L’Institut universitaire en santé mentale Douglas accueille le premier système d’aquaponie communautaire au Québec, une forme d’aquaculture intégrée où l’élevage de poissons s’effectue en symbiose avec la culture de végétaux. TC Media a visité en primeur les installations situées à Verdun.
Les serres de l’Institut Douglas ont une allure bien différente depuis le 20 mai. En plus des plantes aux multiples tons de vert, des fleurs colorées et du célèbre bananier, trois grands bacs remplis de pousses naissantes et de boules d’argile sont installés au centre de la bâtisse.
Ils sont reliés par des tuyaux à deux bassins de filtration d’eau, qui débouchent dans un immense baril bleu où nagent des dizaines de petits tilapias, un poisson extrêmement résistant, qui s’acclimate très bien à la chaleur des serres.
Dans quelques semaines, ces trois bacs regorgeront de tomates, de courgettes, de poivrons et d’épices de toutes sortes. Les participants estiment que les plantes y pousseront six fois plus vite que si elles étaient en terre.
Fusion entre deux cultures
Une fusion entre l’aquaculture (production animale en milieu aquatique) et l’hydroponie (la culture de plantes réalisée sur un substrat neutre et inerte comme le sable ou l’argile), l’aquaponie fonctionne selon un principe très simple.
«Les poissons fournissent des défections dans l’eau qui sont des fertilisants nécessaires à la croissance des plantes. Ces déchets sont donc valorisés plutôt que d’être rejetés et de polluer l’environnement, explique Guillaume Voyer, président de C.A.U.S.. Les plantes, elles, filtrent l’eau, qui est alors renvoyée aux poissons.»
Ce balancier ne pourrait être complet sans la présence de bactéries, qui transforment les matières organiques comme l’ammoniaque et l’urée en nitrates, des sels assimilables par les plantes.
Un équilibre parfait
Mis en place par la coopérative verdunoise Coopérative Abondance Urbaine Solidaire (C.A.U.S.), le programme a comme objectif d’améliorer la sécurité alimentaire et d’encourager la consommation locale via l’agriculture urbaine.
Le système fonctionne en circuit fermé. La seule intervention humaine nécessaire est l’alimentation des poissons. «L’équilibre parfait entre les deux cultures est très intéressant», explique Joe Merino, un membre de CA.U.S. qui s’est intéressé à l’aquaponie suite à un voyage au Guatemala.
Les deux systèmes de production, l’aquaculture et l’hydroponie, posent plusieurs problèmes lorsqu’ils sont pris séparément. «Les poissons s’empoisonnent souvent avec l’ammoniaque qu’ils éjectent. L’hydroponie, pour sa part, cause beaucoup de pollution, à cause des engrais minéraux chimiques nécessaires à la fertilisation. Mais lorsqu’on les met ensemble, la faiblesse de l’un devient la force de l’autre», ajoute-t-il.
Les membres de la coopérative C.A.U.S. ont bon espoir que les récoltes seront abondantes. «J’ai fait une expérience similaire à la maison, et j’ai été étonné du succès, raconte M. Marino avec un sourire. J’ai eu des centaines de petites tomates, et des plants de basilic immenses.»
Les résidents de l’Institut Douglas seront aux premières loges de ce système unique. «On va s’impliquer dans la gestion quotidienne du système, nourrir les poissons, faire le suivi de la qualité de l’eau et de la production des plantes, explique Jacques St-Hilaire, horticulteur accompagnateur aux serres. C’est quelque chose de complètement nouveau pour les résidents qui participent à notre programme d’horticulture.»
Ces derniers pourront également profiter des produits alimentaires récoltés, puisqu’ils seront offerts directement à la cafétéria de l’établissement.