Alors que le Québec retrouve progressivement un semblant de «vie normale», notre chroniqueur Frédéric Bérard fait paraître ce mardi un nouvel essai politique intitulé «La terre est une poubelle en feu», aux Productions Somme toute. Un recueil de textes, d’idées, mais aussi d’échanges sur l’autre crise, celle de l’environnement, avec sa propre fille.
«C’est un essai politique qui est porteur d’un certain désarroi, parce qu’au fond, je suis assez pessimiste pour la suite des choses. En même temps, je pense qu’on ne peut pas baisser les bras. On a le devoir d’empêcher, comme disait Camus, que le monde se défasse», explique celui qui est aussi chroniqueur pour le Journal Métro.
Il affirme que la côté semble «encore plus abrupte à remonter» quand on constate l’ascension du mouvement complotiste, notamment au Québec. «Renverser cette tendance, remettre la pâte à dents dans la tube, ça va être une grosse affaire», illustre M. Bérard.
L’exemple environnemental
Abordant de plein fouet l’enjeu des changements climatiques, l’essai laisse aussi la parole à la jeune génération, par la voix d’Ève Bérard, la fille de l’auteur. Elle répond dans une lettre de son père, qui lui écrit que sa génération a «baissé les bras» devant l’ampleur du virage à faire. «Je suis déçue des choses qu’on n’a pas faites, et des actions qu’on n’a pas prises à l’avance. Ma génération ressent aujourd’hui une certaine pression, comme si c’était la dernière chance de changer les choses», explique la jeune femme de 18 ans.
«Avec tout ce qui se passe en ce moment, c’est clair que c’est possible d’apporter des changements. Je n’avais pas espoir. Mais depuis cette pandémie, on dirait que oui.» -Ève Bérard
Elle ajoute que les changements climatiques «arrivent pour une raison». «On blâme tout le monde, mais c’est nous le problème. Les compagnies ne produiraient pas autant de choses s’il n’y avait pas cette demande. Il faut repenser à tout. Les systèmes dans lesquels on vit ne fonctionnent plus», illustre-t-elle.
Frédéric Bérard, lui, s’inquiète que la COVID-19 a fait prendre la «voie d’évitement» à l’environnement. «Oui, c’est vrai qu’on a eu le temps de réfléchir à certains enjeux, comme le télétravail, mais sinon, on n’en parle pratiquement plus. On va bientôt rentrer dans un cercle vicieux, et le coup de barre, il ne faut pas le donner dans dix ans», tonne le chroniqueur.
Bérard en rafale
Sur plusieurs tribunes, Frédéric Bérard s’exprime sur une variété d’enjeux depuis le début de la pandémie. Voici ce qu’il pense de…
La gestion de crise du gouvernement Legault: «Les trois premières semaines, je les appuyais à fond la caisse. Mais on a vu qu’il avait une promiscuité entre Horacio Arruda et François Legault, alors que dans plusieurs États, on sépare les deux pour des raisons évidentes.
Là, ça devient problématique. Je ne dis pas que toutes les décisions ont été mauvaises, et on verra les impacts à long terme, mais on a l’un des pires bilans au monde. De voir cette aura autour d’Arruda et Legault qui est à 83% dans les sondages, je me dis que tout ça est une opération de communication absolument puissante.»
Le projet de loi 61: «C’est une hérésie épouvantable, et comme la population appuie le gouvernement, il peut faire n’importe quoi. La CAQ en profite pour faire passer 202 projets qui sont pour la plupart des promesses électorales, dans des comtés caquistes. Le problème, c’est qu’on s’en prend à l’État de droit, et qu’on viole la démocratie clairement.
On dit qu’un ministre pourra amender la Loi sur la qualité de l’environnement par un règlement. Mais la loi est adoptée par l’Assemblée nationale. C’est le symbole démocratique par excellence. Je n’ai jamais vu un projet comme ça depuis 25 ans. Les années Harper n’avaient rien à voir avec ça.»