Rivière-des-Prairies–Pointe-aux-Trembles

Dieudonné Ella Oyono: un homme et son coup de cœur

Dieudonné Ella Oyono, économiste et auteur québécois, originaire du Gabon.

Après une interruption de trois ans forcée par la pandémie, Dieudonné Ella Oyono annonce la reprise de la tournée de son livre Comment tomber en amour avec son nouveau pays?, à compter de la fin mars. L’auteur québécois d’origine gabonaise se donne pour mission de parcourir les 17 régions du Québec, en débutant par Lanaudière et l’Estrie.

En 2018, après 17 ans de «vie commune avec le Québec», M. Ella Oyono a décidé de publier son récit dans l’objectif de témoigner de sa profonde gratitude envers le Québec et les Québécois pour leur accueil. Il souhaitait également inspirer les personnes issues des communautés ethnoculturelles et influencer les politiques publiques de la prochaine décennie en matière d’immigration.

En prenant un nouvel élan, le résident de l’arrondissement de Rivière-des-Prairies-Pointe-aux-Trembles propose aux écoles, organismes, associations et municipalités à travers la province une conférence sur «les clés du succès en matière d’intégration».

«Au Québec, on parle beaucoup trop des seuils d’immigration et de la capacité d’accueil. Bien que ce soit un débat nécessaire, je voudrais qu’on mette l’emphase sur l’apport des [immigrants] et sur comment on peut vivre tous ensemble sur ce territoire et contribuer à son épanouissement», dit M. Ella Oyono, en entrevue avec Métro.

Mieux vivre ensemble

Au-delà de décrire son parcours professionnel, M. Ella Oyono raconte dans son récit «l’intégration d’un homme arrivé au Québec à l’âge de 27 ans, qui s’est appuyé sur son instinct et la générosité des gens pour vivre ses rêves».

L’auteur, qui a présidé le Parti Québécois, en plus d’occuper plusieurs fonctions dans différents ministères du gouvernement du Québec pendant une dizaine d’années, présente également dans son livre sa vision d’avenir pour réussir à «bâtir ensemble une société plus prospère, plus engagée et plus solidaire».

On est tous des Québécois. Il ne faut plus voir les gens comme nous autres et eux autres. Nous, ça inclut tout le monde.

Dieudonné Ella Oyono, ex-président du Parti Québécois

Sentiment d’appartenance

M. Ella Oyono souligne l’importance du sentiment d’appartenance dans la réussite de l’intégration des immigrants au Québec. Il affirme en outre que la volonté des dirigeants gouvernementaux de les inciter à s’établir en région ne suffit pas.

«C’est un point de départ, mais les gens ne restent pas dans une région uniquement parce qu’ils ont un emploi. Il faut que quelque chose nous y attache pour qu’on ait envie d’y rester», exprime l’auteur, convaincu que l’enracinement des immigrants dépend aussi bien de leur implication, que du soutien de la collectivité.

Image tirée du compte Twitter de l’auteur Dieudonné Ella Oyono

«Il revient d’une part à l’immigrant qui s’en va en région de s’y impliquer, mais il revient aussi à l’ensemble de la communauté de [créer] les conditions [adéquates] pour que les gens y restent», ajoute M. Ella Oyono, qui prêche par l’exemple en s’impliquant dans sa communauté, que ce soit pour entraîner des jeunes au soccer ou en tant que membre du conseil d’établissement d’une école de son quartier.

Les gens restent à un endroit parce qu’ils tombent en amour avec. C’est pour ça que je voulais que mon livre porte ce titre-là.

Dieudonné Ella Oyono, auteur du livre Comment tomber en amour avec son nouveau pays?

Servir de modèle

Convaincu que le rôle de chacune des générations est de «débroussailler le chemin et d’ouvrir des portes» pour les générations à venir, l’auteur s’adresse aussi aux jeunes, qu’il considère «la plus grande richesse de notre société».

«Je suis déçu du grand nombre de jeunes à qui je parle qui disent ne pas se reconnaître comme des Québécois, alors que je suis intimement convaincu que dès qu’on arrive au Québec, dès qu’on choisit d’y déposer ses valises, on devient des Québécois à part entière, avec les droits et les responsabilités qui viennent avec [ça]», exprime le docteur en économie et chargé de cours au Département de sciences économiques de l’UQÀM, qui s’implique dans plusieurs causes et organismes, animé par son désir de contribuer à créer un meilleur avenir pour nos jeunes.

«C’est ça le message que je veux porter aux jeunes, en racontant dans mon livre qu’il y a eu aussi des choses que j’ai essayées et qui n’ont pas fonctionnées. Je veux qu’ils sachent que c’est à eux de prendre la décision d’affirmer qu’ils sont des Québécois et de prendre leur place.»

Changer les choses

M. Ella Oyono se réjouit de pouvoir travailler dans son domaine d’études depuis des nombreuses années, mais il demeure sensible à la réalité de beaucoup d’immigrants qui occupent des emplois «en deçà de leurs compétences».

L’enjeu de reconnaissance des diplômes et des compétences [subsiste]. Il y a des gens qui travaillent et qui pourraient contribuer davantage [à la société], mais ils n’ont pas un niveau de poste adéquat.

Dieudonné Ella Oyono, directeur de la mise en valeur des pôles économiques au Service du développement économique à la Ville de Montréal

«Techniquement, le fait de faire des études supplémentaires ici devrait aider [les immigrants à intégrer] le marché du travail, mais ce n’est pas toujours le cas. Les choses évoluent, mais il y a un effort supplémentaire à faire», dit l’auteur, en signalant la responsabilité des entreprises privées pour réussir à insuffler un changement dans la société.

«Ce n’est pas uniquement en tapant sur le gouvernement ou les organismes publics qu’on y arrivera. Plus on va avoir des gens issus de la diversité dans des postes de cadres intermédiaires et supérieurs, plus les choses vont changer naturellement», affirme celui qui est aussi fondateur de l’organisme Afrique Canada Opportunités.

Ce texte a été produit dans le cadre de L’Initiative de journalisme local.

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