Salut, j’espère que tu vas bien. On se connaît un peu parce qu’on a travaillé ensemble il y a plus de 10 ans, alors que j’étais au secondaire. On ne s’est jamais beaucoup parlé parce que tu es plutôt timide, mais tu as toujours été poli et gentil avec moi, comme avec tout le monde d’ailleurs. On avait des amis du travail en commun et il est arrivé à quelques reprises qu’on se croise dans des partys ou dans des bars. Nos interactions ont de tout temps été amicales, sans plus.
J’ai quitté cet emploi il y a longtemps mais j’en garde encore d’excellents souvenirs. C’est pour ça que, quand tu as commencé à me suivre sur Instagram et Twitter il y a quelques années déjà, je t’ai aussi suivi et on s’est échangé quelques messages, toujours amicaux, sans trace de flirt et sans sous-entendu. Plus récemment, tu likais les photos de moi et tu m’as complimentée à quelques reprises. Tu m’as avoué m’avoir toujours trouvée jolie, ce qui m’a semblé sweet de ta part.
Il y a quelques jours tu m’as écrit: «J’ai envie de te dire quelque chose, mais va falloir que ça s’autodétruise de ton cerveau tout de suite après.» Je t’ai suggéré de ne pas me faire ton aveu, mais tu avais vraiment envie de le déballer, alors j’ai accepté et tu m’as écrit: «Je te trouve vraiment belle. J’adore ton sourire et tes seins, sérieux j’te viendrais dans face!»
Ça m’a pris quelques secondes pour être certaine d’avoir bien lu ce qui venait d’apparaître sur mon écran. J’aurais certainement eu le goût de te traiter de gros dégueulasse (et ça c’est la version polie de ce que j’ai pensé sur le coup), mais je ne l’ai pas fait. Je suis restée calme et j’ai tenté de t’expliquer que tu aurais dû garder ça pour toi. Tu m’as écrit: «Come on! C’est un compliment! T’aurais pas pu faire ta coquine 30 secondes pour me satisfaire?»
La réponse est non. Je me fous complètement de ta satisfaction. Elle ne regarde que toi et je n’ai aucun rôle à y jouer. Ce que tu m’as envoyé n’est pas un compliment, c’est du harcèlement. Oui, pour vrai, c’est du harcèlement sexuel. Je suis super ouverte d’esprit, je suis sympathique et chaleureuse, mais tu sais quoi? Ça ne te donne pas le droit de m’envoyer un message comme celui-là. Dire à une fille que tu veux «lui venir dans face», comme tu l’as si bien exprimé, c’est tout à fait correct si c’est une partenaire sexuelle ou même une amoureuse dont tu connais les préférences et qui aime se faire dire ce genre de choses. Mais je n’ai jamais été, je ne suis pas et je ne serai jamais ta partenaire sexuelle ni ton amoureuse et je me demande encore comment tu as pu croire que j’accepterais ce «compliment» de ta part.
Si ta blonde recevait ce genre de message d’un presqu’inconnu, comment réagirais-tu? Si c’était ta sœur? Et si ça arrivait un jour à ta fille? Je trouve ça dommage, mais beaucoup d’hommes comprennent finalement comment traiter les femmes le jour où ils ont une fille. Je sais que tu n’as pas encore d’enfant et je t’écris aujourd’hui parce que je souhaite de tout mon cœur qu’un jour, tu puisses enseigner à ta fille qu’elle a droit au respect. Je t’écris parce que je souhaite qu’un jour tu montres à ton garçon que les femmes ne sont pas des objets destinés à sa satisfaction. Je t’écris pour te dire que tu m’as choquée, que tu m’as insultée, mais si tu comprends le message que je t’envoie aujourd’hui, alors ça n’aura pas été en vain.
Aujourd’hui je ne te crucifie pas et je ne te traite pas de noms. Je t’écris avec respect en espérant que tu comprennes que j’en mérite autant que toi.
Sans rancune. Salut.