OTTAWA — Les experts chargés par le gouvernement fédéral d’évaluer si les personnes souffrant uniquement de troubles mentaux devraient devenir admissibles à l’aide médicale à mourir n’ont pas pu se mettre d’accord sur les éléments de preuve pertinents en la matière, d’après des rapports déposés au Parlement mercredi.
Les avis concordent tout de même sur deux autres aspects clés, soit l’accès pour des mineurs matures et les demandes anticipées. Premièrement, un rapport souligne qu’il y a déjà amplement de jurisprudence établissant qu’une personne âgée de moins de 18 ans peut avoir les capacités mentales et la maturité nécessaires pour prendre des décisions sur la fin de vie, comme le refus de traitements.
Puis, un rapport sur les demandes anticipées indique qu’elles pourraient «apporter un réconfort et soulager l’anxiété» de personnes en fin de vie faisant face à une dégradation de leur capacité intellectuelle. Toutefois, la suppression de l’exigence du consentement juste avant de recevoir une aide à mourir implique également la possibilité de mettre fin à la vie d’une personne contre sa volonté.
Le document laisse donc entendre que certaines balises pourraient être établies, telles que l’imposition de délais aux demandes anticipées et la nomination d’un mandataire spécial.
Les trois aspects ont été examinés par des groupes de travail créés par le Conseil indépendant des académies canadiennes, représentant certains des intellectuels les plus éminents au pays. Le gouvernement a expressément demandé au conseil de ne faire aucune recommandation sur ces trois questions. Les rapports publiés mercredi ne font donc que résumer «l’état des connaissances» et analysent les avantages et les inconvénients de l’extension du droit à l’aide à mourir à chaque groupe.
Le gouvernement Trudeau a déjà indiqué qu’il n’avait guère l’intention d’étendre la portée de la loi, qui est entrée en vigueur il y a deux ans et demi.
Les rapports arrivent un peu plus d’un mois après qu’une femme de Halifax souffrant d’un cancer du sein incurable, Audrey Parker, a décidé de mettre fin à ses jours plus tôt qu’elle ne le souhaitait, car elle craignait de perdre la capacité mentale nécessaire pour demander l’aide médicale à mourir. Mme Parker a imploré le gouvernement de permettre à des personnes comme elle de faire des demandes anticipées.
La ministre de la Justice, Jody Wilson-Raybould, s’était alors dite satisfaite de la loi.
«Nous n’envisageons pas de modifier quelque chose dans la législation», avait-elle déclaré. «Nous avons confiance dans le projet de loi que nous avons présenté, celui-ci trouve le juste équilibre entre pouvoir accéder à l’aide médicale à mourir, protéger l’autonomie des personnes et leur permettre de prendre les bonnes décisions, ainsi que protéger les personnes vulnérables.»
La loi n’autorise l’aide médicale à mourir qu’aux adultes qui souffrent de manière intolérable d’une maladie incurable et qui sont déjà proches de la mort naturelle. Elle exclut les mineurs et ceux qui souffrent strictement de troubles mentaux et ne permet pas de demandes anticipées.
La constitutionnalité de la loi est contestée. On lui reproche d’être beaucoup plus restrictive que le régime de l’aide à mourir décrit par la Cour suprême du Canada lorsqu’elle a annulé l’interdiction du suicide assisté par un médecin.