’ai mis la main sur le mémoire, mais je ne l’ai pas encore lu donc je ne veux pas m’avancer sur leur conclusion. Mais je me souviens que l’ingénieur retraité que j’ai interrogé à la Commission, Gilles Surprenant, tenait ce discours. C’est possible, mais je vais attendre que le rapport final de la commission Charbonneau soit déposé avant de me prononcer complètement.

Celui qui agira à titre d’inspecteur général adjoint a finalement été choisi. Il s’agit du juricomptable Éric Christopher-Desnoyers, qui occupait précédemment le poste de Chef de la gouvernance, de l’éthique et de l’audit à la Ville de Montréal. Ce dernier se targue d’avoir participé au changement de culture de la Ville, en ayant notamment mis sur pied le bureau du contrôleur général, réécrit le code de conduite et formé plus de 1000 nouveaux fonctionnaires.

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