À peine la porte s’ouvre que les premières mouches s’envolent au milieu du salon, alors que des ouvriers s’activent à découper le plancher de Ginette Henrichon dans le but de trouver la provenance de ces nuisibles. Depuis dix mois, Mme Henrichon est forcée de cohabiter avec des centaines de mouches à drain ou «mouches des éviers», qui l’empêchent de jouir de son logement, la forçant à devoir se reloger temporairement. Mais ni ses assurances ni les services municipaux n’ont pu lui venir en aide.
C’est en rentrant de camping que cette retraitée de 66 ans remarqua la présence de mouches dans son logement. Au début, elle pensait simplement qu’elle avait à faire à des mouches de fruit. Puis leur nombre a progressivement augmenté, l’obligeant à demander l’aide de sa propriétaire. Cette dernière a immédiatement fait appel à un premier exterminateur pour trouver la source du problème, en vain.
S’en suit plusieurs interventions d’exterminateurs afin de trouver la provenance de cette invasion de mouches à drain, mais toujours sans succès. Désormais, son logement est envahi de ces insectes noirs volant, dont les cadavres remplissent le fond des boites et tapissent les rebords des fenêtres.
Les mouches de drains utilisent les canalisations pour se reproduire et peuvent pondre plusieurs centaines d’œufs chacune qui éclosent au bout de quelques jours.
Depuis dix mois, Mme Henrichon est contrainte de dormir sur le canapé de son salon, car les mouches sont encore plus présentes dans sa chambre à coucher. La locataire explique même manger des mouches lors de son sommeil. À cause de l’insalubrité, Ginette Henrichon ne peut même plus cuisiner dans son logement et se nourrit uniquement de repas congelés depuis dix mois.
«Depuis dix mois, je vis de la nervosité, des tensions, la pression, l’insécurité et la situation est invivable, car je n’ai pas accès chaque jour de ma vie à mon appartement», explique en larmes Ginette Henrichon.
Mme Henrichon se réjouit de pouvoir compter sur sa propriétaire qui depuis le début fait tout en son possible pour lui venir en aide. Sa propriétaire a tenté de contacter ses assurances pour pouvoir reloger temporairement Mme Henrichon, mais elles lui auraient répondu qu’aucune aide de relogement ne pouvait lui être fournie tant que la source de l’infection n’a pas été trouvée.
Prise au dépourvu, la locataire a tenté d’aller chercher de l’aide auprès des ressources pour femmes en difficulté, mais aucune place n’aurait été disponible pour l’accueillir.
Propriétaire et locataire sans solutions
Propriétaire et locataire se retrouvent toutes les deux au pied du mur. Face à l’absence de solutions, Ginette Henrichon s’est déplacée directement au conseil d’arrondissement pour exposer sa situation aux élus de Saint-Léonard. Un premier inspecteur de l’arrondissement est venu à son domicile pour constater le sinistre, mais la conclusion de son rapport n’a pas été à la hauteur des attentes de la locataire sinistrée.
«Il a dit qu’il avait suspecté des mouches, mais que la plainte n’était pas fondée, explique Ginette Henrichon. C’était écœurant, il avait les mouches dans la face et il vient me dire que la plainte n’est pas fondée, pensez-vous que je fais des blagues ici ?»
Un second inspecteur spécialisé en bâtiment serait ensuite venu. Métro a pu consulter son rapport d’inspection qui témoigne en date du 7 juin dernier, de l’ampleur du sinistre.
«J’ai constaté des mouches à drain partout dans le logement et surtout des mouches mortes collées sur des pièges autocollants installés dans les vitres de fenêtre, lit-on dans le rapport d’inspection. Pratiquement toutes les pièces sont infectées par les mouches, la cuisine, le salon, les deux chambres, les placards et la salle de bain.»
L’arrondissement de Saint-Léonard explique être informé du problème de mouches présentes dans le logement de Mme Henrichon et qu’un inspecteur assure un «suivi serré» auprès d’elle et de sa propriétaire.
Il souligne toutefois qu’il revient à la propriétaire de corriger cette situation. Mme Henrichon a contacté l’Office municipal d’habitation de Montréal (OMHM) dans l’espoir de trouver un hébergement temporaire.
Contacté par Métro, l’OMHM explique que Mme Henrichon n’est pas éligible à leurs services car il s’agit d’un cas d’insalubrité et donc qu’il revient aux services de l’arrondissement d’effectuer les démarches nécessaires. Ginette Henrichon a débuté des démarches auprès du tribunal administratif du logement afin d’obtenir une compensation financière pour la non-jouissance de son logement.
De son côté, la propriétaire, qui préfère rester anonyme, explique que le «dossier avance» auprès des assurances. Ces dernières auraient par ailleurs reconnu qu’il s’agit là d’un «cas particulier».