Il n’y a pas que le nez de Cyrano de Bergerac qui soit grand. La production présentée en collaboration avec le Théâtre du Nouveau Monde (TNM) et le festival Juste pour rire l’est aussi, sur toute la ligne.
Entre les mains de Serge Denoncourt à la mise en scène, et mettant en vedette dans le rôle-titre Patrice Robitaille, Cyrano… impressionne. Par la distribution talentueuse (20 comédiens, parfois presque tous sur scène en même temps), par la mise en scène efficace et juste, mais aussi par les décors imposants. Tout cela donne un grand moment de théâtre.
Cyrano (Patrice Robitaille), décrit comme hideux à cause de son nez hors du commun, est amoureux de sa cousine Roxane (Magalie Lépine-Blondeau). Mais Roxane aime Christian (François-Xavier Dufour), beau, mais peu éloquent. Cyrano donnera à Christian les moyens de charmer Roxane en lui faisant cadeau de ses mots. Ceux-ci, en fin de compte, séduiront davantage la belle que le physique agréable de Christian. Envoûtée par les vers d’amour que signe ce dernier, mais qu’écrit en réalité Cyrano, c’est à Christian que Roxane donne ses lèvres et sa passion, jusqu’au moment où, des années plus tard, la supercherie est découverte.
Débutant de façon somme toute un peu lente, cette mouture présentée au TNM du classique du théâtre écrit en 1897 par Edmond Rostand se développe sur près de trois heures. La pièce est rythmée par les combats d’épée, les célèbres tirades, le comique et la gravité de certaines scènes. Comme décors, de grandes structures de bois, tels des échafaudages qui s’ouvrent et se referment, offrent une belle polyvalence pour les différentes scènes.
Cyrano de Bergerac dévoile un impeccable Patrice Robitaille, dont on a bien sûr accentué le nez avec une prothèse d’une longueur improbable. Le comédien relève avec brio le défi de ce rôle exigeant. On croit à sa fougue, à son malheur, à son amour. Son Cyrano est vêtu de noir – contrastant avec les costumes plus colorés des autres personnages – et son attitude corporelle en impose.
Dans le rôle de Roxane, Magalie Lépine-Blondeau est splendide. Pour incarner cette femme adorée de tous les hommes, la comédienne devient tour à tour sensuelle, aventurière, amoureuse, manipulatrice, éplorée. Comme Patrice Robitaille et tous les autres comédiens, elle est convaincante, malgré l’action qui se situe à une époque depuis longtemps révolue. Au passage, on ne saurait passer sous silence la drôlerie exemplaire de Normand Lévesque dans le rôle de Ragueneau.
À la mise en scène, Serge Denoncourt a su mettre en valeur les comédiens et doser le drame et les moments comiques. Surtout, il a su faire en sorte que la langue de la pièce, qui aurait pu être casse-cou puisqu’elle se décline presque exclusivement sous forme d’alexandrins, n’accuse aucune lourdeur et semble naturelle dans la bouche des acteurs. On se retrouve même à vouloir encore plus de cette poésie et de cette histoire d’amour.
Cyrano de Bergerac
Au Théâtre du Nouveau Monde
Jusqu’au 23 août