BROSSARD, Qc — Il ne reste plus beaucoup d’années à la belle et grande carrière de Caroline Ouellette à titre de joueuse de hockey. Mais ça ne l’empêche certainement pas de caresser des rêves pour l’avenir d’un sport dont elle a été l’une des principales têtes d’affiche au Canada depuis au moins 15 ans.
Dans un contexte visant à souligner la récente conquête de la coupe Clarkson par les Canadiennes de Montréal en finale de la Ligue canadienne de hockey féminin ainsi que la Journée internationale des femmes, mercredi après-midi, Ouellette en a profité pour énoncer deux grandes aspirations pour son sport: une visibilité accrue auprès des médias et l’accession au statut professionnel pour les joueuses.
Dans le premier cas, Ouellette voit des progrès. En décembre, les Canadiennes ont affronté l’Inferno de Calgary devant une foule de 6000 spectateurs au Centre Bell. Elle le constate aussi en croisant de jeunes filles qui connaissent et reconnaissent les joueuses de l’équipe.
Ouellette aurait cependant souhaité que la finale de la coupe Clarkson, que les Canadiennes ont gagnée par le score de 3-1 contre l’Inferno dimanche dernier à Ottawa, soit vue par ses compatriotes de langue française. Seul le réseau Sportsnet a diffusé le match, en direct de surcroît.
Ouellette dit en avoir eu un pincement au coeur, d’autant plus que la victoire a permis à la formation montréalaise de savourer une douce revanche après une défaite sans équivoque face à la même formation il y a un an.
«Parfois, on a l’impression qu’on avance, mais pourquoi ne peut-on pas présenter aussi les Canadiennes de Montréal en français? Nous, on est fières d’être francophones, on est fières d’être Québécoises et on aurait aimé pouvoir présenter ce match-là, cette finale de la coupe Clarkson à nos familles, à nos amis qui sont ici au Québec, a déploré Ouellette.
«C’est une sorte de cercle vicieux, a-t-elle renchéri. Nous avons besoin des médias pour attirer les gens, mais nous avons besoin des gens pour que les médias deviennent intéressés. C’est la même chose avec les commandites.»
Cette visibilité que recherche Ouellette pourrait aussi aider le Québec à faire hausser le nombre d’inscriptions dans la province, qui accuse un sérieux retard sur sa voisine immédiatement à l’ouest.
«Si on regarde les chiffres au hockey féminin au Québec, on a un peu moins de 7000 joueuses partout dans la province tandis qu’en Ontario, on en compte presque 50 000. Pour que les filles s’intéressent au hockey, elles doivent voir des femmes qui évoluent et qui ont du succès dans le sport. Nous, on est la preuve vivante de tous les bienfaits que le sport peut amener dans la vie d’une femme.»
Aide de la LNH
L’autre grand rêve de Ouellette est de voir le hockey féminin devenir un gagne-pain quotidien pour celles qui le pratiquent. À l’exception de joueuses comme Marie-Philip Poulin et Lauriane Rougeau, deux membres de l’équipe nationale, les joueuses des Canadiennes ont besoin d’un emploi pour joindre les deux bouts.
Ouellette aimerait que la Ligue canadienne de hockey féminin puisse évoluer dans un contexte semblable à ce qui prévaut au basketball aux États-Unis avec la WNBA, où les joueuses sont des professionnelles.
«On est traité comme des professionnelles par notre personnel d’entraîneurs, par nos préposés, nos partisans. Toutes les filles qui sont devant vous travaillent à temps plein. On s’entraîne tard le soir, on joue la fin de semaine, on part le samedi matin à 8 h, on revient souvent à 1 h du matin le dimanche, les filles se lèvent à 6 h pour travailler 40, 50, 60 heures par semaine. Imaginez si on pouvait s’entraîner à temps plein, pratiquer presque chaque jour, à quel point le calibre serait encore meilleur. Pour moi, ç’a toujours été le rêve ultime et j’espère vivre assez longtemps pour le voir.»
Ouellette pense que ce rêve peut se réaliser. Pour ce faire, il faudra, dit-elle, des investissements qui assureront que les joueuses seront rémunérées, ainsi qu’une association en bonne et due forme avec la Ligue nationale de hockey. Or, elle dit avoir entendu parler que des discussions en ce sens auraient cours entre la LNH et la Ligue canadienne de hockey féminin.
«Ce serait tellement fantastique. Pour moi, c’est une question d’égalité dans la société que d’être capable d’offrir le même rêve aux petites filles qu’aux petits garçons qui sont à l’école primaire et qui rêvent de pouvoir accéder à une ligue professionnelle. Ensemble, on peut le créer. La Ligue nationale a les ressources pour créer cette opportunité pour toutes les petites filles dans le monde.»
En attendant que ces rêves se concrétisent, Ouellette amorcera une nouvelle étape de sa carrière alors qu’elle agira à titre d’entraîneure-adjointe lors du Championnat du monde, à la fin du mois à Plymouth, au Michigan. Un rôle semblable aux Jeux olympiques de 2018 ne lui a toutefois pas encore été garanti.
Quant à sa carrière de joueuse, Ouellette se donne l’été pour se faire une idée claire.