MONTRÉAL — L’alliance de santé étudiante du Québec (ASEQ) tentera de convaincre 40 à 50 bars dans les environs des établissements scolaires de faire partie de la campagne «Commande un Angelot», qui permettra aux personnes qui se disent victime de violence sexuelle de demander la protection du personnel à l’aide d’un langage codé.
L’initiative a été lancée dimanche matin, à Montréal, en compagnie de la ministre de l’Enseignement supérieur, Hélène David, et a déjà au moins deux adhérents — le Resto Bar La Maisonnée à proximité de l’Université de Montréal et le Pub Universitaire de l’Université Laval.
«Je suis assez convaincu que les bars sur les campus universitaires vont embarquer dans le projet pour une simple et bonne raison: ils ont tous à coeur la sécurité de leur clientèle. Il en va de l’entreprise, du bar et de la réputation de leur établissement», a assuré Patrice Allard, vice-président, Développement et partenariats, de l’ASEQ.
M. Allard prédit que l’initiative pourrait aussi s’étendre dans les autres bars de la province. «D’aucune façon on ne peut les obliger à participer, mais on va le recommander et éventuellement, ça va devenir une question de compétitivité: « Moi je suis membre et moi je ne le suis pas »», a-t-il souligné.
La ministre David a d’ailleurs fait appel aux associations étudiantes pour qu’elles se servent de leur influence auprès de ces établissements pour les convaincre.
«Ça devient un rapport de force extrêmement intéressant. Si tu n’es pas Angelot, on n’y va pas dans ton bar. Je ne sais pas si vous savez combien il peut se consommer de bière ou autre dans une soirée», a-t-elle expliqué.
Le code «Angelot» devrait pouvoir être utilisé à compter de l’automne 2017, selon M. Allard.
Protocole chez les employés
Cette campagne prévoit la mise en place de tout un protocole chez les employés des bars pour aider les femmes et les hommes qui ne se sentiraient pas à l’aise et qui auraient besoin de leur assistance.
Le personnel des établissements sera formé par les représentants de l’ASEQ et des campagnes «Sans oui c’est non» et «Ni viande ni objet», qui travaillent sur la sensibilisation à la violence sexuelle en milieu étudiant. Les propriétaires devront aussi signer une charte qui les engagera à respecter le protocole.
Ainsi, si une personne commande un «Angelot sans glace», le personnel s’assurera qu’elle sera en sécurité à l’intérieur de l’établissement et la victime choisira elle-même si elle veut y rester ou s’en aller. Si elle en demande un «avec de la glace», elle souhaite ainsi être raccompagnée à l’extérieur et dans ce cas, les employés devront s’assurer qu’elle quitte le bar en toute sécurité.
Finalement, un «Angelot avec de la lime» signifie qu’une agression aurait déjà eu lieu, ou que la personne se sent intoxiquée par l’alcool ou par la drogue du viol, et qu’elle veut que le personnel appelle la police.
Cette commande pourrait aussi être faite par un proche.
M. Allard plaide qu’une telle initiative est importante parce que dans ces situations, la victime n’aura pas besoin de se justifier pour réclamer une protection. Dès qu’elle aura commandé son «Angelot», les employés agiront.
«Souvent quand on demande de l’aide, on doit expliquer pourquoi on demande de l’aide. Dans le cas de l’Angelot, on commande l’Angelot sans avoir à expliquer le pourquoi du comment ce qui est arrivé auparavant», a-t-il expliqué.
Les copropiétaires du RestoBar La Maisonnée ont fait remarquer que des serveurs interviennent déjà s’ils remarquent qu’un de leur client n’est pas à l’aise, mais au moins cette campagne fournira un certain encadrement.
«Ça se fait déjà, on a déjà gardé des filles à la fermeture à l’intérieur du bar parce que des gens les attendaient à l’extérieur, on a raccompagné des gens. C’est déjà quelque chose qui se fait, mais que ce soit mieux encadré avec un code, je pense que ça peut juste aider», a affirmé la copropriétaire Stéphanie Juteau.
«Commande un Angelot» s’inspire de deux campagnes lancées dans d’autres pays, «Ask Angela» au Royaume Uni et «Angel Shot» aux États-Unis.