Que les amateurs d’ambrées, de blondes et autres ales ou lagers se préparent: la recrudescence de vagues de chaleur et de sécheresses générée par le changement climatique devrait faire régulièrement plonger la production d’orge, et avec elle celle de bière.
Les événements extrêmes affectant cette céréale devraient rendre la boisson alcoolisée la plus populaire au monde plus rare, et plus coûteuse, indique une étude publiée le 15 octobre.
«Une baisse de la production mondiale d’orge c’est une baisse encore plus grande de la production d’orge consacrée à la bière,» explique Dabo Guan, professeur en économie du changement climatique à l’université d’East Anglia (Grande-Bretagne), relevant que «les cultures de haute qualité sont encore plus sensibles».
Seule l’orge de la meilleure qualité (soit moins de 20% de l’orge mondiale) est consacrée à la production de bière, le reste servant notamment à nourrir les animaux d’élevage.
Si le réchauffement se poursuit au rythme actuel, les événements majeurs (sécheresse et vague de chaleur d’une sévérité historique) frapperont au cours de ce siècle une des grandes régions de culture au moins une fois par an, entraînant une chute de 16% de la production mondiale de bière, soit l’équivalent de ce qui est bu en un an aujourd’hui aux États-Unis, ont calculé les chercheurs dans leur étude publiée dans Nature Plants.
Les prix, en moyenne, doubleraient à la suite de ces crises.
Dans le scénario le plus optimiste (avec fort déclin immédiat des émissions de gaz à effet de serre, ce qui n’est pas du tout le chemin pris actuellement), moins de 20 événements extrêmes majeurs concerneraient ces zones d’ici 2100, réduisant la production mondiale de bière de 4% et relevant les prix de 15%.
Certains pays seront particulièrement touchés, note l’étude. Dans le top 20 des régions consommatrices (par habitant) figurent aujourd’hui les pays européens, les États-Unis, la Nouvelle-Zélande et l’Australie.
Les principaux exportateurs d’orge sont l’Australie, la France, la Russie, l’Ukraine, l’Argentine, suivis d’autres pays d’Europe. Les grands importateurs sont la Chine, l’Arabie saoudite et l’Iran, suivis des trois grands brasseurs que sont les Pays-Bas, la Belgique et le Japon.
Dans un monde où le climat promet aussi de réduire la productivité et la valeur nutritionnelle du blé, du maïs ou encore du riz, l’orge pourrait en outre être consacrée prioritairement à des usages alimentaires.
«Le changement climatique pourrait bien réduire la disponibilité, la stabilité et l’accès aux produits de luxe», souligne M. Guan. «Quand un événement extrême survient, le rendement de toutes les cultures décline. Les pays pauvres, l’Inde, l’Afrique… devront s’interroger sur leur sécurité alimentaire. Les populations des pays développés souffriront moins, parce qu’elles ont un pouvoir d’achat plus élevé, mais leurs consommations de luxe devront être revues (bière, vin, chocolat…)».