Un projet de marais filtrant, premier en son genre sur l’île de Montréal selon ses responsables, est en cours d’élaboration dans un terrain industriel à Montréal-Est.
Le projet de recherche en phytoremédiation du Jardin botanique de Montréal et de l’Université de Montréal vise à décontaminer les eaux de nappe phréatique d’un site de ParaChem, fabricant de paraxylène, un hydrocarbure utilisé dans la production du polyester.
Les responsables de ce projet et d’un banc d’essai en phytoremédiation de terrains industriels dans Pointe-aux-Trembles ont prévu de les présenter, fin septembre, à des dizaines de scientifiques de différents pays dans le cadre de la 14e Conférence internationale des phytotechnologies.
Dans le projet de marais filtrant, l’eau souterraine d’un site contaminé aux dérivés pétrochimiques toxiques sera pompée dans une série de bassins, où, on l’espère, des plantes aquatiques ou semi-aquatiques absorberont les contaminants.
L’eau circulera constamment dans le système, sera régulièrement analysée vers la sortie puis, si jugée suffisamment décontaminée, envoyée directement dans les égouts municipaux. Sinon, vers le système conventionnel de traitement chimique de ParaChem.
«La plupart des systèmes environnementaux fonctionnent comme ça: un système qui fonctionne avec les plantes pendant la belle saison et un système plus classique pendant la mauvaise saison. De façon à ce que ça fonctionne tout le temps», précise le gestionnaire du projet à l’Institut de recherche en biologie végétale de l’Université de Montréal, Patrick Benoît.
La plantation d’espèces végétales dans le «marais» est prévue au printemps 2018.
Éviter la dissémination
Il est important d’intercepter les contaminants des nappes phréatiques notamment parce que celles-ci sont connectées et que les contaminants de l’une peuvent migrer vers d’autres, rappelle M. Benoit.
«On le voit avec des expériences: quand il y a terrains contaminés, rarement la contamination reste sur le terrain. Elle est disséminée par différentes choses comme les puits, les animaux, les végétaux ou le vent. Deuxième problème; si vous utilisez cette nappe phréatique pour en consommer l’eau potable ou pour l’irrigation, elle n’est pas disponible pour vous. C’est deux problèmes, l’un économique, l’autre écologique», observe le chercheur.
Parachem traite déjà des eaux de nappe phréatique pour en retirer le phénol-acétone hérité de son ancêtre BA Shawinigan. L’usine en a produit de 1953 à 1991.
«Je suis extrêmement fier de voir le savoir du Jardin botanique venir nous aider dans l’est de Montréal, pour faire l’amélioration des terrains», déclare le directeur général de Chimie ParaChem, André Brunelle.
Le projet fait partie du mandat de la Fiducie des Installations pétrochimiques de Montréal-Est. Celle-ci a la charge de réhabiliter les terrains contaminés et récupérer les eaux contaminées des sites dont elle est fiduciaire.
«La Fiducie est fière d’être associée à Chimie ParaChem, [l’IRBV] et le Jardin botanique de Montréal pour l’application, la réalisation et la mise en place du premier projet de phytoremédiation», déclare-t-elle dans un courriel.
Le phénol
Entre notamment dans la fabrication de résines et de produits organiques. Considéré comme nocif en cas d’ingestion, toxique par contact cutané et mortel par inhalation, selon le Système d’information sur les matières dangereuses utilisées au travail (SIMDUT).
L’acétone
Tres utilisée comme solvant. Considéré comme liquide inflammable et irritant pour les yeux, selon le Système d’information sur les matières dangereuses utilisées au travail (SIMDUT).
Projet d’écopile
L’IRBV négocie avec la Fiducie dans le but de traiter la terre issue de l’aménagement du marais par écopile.
Ce procédé similaire à la biopile décontamine les sols à l’aide de micro-organismes, mais y ajoute un couvert végétal au lieu d’une bâche, afin de contrôler les effluents et aider les micro-organismes à dégrader les composants organiques.
Les plantes accumulent alors éléments minéraux et métaux lourds avant d’être soit transformées en «biochar», réduites en cendres pour de la bioénergie ou servir à la production de bioproduits.
Si le projet va de l’avant, la biopile serait formée en même temps que la plantation dans le marais, au printemps 2018, estime M. Benoit.