Le premier ministre britannique Boris Johnson a essuyé un nouveau revers mercredi après que la justice écossaise a déclaré «illégale» la suspension controversée du Parlement jusqu’au 14 octobre, soit deux semaines seulement avant la date du Brexit.
Cette décision «ne change rien» pour l’heure, a immédiatement réagi une source gouvernementale.
Le gouvernement a annoncé qu’il formait un recours auprès de la Cour suprême à Londres contre cette décision. «Aucun ordre n’a été donné d’annuler la prorogation» du Parlement avant l’audience qui doit se tenir mardi, a déclaré cette source à l’AFP.
Saisie par près de 80 parlementaires, la cour d’appel d’Édimbourg a estimé que la décision de Boris Johnson avait «pour but d’entraver le Parlement» et a déclaré la prorogation «illégale» et «nulle et sans effet».
«Nous sommes déçus de la décision d’aujourd’hui et ferons appel auprès de la Cour suprême», a déclaré Downing Street dans un communiqué, juste après l’annonce de la décision.
Le Labour, principal parti d’opposition, tout comme la première ministre écossaise Nicola Sturgeon, ont demandé que le Parlement soit immédiatement rappelé.
Il s’agit de la première victoire judiciaire des opposants à cette suspension très controversée du Parlement, qualifiée par ses opposants de manoeuvre du chef du gouvernement conservateur visant à les empêcher de bloquer un Brexit sans accord.
En première instance, la justice écossaise avait rejeté cette action intentée pour bloquer cette suspension.
Le juge Raymond Doherty avait estimé que cette suspension relevait du «domaine de la politique et de la prise de décision, ce qui ne saurait être évalué par des critères légaux mais seulement par des jugements politiques», ajoutant dans son jugement qu’il était du ressort du «Parlement ou, en fin de compte, de l’électorat» de trancher.
Mais les juges d’appel écossais ont considéré à l’inverse qu’ils pouvaient déclarer cette suspension illégale car son objectif était de soustraire l’action du gouvernement au contrôle des députés, selon un résumé de la décision diffusé par la cour d’appel d’Édimbourg.
«Personne de vraiment sensé n’a jamais cru aux raisons invoquées par Boris Johnson pour suspendre le Parlement», a commenté le porte-parole du Labour, Keir Starmer, estimant que le Parlement devait être rappelé «immédiatement».
La première ministre écossaise Nicola Sturgeon a, elle aussi, lancé le même appel, afin que le Parlement puisse continuer son «travail essentiel de contrôle».
Le Parlement britannique a été suspendu dans la nuit de lundi à mardi pour cinq semaines dans un climat politique tendu.
La cérémonie marquant cette suspension s’est tenue au milieu des protestations acrimonieuses de l’opposition, dont des membres ont brandi des affichettes «Réduits au silence» et crié «Honte à vous!» en direction de leurs homologues conservateurs.
Avant cela, les députés avaient mis en échec pour la deuxième fois en quelques jours la proposition de Boris Johnson d’appeler les électeurs aux urnes le 15 octobre pour obtenir une nouvelle majorité et retrouver une marge de manoeuvre.
Préalablement à tout scrutin, l’opposition veut s’assurer que la perspective d’un «no deal» et le chaos économique qu’il fait craindre sont écartés et que le Brexit sera repoussé de trois mois si aucun accord n’est trouvé d’ici au 19 octobre, comme le Parlement l’a voté la semaine dernière.
L’expert juridique David Allen Green a estimé sur Twitter à «zéro» les chances de succès de la procédure devant la Cour suprême de Londres, soulignant que la loi écossaise est «complètement différente» de celle de l’Angleterre et du Pays de Gales.
D’autres procédures ont été intentées en Irlande du Nord et à Londres, sans succès pour le moment.