OTTAWA — Une réfugiée figurant parmi les 1200 Yézidis que le gouvernement fédéral a promis de réinstaller au Canada affirme que les femmes de cette minorité kurdophone de l’Irak ont pratiquement été laissées à elles-mêmes après leur arrivée en sol canadien.
Adiba exhorte Ottawa à aider les Yézidies à évoluer au sein de leur nouveau monde et à permettre à leurs proches de venir les rejoindre au Canada.
La jeune femme âgée de 27 ans a fui sa résidence de Sinjar, un district du nord de l’Irak, après que des militants de Daech (le groupe armé État islamique) ont attaqué des villages yézidis, capturant les femmes pour en faire des esclaves sexuelles. Elle affirme que certains membres de sa famille font partie des 10 000 Yézidis qui ont été massacrés durant ce génocide.
Ses parents et son frère vivent toujours dans un camp de réfugiés situé dans le Kurdistan irakien et elle a refusé de révéler son nom de famille par peur de représailles.
Adiba résidait dans un camp de réfugiés lorsqu’elle a appris que le gouvernement canadien avait accepté de parrainer des Yézidies. Comptant parmi le premier groupe de femmes à mettre les pieds au Canada, la jeune réfugiée a amorcé sa nouvelle vie, seule et effrayée, dans une chambre d’hôtel de Toronto avant qu’un organisme sans but lucratif ne lui offre son aide.
Elle raconte que ses compagnes et elle-même ont été conduites à l’hôtel Radisson et sont demeurées longtemps dans le hall d’entrée, affamées, assoiffées et incapables de demander ne serait-ce qu’un verre d’eau en raison de leur méconnaissance de l’anglais.
«Les clients pensaient que nous étions des sans-abri et nous ont donné de l’argent», a-t-elle indiqué dans le cadre d’une entrevue réalisée par le truchement d’un interprète.
La jeune femme avait fait le voyage jusqu’au Canada en compagnie de ses deux soeurs, dont l’une a six enfants.
Des services d’aide réclamés
Si elle est reconnaissante d’avoir été accueillie au Canada, Adiba était sur la colline du Parlement lundi matin afin d’appuyer une pétition demandant au gouvernement fédéral de fournir aux femmes victimes de Daech des services d’aide psychologique et sociaux.
La pétition a été lancée par Christine McDowell du Women Refugees Advocacy Project (Projet de défense des femmes réfugiées) et a été présentée par la porte-parole du Nouveau Parti démocratique en matière d’immigration, Jenny Kwan, à la Chambre des communes.
Cela fait tout juste un an qu’Adiba est arrivée au Canada et elle est maintenant bénévole pour One Free World International, l’organisme qui l’a aidée à s’installer, en plus de suivre des cours d’anglais.
En visionnant une vidéo de sa mère en train de pleurer après avoir visité leur maison ravagée par les combattants de Daech, la jeune femme essuie quelques larmes.
Elle aimerait vraiment que ses parents et son frère puissent se joindre à elle dans son pays d’accueil.
Mathieu Genest, un porte-parole du ministre de l’Immigration Ahmed Hussen, a précisé que les survivants des attaques de Daech étaient admissibles au Programme fédéral de santé intérimaire, dans le cadre duquel ils peuvent recevoir des soins de santé de base fournis par des médecins, dont des psychiatres, et des hôpitaux spécialisés en santé mentale.
Il a ajouté que les victimes de Daech avaient aussi accès à des services de santé mentale fournis par des psychothérapeutes, des psychologues et des conseillers ainsi qu’à une couverture pour l’achat de médicaments sur ordonnance pour traiter des problèmes de santé mentale.
Selon M. Genest, le Canada a jusqu’à maintenant accueilli 1400 survivants des attaques de Daech, dont plus de 1310 ont été parrainés par le gouvernement. Sur le lot, 85 pour cent sont des Yézidis.
Le porte-parole a souligné qu’Ottawa tentait de faciliter et d’accélérer la réunification des familles.