Québec entame aujourd’hui une consultation publique en vue d’établir une stratégie de développement durable sur cinq ans, alors même que la province peine à atteindre plusieurs de ses cibles environnementales.
«Les derniers mois ont été très parlants quant à l’impact de nos habitudes de vie sur l’environnement. Les citoyens et les organisations ont été nombreux à demander que nos actions redémarrent en prenant un virage durable et vert», souligne lundi, dans un communiqué, le ministre québécois de l’Environnement, Benoit Charette.
Ce dernier a ainsi annoncé le déclenchement, dès aujourd’hui, d’une consultation publique en ligne visant à aiguiller le gouvernement Legault dans l’élaboration de sa stratégie de développement durable 2022-2027. Ce processus se déroulera jusqu’au 25 octobre.
Cette stratégie, qui viendra remplacer celle élaborée en 2015, devait au départ s’appliquer dès l’an prochain. La pandémie du coronavirus a toutefois retardé son processus de création. Cette nouvelle planification du développement durable n’entrera donc en vigueur qu’en 2022.
Dans un rapport publié en juin, le Commissaire au développement durable du Québec, Paul Lanoie, appréhendait d’ailleurs des délais dans l’élaboration de cette nouvelle stratégie. Une situation reliée non seulement à la pandémie, mais aussi au manque d’intérêt du gouvernement Legault pour ce dossier, écrivait-il alors.
«On voit que la COVID, on l’utilise pour justifier plein d’actions. On le voit avec la déréglementation environnementale […] Je pense que c’est surtout une question de volonté politique», laisse tomber à Métro le porte-parole de Greenpeace, Olivier Kolmel.
Les facettes du développement durable
Cette consultation portera sur un 11 enjeux environnementaux et sociaux, comme la lutte au gaspillage alimentaire, le développement économique «vert et durable», l’accès à la nature et la mobilité durable. La stratégie qui en découlera devrait ensuite permettre d’encadrer tant les investissements publics que les politiques qu’élaboreront les différents ministères du gouvernement du Québec dans les prochaines années.
«Il faudra s’assurer que la prochaine stratégie de développement durable soit arrimée avec l’ensemble des décisions ministérielles qui sont prises. Ce qui n’est pas toujours le cas aujourd’hui», soulève à Métro le directeur des relations gouvernementales chez Équiterre, Marc-André Viau.
Ce dernier constate notamment une «déconnexion» entre les cibles de Québec en matière de développement durable et le projet de loi 66 sur l’accélération de certains projets d’infrastructure, où l’environnement est vue comme «un obstacle à la relance».
«Si une stratégie, aussi belle soit elle, n’est pas priorisée, ça ne donnera rien.» -Marc-André Viau, directeur des relations gouvernementales chez Équiterre
Des cibles à atteindre
Québec peine d’ailleurs, actuellement, à atteindre plusieurs de ses cibles environnementales. C’est notamment le cas de son objectif de réduction des gaz à effet de serre de 37,5% d’ici 2030.
Le gouvernement Legault compte par ailleurs réduire de 40% la consommation de produits pétroliers dans la province d’ici 10 ans, notamment en misant sur l’électrification des véhicules personnels et du transport en commun.
Or, pendant ce temps, Québec «continue d’augmenter le nombre de routes» dans la province, déplore M. Kolmel.
Dans un document faisant état de la situation du développement durable au Québec, publié cette année, on constate par ailleurs que Québec tarde à atteindre ses cibles en matière d’aires protégées.
Au cours des dernières années, «l’écart s’est d’ailleurs creusé entre la proportion du territoire québécois occupé par des aires protégées et les cibles que le Québec s’est fixées en accord avec la Convention sur la diversité biologique». Selon cet accord, la province devait avoir réussi à protéger 17% de son territoire en 2020. Or, ce pourcentage s’élève actuellement à 10%.
«On n’a pas besoin d’attendre pour un nouveau plan pour atteindre ces objectifs», martèle le porte-parole de Greenpeace, qui presse Québec d’agir afin d’atteindre la cible qu’il s’est fixée d’ici la fin de l’année en matière de protection des aires protégées.
Ce rapport fait aussi état d’une légère baisse du territoire zoné agricole. Une diminution qui «semble s’inscrire dans une tendance à plus long terme observée depuis la fin du siècle dernier». Un enjeu «à surveiller» pour assurer le maintien des «espaces nécessaires» à la production agroalimentaire à long terme, indique le document.
Cette nouvelle stratégie fera par ailleurs l’objet d’une commission parlementaire l’été prochain.